Achat de nouveaux avions de combat : Que faire d'utile avec 24 milliards ?
A en croire les derniers sondages publiés sur les votations fédérales du 27 septembre, les Suisses et les Suissesses accepteraient l'achat de nouveaux avions de combat (sans savoir quels avions acheter), avec d'assez fortes variations dans le soutien (et a contrario l'opposition) à la proposition entre Romandie et Alémanie, femmes et hommes, jeunes et vieux. La coronapandémie est certainement passée par là, avec ce qu'elle trimballe de désir de sécurité dans tous les domaines -celui-là comme dans les autres. Il nous reste un mois avant de faire mentir les sondages. En attendant quoi, on s'interroge : le virus vote-t-il ? Un avion de combat est-il de quelque utilité dans la lutte contre une pandémie ? Et après de nouveaux avions de combat, nous proposera-t-on l'achat de frégates pour patrouiller sur le Léman le Bodensee et le Ceresio ? Et avec les 24 milliards que coûteront finalement les nouveaux joujoux de notre Luftwaffe fédérale, n'aurait-on pas, en temps de crise sociale et sanitaire, quelque chose de plus utile à faire que se prendre pour une grande puissance aérienne ?
Faire oublier l'échec du "Gripen"
Le 27 septembre,
on vote sur le principe de l'achat de36 à 40 nouveaux
avions de combat pour l'armée suisse. Sur le principe, même
pas clairement sur le montant , et surtout pas sur le modèle
de nouveaux avions (le choix se fera après le vote, s'il est
favorable, entre le Rafale français, l'Eurofighter allemand,
le Super Hornet et le F-35A américains) . L'expérience
désastreuse de la tentative d'achat de nouveaux avions de
combat Saab "Gripen", refusée à 54 % par le peuple en 2014,
a été instructive, et le Conseil fédéral, soutenu par la
droite, va tenter de faire basculer dans son camp
aujourd'hui les trois composantes de l'électorat qui lui
avaient manqué hier (quand le coût de l'opération était de
trois milliards, et non de 8 comme prévu cette année) : les
femmes (qui avaient refusé les "Gripen" à 58 % des
suffrages, alors que les hommes les acceptaient à 53 %), les
Romands (tous les cantons romands avaient refusé, le Jura
avec même 74 % de "non") et les centristes, dont la moitié
de l'électorat avait refusé le projet. L'échec de 2014 a des
vertus pédagogiques : le Conseil fédéral et l'armée ont
appris de leurs erreurs et font aujourd'hui voter dans le
brouillard...
La Conseillère fédérale Viola Amherd affirme
qu'il n'y a pas d'autre solution pour assurer la surveillance,
la protection et la défense de l'espace aérien suisse qu'acheter
de nouveaux avions de combat. Pas question donc d'entrer en
matière sur la proposition socialiste d'acheter plutôt des
avions plus légers, plus maniables et moins chers... Pas
question non plus de prolonger la durée d'utilisation des F/A-18
(dont le peuple avait accepté l'achat en 1993), modernisés en
2008 pour 400 millions, devant être mis à niveau pour 450
millions d'ici l'an prochain, et opérationnels en tout cas
jusqu'en 2035... La Suisse, en tout cas, dispose de trois plus
d'avions militaires qu'il ne lui est nécessaire pour une police
aérienne efficace : l'Autriche, par exemple, se contente de
quinze avions de chasse... Des ploucs, ces Autrichiens.
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