Fonds de tiroir


« De gigantesques arènes de béton et d'acier ont commencé à sortir du désert qatari », nous annonce « Le Monde » du 18 juillet. De quoiquoncause ? Des futurs stades de la Coupe du monde de football 2022, qui se jouera dans cet émirat arabique où la température dépasse les 50 degrés en été, quand les travailleurs importés d'Asie se crèvent, au sens littéral du terme, à construire les cathédrales du foot-pognon. En 2013, la Confédération  syndicale interna-tionale (CSI) avait exprimé sa crainte que 4000 ouvriers périssent au Qatar avant le match d'ouverture, en 2022. En 2012, des statistiques officielles qataris faisaient déjà état de 520 morts, dont 385 inexpliquées, essentiellement parmi les travailleurs Népalais, Indiens et Bengalis (qui constituent les trois quarts des deux millions de travailleurs importés au Qatar). Dans le collimateur des ONG, des syndicats et des media, le comité organisateur du Mondial a soumis les entreprises qui remportent les marchés à un cahier des charges plus contraignant, a introduit un salaire minimum de 750 riyals (soit environ 200 francs suisses ou 176 euros)...et l'Organisation du travail a clos la procédure pour « travail forcé » ouverte en 2014 contre le Qatar, qui soumettait les travailleurs importés à un régime proche du servage, la «kafala», que l'émirat s'est engagé à abolir. Les ONG sont plus sceptiques que les syndicats et l'OIT quant aux engagements du Qatar : l'abolition de la « kafala » est promise depuis des années, les statistiques de la mortalité au travail ne sont plus publiées depuis 2012, la majorité des décès de travailleurs sont sortis de la statistique des accidents du travail en étant comptabilisés comme « défail-lances cardiaques » et des entreprises mandataires continuent de faire travailler des ouvriers à l'extérieur pendant les heures les plus chaudes de l'été, alors que la loi l'interdit. Cela dit, on ne se fait pas d'illusion : le Mondial 2022 fera quand même s'agglutiner les moutons devant les télés. C'est ça qui compte, non ?

Au deuxième trimestre 2018, le nombre de frontaliers étrangers actifs dans le canton de Genève était de 1,7 % supérieur à celui du deuxième trimestre 2017 par rapport au trimestre correspondant de 2017. Au plan suisse, la hausse d'une année sur l'autre a été de 0,4 %. Le nombre de frontaliers augmente donc à Genève quatre fois plus vite qu'en moyenne nationale : fin juin, le nombre de frontaliers étrangers actifs dans le canton de Genève s'est élevé à 85 351 personnes, soit plus d'un quart du total des frontaliers qui travaillent en Suisse. Genève est le canton qui en compte le plus grand nombre, suivi du Tessin (63 494 personnes). Et Genève et le Tessin sont aussi les cantons qui comptent des partis politiques obsessionnellement anti-frontaliers. Et donc des partis politiques purement parasitaires (le MCG et la Lega) et, fort heureusement, d'une absolue inefficacité.

En 2017, en Suisse, on a aimé donné aux nouveaux-nés des prénoms qui finissent en A : Emma (478), Mia (420) et Sofia (352) ont été les trois prénoms féminins les plus souvent donnés aux 42 508 filles nées cette année- là. Chez les garçons (44 873), les prénoms les plus populaires ont été Noah (490), Liam (434) et Luca (360). En Suisse alémanique, la première place revient à Noah pour les garçons et à Mia pour les filles tandis que Gabriel et Emma sont les prénoms les plus courants en Suisse romande (à Genève, ce sont Gabriel et Sofia). En Suisse italienne, Leonardo et Sofia sont sur la première marche du podium alors que la préférence est accordée à Gian et Angelina dans la région linguistique romanche. Pourquoi on vous raconte ça ? Ben, comme ça, pour rien, juste histoire de respirer entre deux ricanements suscités par l'actualité.

