Fonds de tiroir

 

La «Tribune de Genève» d'hier nous apprend que le Conseiller national UDC valaisan Jean-Luc Addor, condamné en 2017 (à 18'000 francs en jours-amende avec sursis, le paiement des frais de justice et une amende de 3000 francs) pour violation de la norme pénale antiraciste (autrement dit : condamné pour racisme) après avoir exulté sur les réseaux sociaux en apprenant une fusillade mortelle devant une mosquée saint-galloise («on en redemande !»), puis tenté de convaincre que c'était de l'humour, est toujours soutenu par l'UDC du Valais romand. Après sa condamna-tion, le PS lui suggérait de démis-sionner, et observe aujourd'hui, après que la condamnation ait été confirmée par le Tribunal fédéral, que puisqu'il ne prend «pas ses respon-sabilités (...) c'est le rôle de son parti de le faire». Faut pas rêver, camarades : l'UDC valaisanne ne demandera pas la démission de celui dont le Tribunal fédéral estime qu'il a «franchi la limi-te au-delà de laquelle un discours politique dégénère en un appel à la haine», dans un message qui témoigne de «la réjouissance de son auteur face à un événement homicide et une invi-tation adressée au lecteur à se réjouir aussi de la perspective qu'un tel homicide pût se renouveler». Et de l'acquiescement de son parti à ces réjouissances ?

On doit à Guy-Olivier Segond «la dernière hausse d'impôt -des centimes additionnels pour financer les soins à domicile- connue à Genève», nous rappelle «Le Courrier»... On va décidé-ment beaucoup le regretter, GOS...

Avis de décès politique : nous avons la douleur (mesurée) de vous faire-part du décès dimanche du Parti Bourgeois Démocratique (PBD), né de l'aile agrarienne et antiblochérienne de l'UDC en 2007, mais qui après des débuts prometteurs n'a cessé de décliner et ne représentait plus que 2,4% des suffrages lors de la dernière élection du Conseil National. Resquiescat in Pace. C'est-à-dire au PDC, qu'il re-joint dans «Le Centre». Mais le centre de quoi ? Mystère...

La SSR (société faîtière des radios et télés publiques suisses) a indiqué le 16 novembre avoir mandaté trois enquêtes distinctes pour faire toute la lumière sur les cas de harcèlement, sexuel et professionnel, dans sa chaîne suisse-romande, la RTS, cas mettant en cause au moins trois personnes, dont l'ex-présentateur du journal télévisé, Darius Rochebin. Le résultat des enquêtes devrait être communiqué au personnel en février 2021. Les enquêtes seront menées par des mandataires choisis en commun par la SSR et le Syndicat des mass media (SSM) : le cabinet d'avocats genevois Troillet Meier Raetzo, spécialistes du droit du travail, enquêtera sur les accusations de comportements déplacés, l'ancienne présidente du Tribunal cantonal vaudois Muriel Epard et l'ancien président de la Cour des Comptes genevoise Stanislas Zuin enquêteront sur les responsabilités au sein de la hiérarchie de la RTS, et la SSR elle-même, à l'interne, auditera les instruments dont dispose l'entreprise publique pour protéger l'intégrité personnelle de ses employeurs. Et le directeur de la RTS, Pascal Crittin, d'assurer que «les situations inacceptables décrites récemment récemment dans la presse ne sont pas la norme à la RTS». Reste juste à vérifier que tel est bien le cas.  Tout ça est fort bien et fort utile, même si un avocat, genevois aussi, forcément (quoi qu'il se passe dans ce pays, y'a toujours un avocat genevois quelque part : à Piogre, on en surproduit -comme des psychiatres, d'ailleurs) a écrit au Conseil fédéral pour exprimer son inquiétude que, les mandatés par la SSR étant tenus par le secret professionnel, y'a un risque que l'«affaire» reste nimbée d'obscurité. Comme si c'était le genre de la maison d'étouffer les affaires gênantes et de ne pas sanctionner les primates aux comportements préhominiens, mais de leur offrir de jolis placards dorés pour les éloigner de leurs victimes.

Omniprésente dans la campagne contre l'initiative pour des entreprises responsables, la verte libérale vaudoise Isabelle Chevalley avait carrément invité un ministre africain à Berne, le Burkinabé Harouna Kaboré, ministre du Commerce. On se demandait pour-quoi ce ministre-là, de ce régime-là. On ne se le demande plus : Isabelle Chevalley détient un passeport diplomatique burkinabé et est conseillère officielle du président de l'Assemblée nationale burkinabé. Alors que la loi fédérale sur le parlement interdit aux membres du Conseil national et du Conseil des Etats d'exercer une fonction offi-cielle pour un Etat étranger. Mais bon, explique Isabelle Chevalley, c'est pas une fonction officielle, c'est juste du copinage, une «marque d'amitié». Et puis, qui en Suisse a peur d'une ingérence du Burkina Faso, hein ? Déjà qu'on doit pas être très nombreux dans ce pays à savoir où c'est, le Burkina... alors finalement, pour une libérale même légèrement teintée en vert, voyager avec un passeport diplomatique burkinabé, conseiller le président de l'Assemblée burkinabé, convoquer un ministre burkinabé, ça passe quand même pas trop mal en Suisse depuis l'assassinat de Thomas Sankara...

Depuis quelques jours, dans le canton de Berne, un jeune homme de 24 ans se retrouve face à la justice pour avoir, en 2017, à Suberg, dans le Seeland, tué son père et sa mère à coups de haltères après les avoir balancés dans l'escalier de la cave. On savait que la fréquentation des salles de musclu était dangereuse pour la santé mentale des usagers, mais à ce point, quand même, on s'en doutait pas.

Donc, notre ami Pierre Maudet, qui après avoir été privé de toute responsabilité par ses collègues du Conseil d'Etat, puis avoir annoncé sa démission (avec effet en mars prochain) et sa candidature à sa propre succession, avait fièrement proclamé que, s'en remettant au jugement politique du peuple, il renonçait a en appeler à la justice («la justice a ses limites et doit rester dans ces limites»), a finalement décidé précisément de la saisir pour faire annuler son éviction. Son avocate, Yaël Hayat, a par ailleurs écrit au Conseil d'Etat (dont Maudet reste membre jusqu'en mars...) pour exiger la réintégration du pestiféré dans ses responsabilités (qui avaient déjà été passablement réduites), et la révocation de l'enquêtrice externe mandatée par le Conseil d'Etat pour faire rapport sur la situation dans le seul service que les collègues l'ex-prodige de la politique genevoise lui avaient concédé la tutelle. «L'heure n'est pas aux combats judiciaires» déclarait Maudet il y a quelques semaines, mais le temps passe et l'heure, apparemment est venue. A quoi servent les procédures lancées ? très probablement à rien, sauf à l'essentiel : faire parler de celui qui les lance. Eh ouais, des combats judiciaires, même perdus d'avance, peuvent aussi, ou surtout, être des combats politiques.

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