Remontées de remugles homophobes avant le vote du 9 février

Le déconovirus sévit

Il fallait s'y attendre et nous nous y attendions -sans pour autant nous y résigner : comme en d'autres occasions données par des scrutins nationaux se sont exprimées des détestations xénophobes, racistes, le scrutin de dimanche sur la fin de l'impunité des insultes homophobes suscite précisément l'expression hargneuse de l'homophobie. Le scrutin libère une homophobie sortie du même tonneau que le racisme. Derniers feux avant que le projet d'étendre la loi antiracisme à l'homophobie soit accepté ? On sait bien que le bas ventre restera fécond d'où nous sourd cette merde. Une raison de plus de voter "oui" (si ce n'est déjà fait), même en sachant que ce "oui" et cette loi ne feront que dire que désormais, la société dans laquelle couinent les homophobes n'accepte plus qu'ils sévissent publiquement -qu'ils le fassent entre eux, chez eux, cela les regarde. Qu'ils le fassent dans la presse et sur les rézosocios, cela regarde tout le monde. Comme contenir un virus qui nous viendrait de Chine regarde tout le monde.


Une loi peut lutter contre l'homophobie. Contre la connerie, une loi ne peut pas grand chose.

Si la proposition du parlement fédéral est acceptée dimanche, la norme antiracisme deviendra une norme anti-discrimination. On sait bien qu'une norme n'est pas une réalité, qu'elle ne fait que dire celle que l'on souhaite, sans pouvoir l'imposer.
On aimerait beaucoup que la loi puisse faire disparaître l'homophobie dans les poubelles de l'histoire, comme on aurait aimé que la loi antiracisme ait fait disparaître le racisme les mêmes poubelles. On sait bien que tel ne sera pas le cas. Dans sa contribution au débat ("Le Courrier" du 24 janvier), Franceline James s'interroge : "Ajouter les homosexuels aux juifs, aux étrangers, aux femmes que la loi se doit de protéger contre le racisme et l'exclusion, n'est-ce pas du même coup désigner implicitement d'autres catégories, non nommées, qu'on aurait dès lors paradoxalement le droit de dénigrer, de déshumaniser, sans encourir de sanctions ?". Et de fait, comme elle le rappelle, "les candidats ne manquent pas : Roms, requérants d'asile, SDF, marginaux de toutes sortes". Aucune statistique officielle ne recense encore les actes de violence, physique ou psychologique, à l'encontre des transgenres, parce qu'il elles sont transgenres. On sait cependant, parce qu'on le vérifie, qu'il s'agit d'une population à haut risque de suicides. Et l'initiative soumise au vote le 9 février ne prend pas en compte la transphobie dans sa demande de pénalisation de l'homophobie, quand elle se traduit par des discriminations ou des injures. Le champ de la lutte contre l'exclusion est vaste, en effet, l'homophobie, le racisme, la misogynie, la xénophobie (et on en passe) ont de multiples visages et "compartimenter la haine" serait plus qu'une "fausse bonne idée", une "vraie mauvaise idée" s'il s'agissait de cela. Mais en soutenant l'extension à l'homophobie de la loi antiraciste, on ne fait précisément qu'entamer cette extension, non la clore. Pourrait-on d'ailleurs concevoir une loi faisant liste de toutes les discriminations à proscrire ? il nous en naît continuellement, plus qu'un processus législatif ne pourrait en digérer. Et ce n'est pas parce qu'on ne les proscrit pas toutes qu'il faut renoncer à en condamner quelques unes. C'est ce que fait la loi proposée au vote des Suisses et Suisses. Comme l'écrivent dans "Résistance" Céline et Sophia Misiego, on aimerait beaucoup que cette loi soit inutile. Mais elle ne l'est pas : l'homophobie tue sans que les homophobes aient, eux, à tuer. 


On peut aujourd'hui injurier tous les homos -tant qu'on n'en injurie pas un-e en particulier, on ne risque rien. On ne risque rien non plus à dire n'importe quoi : un certain Marc Früh, porte-parole de l'Union démocratique fédérale, un parti fondamentaliste protestant qui a lancé le référendum contre la loi anti homophobie, et appelle évidemment à voter"non", annonce carrément qu'on s'apprête, avec cette loi, à empêcher ses ouailles de condamner la pédophilie, la zoophilie,  et "d'autres orientations sexuelles réprouvées par la loi de Moïse". On peut rassurer ce brave homme, il ne risque rien : contrairement à ce qu'il affecte de craindre, nul pourra l'empêcher de continuer à citer pieusement les passages de la Bible promettant la peine de mort aux homosexuels (entre autres). 


La loi proposée au peuple veut lutter contre l'homophobie, comme elle veut déjà lutter contre le racisme. Elle n'envisage pas de lutter contre la connerie. Il y a des tâches surhumaines hors de portée de la loi humaine. Et même de celle de Moïse.

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