L'année dernière, le Grand Conseil genevois décidait d'instaurer un accès gratuit à la justice dans les litiges concernant les contrats de consommation. ça n'a pas plus au PLR, qui s'était retrouvé dans la minorité au parlement (et il aime pas ça, être minoritaire, le PLR). Et donc, le PLR a déposé un projet de loi pour abolir la gratuité et réinstaurer un accès payant aux procédures en lien avec des contrats (155 en 2017, dont la majorité ont été ouvertes par des sociétés de recouvrement). La Fédération romande des consommateurs avait salué la gratuité, et en défend le maintien, contre le PLR. Dont le président de la FRC Genève est député au Grand Conseil. Faudrait pas que cette double casquette finisse en litige, parce que là, la gratuité de l'accès à la justice ne serait pas assurée. Et puis, le genre PLR contre PLR, avec l'« affaire Maudet » et Jornot contre Maudet,  on est servis.

En juin dernier, le PS cantonal genevois refusait aux Conseillères administratives Sandrine Salerno (Ville de Genève) et Carole-Anne Kast (Onex) le droit d'ajouter à leur mandat municipal celui de députée au Grand Conseil. Les deux magistrates ont donc du choisir entre leur magistrature municipale (Carole-Anne Kast étant en outre président du PSG) et la députation cantonale. Et elles ont toutes les deux choisi de rester Conseillères administratives (Sandrine Salerno jusqu'en 2020, Carole-Anne Kast peut-être jusqu'en 2025). Mais  le PS d'Onex estime ainsi qu'en refusant à sa magistrate le droit d'être à la fois députée et Conseillère administrative, le parti cantonal n'a tenu compte ni de ses intérêts, ni de ceux de la section  et de la commune. On ne sait d'ailleurs pas vraiment de quoi il a tenu compte. On a beau chercher, on trouve pas. Doit bien y'avoir une raison, quand même... non ?

Deux étudiantes qui avaient dessiné à la craie un clitoris sur un trottoir du Jardin Anglais (à Genève, donc) avaient été condamnées à une amende de 100 balles. Le Conseil administratif de la Ville de Genève a décidé début août, comme deux conseillères municipales (une socialiste et une PLR) le lui avaient demandé, d'annuler cette amende, en estimant que la police municipale avait dans ce cas fait preuve d'un certain excès de zèle. Le Conseiller administratif Rémy Pagani aussi évoque un excès de zèle, et se demande si au lieu d'un clito les deux dessinatrices avaient crayonné une bite elles auraient été semblablement punie (on est prêts à parier que non), mais s'est opposé ce que l'amende soit annulée: « une fois délivrée, même pour de mauvaise raisons, une amende ne peut être retirée » autrement que par une décision de justice. On le savait pas si légaliste, Rémy. Le coup de l'amende qui ne peut pas être retirée quand elle a été délivrée, c'est beau comme du Hediger.

Selon les services de renseignement suisses, 93 djihadistes (dont une trentaine ont la nationalité suisse, dont une vingtaine sont binationaux) sont partis de Suisse pour faire le djihad, 32 sont morts et 16 sont rentrée en Suisse.  Le président de l'UDC, Albert Rösti, a eu une idée géniale : il propose que l'on retire la nationalité suisse aux djihadistes binationaux qui la détiennent et qu'on les enferme pour le restant de leurs jours dès leur retour en Suisse. Donc Rösti ne veut plus qu'ils soient suisses, mais veut quand même qu'ils restent pour toujours en Suisse. Y'a des fois, comme ça, où la logique udéciste laisse un peu pantois.

Dans son dernier édito de la «Tribune (encore) de Genève», son désormais ex-Rédacteur en chef, Pierre Ruetschi, lourdé par le groupe Tamedia, propriétaire du journal  se souvient : « depuis douze ans, j'occupe avec un bonheur certain la fonction de rédacteur en chef du plus grand quotidien de la deuxième ville de Suisse »... voui, mais bon, en même temps (comme dirait Macron), des quotidiens dans la« « deuxième ville de Suisse », y'en a plus que deux... A part nous, bien sûr.

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