A Genève, la Ville et le canton ont un budget : "Well Done, old chap"...


Genève, terre de contrastes

Vendredi et samedi, successivement le canton et la Ville de Genève ont été dotés par leurs parlements respectifs d'un budget pour 2019. Situations contrastées et postures politiques contradictoires pour des résultats finalement assez semblables : le commentaire du "Temps" de samedi sur le budget cantonal vaut pour le budget municipal : "la sérénité au détriment des économies". Mais si c'est grâce à "Ensemble à Gauche" que le canton de Genève a un budget (refusé par le PLR, l'UDC et le PDC mais imposé par la gauche et le MCG), c'est malgré "Ensemble à Gauche" que la Ville en a un (accepté par tous les groupes sauf Ensemble à Gauche). Le canton a "le budget de la gauche", commente la "Tribune de Genève". La Ville a le budget de... euh... un budget dont la principale qualité, et la seule qui importait au fond à tout le monde, était d'être. Et d'éviter de faire appel au peuple pour rétablir un budget acceptable après que la droite ait bousillé le projet initial.


"Well Done, old chap"...

Finalement, c'est quoi, un budget ? Un bout du programme politique de qui le propose (un gouvernement, une Municipalité) et de qui l'adopte (un parlement, voire le peuple, qui l'a fait deux fois ces trois dernières années en Ville de Genève). Et pour le reste, un budget n'est rien d'autre qu'une autorisation de dépenses fondée sur des hypothèses de recettes. Or il n'est pas obligatoire de dépenser ce qu'on est autorisé à dépenser, et les hypothèses de recettes sont généralement d'une telle prudence que les recettes réelles les dépassent largement. Finalement, ce sont les comptes qui comptent. Et ceux de la Ville sont depuis plus de douze ans, année après année, bons à millions de bonis, ce qui devrait rendre l'épouvantail du déficit budgétaire fort peu dissuasif.

Au Grand Conseil, les amendements de la "gauche de la gauche", soutenus par les socialistes, les Verts... et le MCG, ont été repris par le Conseil d'Etat, prêt sinon à tout, du moins à beaucoup lâcher pour éviter de se retrouver sans budget (et plombé par l'"affaire Maudet") à la veille de devoir défendre des réformes fiscale (la RFFA), sociale (celle de la caisse de pension de l'Etat) et infrastructurelle (le Léman Express) décisives, a accepté d'assumer un budget créant 377 nouveaux postes dans la fonction publique, augmentant les charges de 3 % et réduisant le boni de plus de 200 millions en ajoutant 25 millions de dépenses à un budget de plus de 8,6 milliards (plus 757 millions d'investissements), salué par les socialistes comme étant "solidaire, responsable et nécessaire". La gauche de la gauche, à l'origine de ce résultat, n'en triomphe pas pour autant et déclare que ce budget reste mauvais (elle l'avait d'ailleurs refusé en commission des Finances), mais moins qu'un passage au système des "douzièmes provisionnels", défavorable à la fonction publique. Ben ouais, pas facile d'assumer le passage de feue la gauche révolutionnaire dans le pragmatisme social-démocrate... ?

En Ville de Genève, le lendemain, le budget a lui aussi été accepté (et peu importait qu'il fût celui de gauche, de droite ou de nulle part) -mais par une autre coalition, regroupant à peu près toutes les forces politiques... sauf précisément "Ensemble à Gauche". Il y a une semaine, la droite municipale genevoise tentait d'imposer sans négociation avec les syndicats et la commission du personnel une modification du statut du personnel de la Ville de Genève, pour lui permettre d'imposer lors du débat budgétaire une réduction de l'indexation salariale prévue par ce statut. Mais la droite s'était prise les pseudopodes dans un tapis qu'on avoue avoir un peu piégé et finalement, le Conseil municipal a voté une disposition qui, après révision par l'autorité cantonale de tutelle  dit à l'alinéa 1 qu'on ne peut pas réduire l'indexation du personnel sans l'accord du personnel et à l'alinéa 2 que le personnel pourra peut-être, si les comptes le permettent, recevoir une gratification supplémentaire : et c'est ainsi qu'une proposition du PLR qui aurait abouti à péjorer les droits du personnel aboutit à les renforcer. On s'attend donc à ce que le PLR reçoive ce message : "Well Done, old chap"...



Commentaires

Articles les plus consultés