Genève : pusillanimités budgétaires en temps de crise
Et les urgences, bordel ?
Le Conseil d'Etat genevois a présenté son projet
        de budget 2021 : il prévoit un déficit de 501,3 millions. Et les
        comptes 2020 pourraient se solder par un déficit de 1,2
        milliards. Pour contenir le déficit prévu en 2021, le
        gouvernement cantonal propose de ponctionner la fonction
        publique et les communes. Vieilles recettes, qui tiennent du
        réflexe pavlovien. Le Conseil
        administratif de la Ville, ou plutôt sa majorité, va présenter
        lui aussi un budget déficitaire. Mais prudent, ou pusillanime,
        il propose de faire tenir ce déficit dans les limites imposées
        par le canton (qui, lui, ne se les impose pas, fidèle en cela au
        vieux principe des baillis, "faites ce que je dis, pas ce que je
        fais"). Cette limite est d'un déficit de 49,3 millions. Elle
        peut certes être, "exceptionnellement" dépassée (or ne
        sommes-nous pas dans une situation rendue "exceptionnelle" par
        le Covid, s'ajoutant aux effets des réformes fiscales que nous
        combattîmes en vain ?), mais ce dépassement lui-même est soumis
        à l'accord du Bailli, et à l'exigence d'un "retour à
        l'équilibre" en quatre ou huit ans. Bon, et alors ? Ne
        pourrait-on plutôt tenir compte à la fois des exigences d'une
        réponse à la crise et des engagements pris de répondre aux
        urgences sociales et environnementales auxquelles la crise,
        précisément, ne fait que rendre les réponses plus urgentes, et
        plus exigeante leur cohérence, et plus exigeant leur financement
        ?
      
Il ne nous reste plus qu'à faire ce qu'on avait dit qu'on ferait
Dans deux campagnes électorales successives,
        celle des Nationales et celle, à Genève, des Municipales, nous
        (la gauche...) avons posé deux urgences : l'urgence
        environnementale et l'urgence sociale, et nous les avons posées
        avec la même force, comme indissociables l'une de l'autre. Et
        nous avons été élues et élus pour les relever toutes deux. Poser des urgences, cela signifie que ce qu'elles
        expriment passe avant toute autre chose. Avant les règles
        budgétaires et de gestion de la dette...
        Les poser ensemble, indissociables, cela signifie qu'il n'y en a
        pas une qui prenne le pas sur l'autre, une qui soit plus urgente
        que l'autre. La justice sociale est une condition de la
            transition énergétique : vouloir relever
        l'urgence environnementales sans tenir compte de l'urgence
        sociale, cela produit les "gilets jaunes" -ce sont les plus
        pauvres, et les moins riches, qui subissent le plus durement la
        dégradation de l'environnement et ont le moins de moyens de s'en
        échapper.  Relever l'urgence sociale
        sans tenir compte de l'urgence environnementale, cela produit
        des centrales à charbon. Et balancer des
        dizaines de milliards dans une "relance" sans autre ambition que
        le retour au temps de l'avant-covid, ce n'est répondre ni à
        l'urgence sociale, ni à l'urgence environnementale. 
    
Ce que commandent les urgences que nous avons
        assuré de prendre en compte, et auxquelles nous avons assuré de
        répondre, devrait convaincre l'exécutif de la Ville, comme
        d'ailleurs celui du canton, de privilégier ces réponses aux
        cadres budgétaires établis pour les temps de beau temps... Nous
        ne sommes de toute évidence pas en de tels temps : contre la
        crise sociale, la Ville a besoin de mobiliser toutes les
        ressources disponibles, et d'en trouver de nouvelles -une
        augmentation du centime additionnel à l'impôt direct, par
        exemple : elle serait sans doute combattue par la droite, et par
        référendum, mais cela donnerait au peuple le pouvoir de décider,
        de choisir entre le respect des normes comptables et celui des
        engagements sociaux et environnementaux. Et cela, en outre, rappellerait la fonction que la gauche assigne à l'impôt (et qui est rappelée dans l'initiative "Zero Pertes").
        
La Ville comme le canton doivent, urgemment,
        consacrer un maximum de ressources dans ces engagements -dans
        des réponses aux crises sociale et environnementale qui aillent
        au-delà des réponses urgentes à des urgences incontournables. Ce
        qu'on ne fait pas aujourd'hui, au moment de décider des budgets
        de la République et de la Commune, quand la situation l'exige,
        on sera sans nul doute incapable de le faire demain -et même si
        on se révélait capable de le faire demain, cela nous coûterait
        plus cher que si on le faisait aujourd'hui : le temps qui passe
        renchérit le coût des actions nécessaires. 
      
Ce que nous écrivons ici, les magistrats
        communaux socialistes genevois* l'avaient déjà dit en juin
        dernier, en lançant ensemble un appel  aux autorités cantonales
        à renoncer à toute politique d'austérité au profit d'un soutien
        à l'économie locale, la transition écologique et la solidarité
        avec les plus précaires. On se plaît à attendre que nos
        magistrats communaux soient prêts à faire ce qu'ils peuvent
        faire, ce que les lois les autorisent à faire (on ne leur
        demandera pas tout de suite de passer dans l'illégalité...) et
        ce qu'ils demandent à leurs homologues cantonaux de faire : "défendre des budgets responsables, solidaires et à
          la hauteur de l’effort public nécessaire à enrayer la crise"(on trouvera le texte intégral de cet appel sur https://lecourrier.ch/2020/06/26/sortir-du-frein-a-lendettement/)
        
*Guylaine Antille, Jean-Luc
          Boesiger, Skander Chahlaoui, Ornella Enhas, Elisabeth
          Gabus-Thorens, Sami Kanaan, Carole-Anne Kast, Christina
          Kitsos, Stéphanie Lammar, Nathalie Leuenberger, Salima Moyard,
          Michel Pomatto, Martin Staub.
        
Comme avait accoutumé de dire notre vieux
          camarade Pierre Losio (et redit notre jeune camarade Christina
          Kitsos...), il ne nous reste plus qu'à faire ce qu'on avait
          dit qu'on ferait... Ne sommes-nous pas élus pour cela ? 
      



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