Fonds de tiroir

 La première volée de «bons solidaires» proposés par la Ville de Genève pour aider les commerces locaux frappés par la crise (une seconde volée a été lancée, et élargie à de nouveaux commerces) a été un succès : plus de 64'000 bons ont été vendus, dont plus de 8100 libellés en lémans. Qui a été le premier bénéficiaire de cette aide aux commerces ? Un petit commerce local, donc : Manor. Dont le siège est à Bâle et qui a bénéficié d'un quart des bons vendus. Et alors ? Quand on est la capitale mondiale du monde mondial, on chipote pas sur les détails. 

Comme on sait, la chasse genevoise aux mendiants a été contestée par la Cour européenne des droits de l'Homme, ce qui devrait inciter Genève à y mettre fin (mais nos zautorités n'y semblent pas prêtes). Reste que Genève n'est pas seule à se livrer à la persécution admi-nistrative (et coûteuse) des pauvres qui tendent la main (les pauvres, ça sait pas se tenir) Le canton de Vaud aussi s'y livre. Or les conclusions de la cour de Strasbourg dans l'arrêt rendu concernant le cas genevois s'appliquent aussi à la pratique vaudoise. Mais les autorités vaudoises y font une oreille aussi sourde que les autorités genevoises : on ne changera rien, ou presque. On observe donc une incontestabkle cohérence lémanique. Pour justifier une pratique beaucoup plus contestable. Minable, même.

La gauche, ton univers pitoyable : à Lausanne, les Verts font cavalier seul aux Municipales et présentent trois candidat.e.s à l'Exécutif de sept membres (actuellement 3 socialistes, deux Verts et un POP) , faisant courir à la gauche le risque de perdre un siège (celui du POP, allié aux socialistes) au profit du PLR (qui ne détient actuellement qu'un seul siège et présente deux candidat.e.s). A Genève, c'est à la gauche de la gauche que ça couine : une «lettre ouverte aux électeurs-trices d'Ensemble à Gauche» tire à vue et en rafales sur la décision de ce qui reste de la coalition de ne présenter aucune candidature à l'élection partielle au Conseil d'Etat, provoquée par la démission-candidature de Pierre Maudet. Signée par une centaine de partisanes et partisans de la refondation d'Ensemble à Gauche sous forme d'un «grand parti populaire de la gauche radicale» dont la majorité de la population genevoise est supposée avoir besoin, la lettre ouverte dénonce la «faute politique majeure» que constituerait la «défection», voire la «désertion» d'EàG dans l'élection complémentaire, et assurent que cette absence dans la «bataille politique qui s'annonce» est «incompréhensible». Presque aussi «incompréhensible» que l'oubli soigneusement cultivé par la lettre ouverte que même si EàG n'a présenté aucune candidature, une autre formation de la «gauche de la gauche», le Parti du Travail, en a, elle, présentée une, et a donc fait exactement ce que la «lettre ouverte» reproche à EàG de ne pas avoir fait : le Parti du Travail présente en effet celle de l'ancien Conseiller municipal de la Ville de Genève Morten Gisselbaek. Passé, certes, de solidaritéS au Parti du Travail, mais siégeant tout de même au sein du groupe d'Ensemble à Gauche. Ce qui de toute évidence ne suffit pas aux signataires de la lettre ouverte pour le soutenir en tant que représentant de la «gauche combattive», désormais réduite au auteurs de la lettre.  Quant à la candidature de la Verte Fabienne Fischer, soutenue par le PS, il n'en est fait mention que pour la dénoncer comme une candidature social-traîtresse de l'«aile gauche de l'Union sacrée» des partis gouvernementaux. Bref, entre les déserteurs d'EàG, les sociaux-traîtres Verts et socialistes et les innommables du Parti du Travail, on comprend mieux que nos derniers résistants considèrent qu'«au bout de ce chemin de repli et d’accommodement avec le programme des dominants, il y a la disparition programmée d’EàG du parlement cantonal au printemps 2023». Mais bon, c'est pas grave, y'a un «grand parti populaire de la gauche radicale» en gestation. Euh... ça dure combien de temps, la gestion d'un grand machinchose ? Longtemps : on en entend causer depuis cinquante ans, de ce truc. Depuis que la LMR s'est transformée en Parti socialiste ouvrier, puis le PSO en SolidaritéS, inclue ensuite dans l'Alliance de Gauche, puis dans A Gauche Toute ! puis dans Ensemble à Gauche, en attendant on ne sait pas trop quoi. Mais on attendant quand même. La patience est une vertu révolutionnaire, comme disait le Grand Timonier. La résignation aussi ?

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