Ecorating : le dire et le vote


Les belles promesses qui rendent les électeurs joyeux

Beauté des périodes électorales : les belles promesses qui rendent joyeux tombent sur les électeurs comme flotte à la mousson. Reste à en mesurer la crédibilité. C'est ce qu'ont fait les organisations de défense de l'environnement, qui ont publié leur "ecorating" pour le 2ème tout de l'élection du Conseil des Etats (elles l'avaient déjà fait pour le 1er tour). L'"écorating", c'est la "sensibilité environnementale" des candidats mesurée par leurs votes au parlement fédéral lorsqu'ils et elles y siègent, ou par leurs engagements quand elles ou ils n'y siègent pas (fautes d'actes, on se contente de promesses). Et ça donne quoi ? A Genève : C'est sans surprise : La verte Lisa Mazzone est la plus,,, verte avec 98,1 % de votes favorables à l'environnement; le socialiste Carlo Sommaruga fait presque aussi bien, avec 97,2 %. Et ensuite, c'est le trou : plus que 22,2 % de votes favorables à l'environnement chez le PLR Hiltpold. Et derrière le trou, le gouffre : plus que 3,8 % (d'inexplicables moments de faiblesse) pour l'udéciste Céline Amaudruz. Et la PDC Béatrice Hirsch, alors ? A s'en tenir à ses promesses électorales, elle serait à 92 % écocompatible. On comprend mieux pourquoi les partisans de l'alliance du PLR avec l'UDC tiennent à ce point à casser celle du PLR avec le PDC...


"Les exclus voient comment les inclus se protègent"

Le 22 septembre dernier, premier jour de l'automne et premier vendémiaire, jour de l'an républicain, une petite cérémonie était organisée dans le canton de Saint-Gall, en montagne, dans le massif du Pizol. Une cérémonie mortuaire : on rendait les derniers honneurs à un glacier, celui du Pizol précisément. Il venait, après s'être cassé en deux en 2018, puis en cinq en 2019, d'être rayé de la liste officielle des glaciers mesurés en Suisse. Il rejoint les 500 autres glaciers disparus dans notre pays depuis un siècle. Requiescat in pace. Chaude, la paix : ces glaciers ont fondu. Dans les mines du XIXe siècle, les mineurs descendaient une cage avec un canari. Quand le canari étouffait et crevait, c'était le signe d'une accumulation de grisou et d'un risque d'explosion. Nos glaciers sont nos canaris : leur extinction est un signe, un symptôme. Et on sait de quoi, même si le déni de réalité résiste -il a pour cela des moyens : le "climatoscepticisme" (on devrait d'ailleurs plutôt parler de "climatonégationnisme"), largement soutenu par le lobby pétrolier, dispose, selon une étude publiée en août par "Nature Communications", d'une couverture médiatique totalement disproportionnée à sa crédibilité scientifique, y compris dans des media réputés (ou supposés) sérieux. La réalité, c'est qu'on a dix ans, tout au plus, pour traduire en actes forts les engagements environnementaux pris -et ceux qui restent à prendre.  C'est la question centrale de la traduction en actes des convictions affirmées qui se pose, la question de cette volonté collective dont Nicolas Hulot constatait (dans "Le Temps" du 21 septembre) qu'elle faisait toujours défaut malgré "notre formidable supériorité technologique et nos énormes moyens financiers". Jacques Dubochet ne dit pas autre chose, dans le journal socialiste suisse (il est Conseiller municipal PS à Morges) : "En Suisse, nous avons toutes les cartes en main. (...) Les revendications sont réalistes et peuvent être concrétisées, parce que les décisions quand à ce que nous sommes disposés à faire nous appartiennent totalement". Mais le Nicolas Hulot constatait aussi que "nous vivons dans un monde où les exclus voient comment les inclus se protègent et vivent à leurs dépens". Les "inclus", Hulot en est.  Et la plupart d'entre nous aussi.

La bourgeoisie, fût-elle « verte » et « de gauche » ne se préoccupe de la dégradation de l’environnement que lorsqu’elle même en souffre. Si des infrastructures sanitaires ont été implantées dans les villes européennes, c’est que la merde, les ordures et les charognes à l’air libre produisaient des miasmes et des maux qui atteignaient aussi les puissants : tant que les misérables sont les seuls à en souffrir, on peut les laisser à leur soue. Jusqu'à ce que l'on s'aperçoive qu'on risque fort de s'y retrouver avec eux.

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