Pour une caisse publique d'assurance-maladie et accidents


Faire un premier pas

Dans dix jours, à Genève, le peuple scellera le sort de l'initiative populaire lancée par le Parti du Travail pour la création d'une assurance maladie et accidents cantonale, publique et à but social, garantissant une couverture complète des soins contenus dans les prestations de l'assurance de base. La caisse serait un établissement public autonome. Le Conseil d'Etat et la majorité du Grand Conseil ont refusé l'initiative et ne lui opposent pas de contre-projet. Et ici, on appelle à soutenir l'initiative. Ne serait-ce que pour aider le Conseil d'Etat : en ce moment politique, c'est bien lui qui a le plus besoin d'une bonne assurance-maladie et accident publique. Toute la gauche ne soutient pas l'initiative ? Peu nous chaut : il est grand temps de dire "oui" à un premier pas vers un changement du système instauré par la LAMal : lui aussi a besoin de soins.


Les caisses sont privées, mais leurs caisses sont remplies par l'Etat...

Il devient de plus en plus difficile de nier l'évidence que le système d'assurance-maladie fondé sur la LAMal, avec le pouvoir qu'il accorde aux caisses privées, n'a pas grand chose à voir avec une sécurité sociale digne de ce nom. Les primes augmentent chaque année (elles ont plus que doublé à Genève depuis que le système LAMal a été mis en place) sans que l'accès aux soins s'améliore, et leur montant devient insoutenable pour une part croissante de la population -ce qui oblige l'Etat à intervenir en accordant de plus en plus de subsides, voire à prendre en charge directement les primes impayées, pour que toute la population soit tout de même assurée -et cela a coûté 300 millions au canton en 2017, qui finissent dans les caisses des caisses, pendant quoi leurs réserves dépassent les 8 milliards de francs (la loi ne les oblige qu'à un peu plus de la moitié).
La création d'une caisse publique cantonale ne va certes pas remettre à elle seule en cause ce système -mais elle exprimera la possibilité de le changer, de faire autre chose que se résigner à l'abandon de l'ambition de doter la Suisse d'une véritable sécurité sociale face à la maladie et aux accidents. Une caisse publique serait une caisse parmi d'autres, privées celles-là, mais une caisse différente des autres. Soumise à la loi fédérale, elle pourra user des capacités que cette loi laisse, et que les compétences cantonales laissent, de fonctionner autrement, de manière plus transparente, à moindre coût (pas de lobbying, de publicité, de siège tape-à-l’œil, d'une chefferie salariée à des hauteurs vertigineuses). Elle serait indépendante des intérêts privés (ceux de la pharma, par exemple), pourrait être contrôlée par la Cour des comptes, être administrée par des organes dont des élus du peuple, voire des représentants des assurés, seraient membres et elle utiliserait les cotisations des assurés du canton pour couvrir les assurés du canton (les caisses privées peuvent transférer une partie de cet argent d'un canton à l'autre). Elle concentrerait les "mauvais risques", disent ses adversaires. Peut-être, et alors ? ce sont précisément eux qui ont le plus besoin d'une caisse-maladie, eux qui ont le plus besoin de la garantie de pouvoir être soignés. On ne créée pas une caisse-maladie pour les hommes jeunes bien portants...

Trois autres initiatives populaires ont été lancées pour tenter de réformer le système d'assurance-maladie : une initiative cantonale pour plafonner les primes d'assurance-maladie à 10 % du revenu, une initiative fédérale pour la liberté d'organisation des cantons et une autre pour l'indépendance du parlement à l'égard du lobby des caisses-maladies. On les soutient toutes les trois, et l'initiative du Parti du Travail s'inscrit, à son niveau, pleinement dans ce mouvement de réforme d'un système qui ne remplit pas son rôle, et qui, finalement, ne tient que par les subsides cantonaux accordés à une part croissante de la population pour lui permettre de payer ses primes. Les caisses sont privées, mais leurs caisses sont remplies par l'Etat : rien que pour cela, il se justifierait de soutenir l'initiative pour un e caisse cantonale publique.

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