Un ventre encore fécond...


Allègement de la pression migratoire, pas de la chasse aux migrants

La pression migratoire sur l'Europe (y compris la Suisse) s'est considérablement allégée : un nombre record de migrants débarquent en Espagne plutôt qu'en Italie (en bloquant une route, on ne fait qu'en ouvrir une autre, a constaté le ministre espagnol des Affaires Etrangères, Josep Borrell) : l'Italie ferme ses ports, les migrants passent par l'Espagne (qui, elle, ne les refuse pas -elle a accepté l'accostage du navire de sauvetage "Aquarius" et le débarquement de ses 630 passagers, à qui l'Italie avait fermé ses ports) et la route de l'Espagne vers les pays où ils veulent aller (l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Scandinavie) ne passe pas vers la Suisse.En 2017 déjà, le nombre de demandes d'asile déposées en Europe avait chuté de 44 % par rapport à 2016, et le recul se poursuit : à fin juillet, et depuis le début de l'année, le nombre de migrants arrivés par la mer (55'000) avait diminué de moitié par rapport à 2017 et des trois quarts par rapport à 2016, et les débarquements ont triplé en Espagne pendant qu'ils baissaient de 80 % en Italie. Cette année la Suisse a enregistré au premier semestre le nombre le plus bas de demande d'asile (7820) depuis 2010, et les garde-frontières ont enregistré un tiers de moins de séjours illégaux en Suisse. Et notre paradis sur terre n'est qu'en 11ème position dans le classement des pays destinataires de demandes d'asile. On se dit que ça devrait calmer nos xénophobes (et ceux des autres pays) ? Mais non, c'est trop d'optimisme : Pourquoi le feraient-ils, d'ailleurs ? Ceux qui les écoutent se foutent de la réalité...


Moins de migrants, moins de réfugiés, plus de xénophobes...

La crise économique a nourri l'hostilité générale contre les gouvernants (et d'une manière générale les "élites"), qui ont en effet été les grandes gagnantes de la crise et de la mondialisation, mais aussi les immigrés, qui, eux, n'y sont pour rien -mais font d'excellents bouc-émissaires : il y a moins de migrants, moins de réfugiés, mais plus de xénophobes (si on juge par la progression des partis d'extrême-droite dans toutes les élections au suffrage universel de ces dernières années en Europe). Ce qui, incidemment, confirme que la xénophobie n'est pas nourrie par le nombre ou la proportion de migrants, de réfugiés, d'étrangers, mais par la perception paranoïaque d'une menace qui peut être parfaitement fantasmatique. On le mesure d'ailleurs depuis longtemps en Suisse : les votes xénophobes sont plus forts dans les cantons où la population étrangère (native, résidente ou migrante) est la plus faible que dans les cantons où elle est la plus forte...

La migration est en baisse ? Peu importe aux deux conseillers fédéraux UDC, celui en charge de la Défense (Guy Parmelin) et celui en charge des Finances (Ueli Maurer) n'en démordaient pas : ils proposaient de fermer les frontières et d'y envoyer l'armée pour repousser les gueux en Italie. Et l'ancien président de l'UDC, Toni Brunner, proposait de son côté un moratoire sur l'asile en cas d'"afflux exceptionnel" (en ignorant délibérément que le droit international impose que toute personne sollicitant l'asile a droit à un examen équitable de sa demande) et invitait la Suisse à "suivre l'exemple de l'Autriche". D'avant ou d'après l'Anschluss ?  L'envoi de l'armée aux frontières ? Absurde, rétorquait le capitaine Pierre Maudet : "c'est quoi l'idée ? placer une recrue avec une armée chargée derrière chaque arbre à la frontière ?" (s'il y a encore des arbres et qu'on ne les a pas tous coupés pour faire un joli no man's land façon Verdun 1916). Et de proposer plutôt l'engagement de garde-frontières supplémentaires, "des professionnels formés à cette tâche". Seulement voilà : l'UDC et ses conseillers fédéraux veulent réduire le personnel de la Confédération, pas l'augmenter...

Quant à notre glorieuse armée elle s'est trouvée un ennemi. Plus le rouge de naguère, le basané d'aujourd'hui. Le métèque. Le réfugié. Il s'agissait de convaincre que "notre milice" peut servir à quelque chose : "Notre armée constitue notre ultime réserve. La milice devra faire ses preuves, sinon la question de savoir à quoi elle sert ne manquera pas de ressurgir". Pas seulement la question, la réponse aussi...


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