Réforme cantonale de l'imposition des entreprises : Le "Oui, mais" du PS et notre "Non"...

On persiste et on signe : c'est NON à la RIE (cantonale)


La semaine dernière le PS genevois s'est prononcé en Assemblée générale sur la réforme cantonale de l'imposition des entreprises : il s'agissait de donner à son groupe au Grand Conseil un mandat de soutenir ou non le compromis passé en commission parlementaire. Et par une majorité de 52 voix contre 36, l'Assemblée générale a suivi les recommandations des majorités du comité directeur et du groupe parlementaire, des conseillers d'Etat et des magistrats municipaux : soutenir ledit compromis. Le débat au sein du parti n'est pas clos pour autant : c'est un mot d'ordre au groupe parlementaire qui a été donné, une sorte de "oui, mais", un mot d'ordre ne s'imposant qu'aux députés et ne valant que pour le compromis sorti de la commission parlementaire -si la droite revient si peu que ce soit sur son propre soutien au projet de la commission fiscale, le soutien du groupe socialiste deviendrait évidemment impossible (la droite n'en a d'ailleurs pas besoin pour faire passer son propre projet...). Et de toute façon, puisque vote populaire il y aura, une nouvelle assemblée générale devra y donner la recommandation du parti. Et rien ne garantit qu'elle soit la même que celui donné au groupe. Donc, ici, on persiste et on signe : c'est toujours NON à la RIE genevoise, comme on l'avait dit à la RIE fédérale et qu'on le dit à la RFFA fédérale...




Un compromis qui compromet




On peut reprendre en introduction de ce commentaire ce qui faisait la conclusion d'un commentaire précédent sur le même sujet : le PS genevois va faire campagne contre la réforme fédérale, la fameuse RFFA, contre laquelle un référendum lancé par la gauche (y compris le PS genevois) a abouti (on devrait voter en mai) -comment arrivera-t-il à expliquer qu'il dit "oui" à la RIE et "non" à la RFFA, oui à la traduction cantonale d'une réforme fiscale fédérale à laquelle il dit "non" ? en plaidant une légère schizophrénie, ou en ne faisant piteusement pas campagne ?




Le "paquet" cantonal que les députés socialistes s'apprêtent à voter a été ficelé d'une manière fort ressemblante à celle du ficelage du "paquet" fédéral (la RFFA) : pour faire passer une réforme fiscale, on lui accole une réforme sociale (en l'occurrence une augmentation des subsides d'assurance-maladie, formant contre-projet à une initiative de gauche plafonnant les primes à 10 % du revenu) à laquelle la gauche ne peut dire "non" -mais à laquelle elle ne peut, du moins au stade parlementaire, dire "oui" qu'en disant en même temps "oui" à la réforme fiscale. A défaut d'être très honnête, c'est assez malin. Mais les subsides d'assurance-maladie ne compensent en rien les pertes de ressources pour le canton et les communes, et donc n'affaiblissent en rien les menaces pesant sur leurs propres actions sociales. Cela le ficelage cantonal est tout de même moins serré que le ficelage fédéral : à moins de tordre la légalité, on ne pourra faire voter le peuple sur un projet additionnant, pour un seul "oui" et un seul "non", deux projets différents touchant deux champs politiques différents, de sorte que le PS pourra parfaitement recommander le "non" à la réforme fiscale tout en recommandant le "oui" à l'augmentation des subsides d'assurance-maladie.




Référendum il y aura, qu'il soit décidé par le Grand Conseil ou imposé par des citoyennes et des citoyens. Et on appellera à dire "non" à la réforme fiscale cantonale. Pour maintenir des prestations qu'elle menace, et qui ne sont pas des cadeaux, ni des privilèges, ni des aumônes, mais des droits. Il faut à ces droits des moyens. Et le "compromis" sur la réforme fiscale les compromet.




La Jeunesse socialiste genevoise dénonce, dans le soutien de l'Assemblée générale socialiste au "compromis" parlementaire, une "compromission et une rupture claire avec les valeurs du parti". Disons que si ce soutien devait perdurer au-delà du vote du Grand Conseil, on aurait en effet un PS fort compromis par son soutien à une réforme fiscale qui va lourdement peser sur les finances des communes, plus encore que sur celles du canton.


Le "non" à la réforme fiscale s'impose par la réduction qu'elle opérerait des ressources des collectivités publiques. Que le Grand Conseil réduise les ressources du canton, est une chose : il représente le canton. Mais il réduit du même coup les ressources des communes -or il ne représente pas les communes, à qui il impose une réduction de ressources à laquelle leurs citoyennes et citoyens ne peuvent s'opposer que lors du vote. Chaque réduction des ressources fiscales d'une commune met en cause les prestations qu'elle apporte à sa population -et dans le cas des plus grandes villes, à la population de toute son agglomération (chaque année, la Ville de Genève finance, outre les prestations accordées à ses propres résidents, pour près de 190 millions de francs de prestations dont bénéficient les résidents des autres communes genevoises, mais également du canton de Vaud et de la la France voisine). Les communes ne détiennent aucune des clefs de la fiscalité des personnes morales, et lorsque celle-ci est allégée par les cantons et la Confédération, les villes trinquent -et donc tous les bénéficiaires de leurs prestations trinquent. Or le "compromis" de la commission parlementaire entraîne tout de même au moins 186 millions de francs de pertes de ressources pour le canton et 46 millions pour les communes... la première année. Et plus encore pour les quatre années suivantes. Comment feront-elles pour assurer les prestations à leur population avec des ressources amoindries, alors que dans le même temps le canton entend les faire "passer à la caisse" pour contribuer au financement de ses propres responsabilités, et qui pire est, sans leur donner plus de compétences sur ce qu'elles seraient amenées à payer ?

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