Attaques contre les prestations sociales et surveillance de leurs bénéficiaires

Taper sur les plus faibles


Un peu partout, en Suisse comme ailleurs, les aides sociales sont dans le collimateur de gouvernants se réduisant eux-mêmes au rôle de gestionnaires de budgets, sans autre projet politique perceptible que celui de réduire les dépenses publiques -et, en priorité, celles de l'aide sociale. C'est ainsi qu'en juin dernier, au motif (ou au prétexte) de réserver l'aide sociale à ceux qui en ont vraiment besoin, quitte à créer une prestation complémentaire pour les autres (mais qui sont les autres ?), le Conseil d'Etat neuchâtelois propose de limiter les subsides cantonaux pour l'assurance-maladie, faute de pouvoir toucher aux prestations complémentaires à l'AVS et l'AI (qui sont de compétence fédérale). Il envisage donc de n'accorder de subsides à l'assurance-maladie qu'à celles et ceux qui reçoivent déjà une aide sociale (la moitié des 40'000 bénéficiaires de subsides). But de l'opération : repenser la politique d'aide sociale pour la rendre plus efficace ? Non : plus trivialement, faire des économies budgétaires de quelques millions. Une paille pour le budget de l'Etat, une poutre dans celui des gens.


La pauvreté, la misère et l'aide sociale


"Mon objectif est zéro jeune à l'aide sociale", déclarait (au "Courrier, le 21 juin) le  Conseiller d'Etat Thierry Apothéloz, en charge de la cohésion sociale et de la culture. Pour cela, il entend renforcer la formation et l'insertion professionnelle des jeunes. Si partielle que soit la cible (les "jeunes") et prudente l'ambition (le renforcement des dispositifs de formation) du Conseiller d'Etat, la démarche est, fondamentalement, juste : "je veux faire reculer l'aide sociale à Genève" -non la réduire, mais la faire reculer, autrement dit : en faire reculer le besoin. : "on joue les ambulanciers, il faut devenir des investisseurs sociaux". Car l'aide sociale ne réduit pas la pauvreté -pas plus celle des "jeunes" que celles des autres. Elle empêche seulement (mais cela seul la justifie) de passer de la pauvreté à la misère, de l'impossibilité de vivre selon les normes sociales dominantes à l'impossibilité de couvrir ses besoins essentiels : se nourrir, se loger, se vêtir, se soigner. Lui en demander plus, ou lui reprocher de ne pas réussir à éradiquer la pauvreté, c'est se tromper d'instrument : la réduction de la pauvreté passe par la redistribution fiscale, l'instauration de salaires minimums et de revenus minimums, l'aide à la formation et à la réinsertion professionnelle, l'aide sociale n'ayant pour fonction que de suppléer à leur absence ou leur insuffisance. Elle peut donc être réduite, mais à la condition que d'autres dispositifs interviennent pour lutter contre la pauvreté -et l'éradiquer, et que ces dispositifs soient coordonnés, de telle manière qu'on cesse d'additionner des dizaines d'allocations spécifiques, toutes conditionnelles et toutes insuffisantes. Et toutes accordées dans un climat de suspicion pesant sur leurs bénéficiaires, suspectés d'être de potentiels abuseurs : le parlement fédéral n'a-t-il pas adopté une loi permettant aux institutions sociales de suivre leurs allocataires soupçonnés de fraude, d'enregistrer leurs conversations, de les filmer dans (ou depuis) un lieu public, de faire faire ce travail par des détectives privés -et même d'utiliser des drones à cet effet ? Un référendum a été lancé contre une loi qui, comme la résume la Conseillère nationale verte Lisa Mazzone, "confère davantage de droits aux assureurs que n'en a la police pour traquer des terroristes".

On vote le 25 novembre : un NON à ce "Little Brother" s'impose : il sera aussi un "non" au mépris grandissant des potentats à l'égard de la plèbe.

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