Brèves Troubles
Après le rapport français de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise (catholique romaine), qui a révélé que 330'000 personnes avaient été victimes de religieux ou de laïcs entre 1950 et 2020 en France, on a rappelé qu'en Suisse aussi, une étude «à grande échelle» (d'incendie ?) allait être lancée (encore cet automne, en principe), à l'initiative de la Conférence des Evêques. Et on doute qu'elle puisse aboutir à d'autres conclusions que l'étude française : si la grande majorité des violences sexuelles sur mineurs ont été perpétrées dans le cadre familial ou amical, «il en a été commis dans le cadre de l'Eglise catholique significativement plus que dans les autres sphères de socialisation», et que cela s'explique par le fait que «les deux institutions qui fonctionnent sur un modèle patriarcal» (la famille et l'Eglise, donc) «favorisent l'exposition des personnes socialement dominées que sont les femmes et les enfants aux violences masculines». Ouala. On attend donc la fin du patriarcat pour en finir avec les abus sexuels sur des enfants, comme on attendait la fin du capitalisme pour en finir avec l'oppression des femmes, ou on essaie de, sinon les abolir, du moins les réduire et les sanctionner avant ? Zavez une heure pour répondre et argumenter votre réponse.
Le parlement genevois a pris acte du rapport de
sa Commission de contrôle de gestion sur les
dysfonctionnements de l'Office cantonal de la population et
des migrations. Seul le MCG s'y est opposée, pour défendre
«son» Conseiller d'Etat, Mauro Poggia, ministre de tutelle de
l'Office. Mais tous les problèmes évoqués par le rapport, qui
porte sur la période mai 2020-mars 2021 restent à régler
(retards dans le traitement des dossiers, engagement excessif
de personnel auxiliaire, rotation rapide du personnel, manque
de formation et d'encadrement des employés, interventions et
pressions extérieures d'avocats, de députés, de Conseillers
d'Etat pour accélérer le traitement de dossiers, etc...) avec
un problème particulier en sus : celui de la liberté de parole
des fonctionnaires audi-tionnés par une commission
parle-mentaire mais, selon la commission, «exhortés par leurs
responsable de ne pas dire toute la vérité». Et «rien que la
vérité», au moins, ils peuvent ?
Un conflit majeur s'annonce, dans le GHI du 6 octobre. D'ampleur si menaçante qu'elle en devient apocalyptique : «Ecriture inclusive, la contre-attaque s'organise», titre l'hebdo gratuit. Diable... ça va être Verdun ou Stalingrad. Au moins. La Section suisse de «Défense de la langue française» et une escouade d'élus et d'élues PLR cantonaux, municipaux et fédéraux se mobi.-lisent contre l'«orthographe recti-fiée» et l'«écriture inclusive» et épicène. Une pétition est lancée, une initiative est en préparation. La guerre des mots est déclarée et ça va être saignant. D'autant que les croisés anti-réforme n'hésitent pas à faire appel à l'étranger -à la France: «l'Académie française (est la) seule institution légitime à fixer les canons de la langue de Molière», proclame haut et fort Simone de Montmollin, cosignataire d'une motion au Conseil national sur le «respect des règles de la langue française», telles que définies par une académie étrangère (dont Molière n'a jamais été membre), en un temps où les Français ne forment plus qu'une minorité des locuteurs du français... Mais bon, on mène les combats qu'on mérite, hein...
La Commission fédérale contre le racisme s'est
penchée, dans son magazine, sur le complotisme, et elle a bien
fait, puisque «certaines théories du complot et fausses
nouvelles s'attaquent à des populations déterminées avec des
intentions racistes», résume (avec un bon usage de
l'euphémisme) la présidente de la commission, Martine
Brunschwig Graf. Qui ajoute que si ces théories ont pris une
vigueur particulière pendant la pandémie, une fois celle-ci
passée, des traces des stéréotypes racistes trimballés par le
complotisme subsisteront, à long terme. D'autant qu'elles
contaminent bien plus de monde qu'on pourrait le croire : en
2018, une enquête suggérait que 35% des adultes adhéraient à
un récit complotiste, 27 % dans une enquête de 2021. La
plupart de ces paranos ne bénéficieraient que d'un bas niveau
de formation, mais un sur cinq d'un niveau supérieur. Ce qui
ne fait après tout que confirmer qu'on peut être cultivé et
con. Et puis, c'est pratique, et efficace, le complotisme,
parce que c'est simple : à tous les maux, toutes les
injustices, il y a une cause unique, et cette cause est un
groupe humain, ou une alliance de groupes humains. ça empêche
évidemment d'analyser les situations dont on se plaint, mais
c'est pas grave, ça soulage. Et puis une fois désignés les
coupables, on n'a plus rien à faire qu'à attendre que d'autres
les éliminent. Après quoi, on dira qu'on n'y était pour rien.
Et qu'il n'y a pas eu d'élimination, que c'est rien que des
menteries. Reposant, non ?
On sait, ou devrait savoir, qu'à Genève, un
conflit politique se dessine autour des projets de
municipalisation du secteur de la petite enfance (crèches,
garderies, jardins d'enfants etc...), actuellement très
largement organisé sur un mode associatif. Quelques événements
récents illustrent l'obso-lescence de ce mode d'organisation :
ainsi du conflit dans les crèches des Pâquis (le secteur de la
petite enfance étant lui même sectorisé, celui des
Pâquis-Carfagny regroupe cinq institutions, fréquentées par
310 enfants de moins de quatre ans. ), où régnerait, selon une
enquête de la «Tribune de Genève», une «ambiance toxique»
faite de «souffrance au travail», de management
«autori-taire», de dé-missions massives (plus de 50
éducatrices et éducateurs ont dé-missionné, sur 102 postes
fixes), de sous-effectifs du personnel et de réduction de son
travail à du «gardiennage». Les employés ont sollicité le
service d'autorisation et de surveillance de l'accueil de
jour, le Sasaj, qui a également été sollicité par le syndicat
SIT, et a lancé un «suivi global» toujours en cours. Le
personnel à en outre sollicité l'Ins-pection du Travail, sans
effet. Et la Ville ? Elle a été informée de la situation, mais
ne peut pas faire grand chose, puisque même si c'est elle qui
paie (elle subventionne à 80 % le budget de institutions),
elle ne dispose d'aucun pouvoir sur le management et la
«gestion des ressources humaines». D'où le projet de
municipalisation, mais qui ne concerne encore que les
nouvelles crèches, parce qu'aucune majorité ne se dessine au
Conseil municipal de la Ville (contrairement à Lancy) pour une
véritable municipalisation. Que des situations comme celle des
crèches des Pâquis rendent pourtant urgente. A condition de
bien vouloir en tirer les enseignements qui s'imposent -une
simple affaire de bonne ou mauvaise volonté politique, en
somme...
Dans quelques jours se tiendra à Genève une
vente aux enchères de pièces de monnaies genevoises. Dont la
plus ancienne remonte au VIe siècle : un tiers de sou. Prix de
basse : 20'000 balles. Gardez précieusement vos pièces jaunes,
les gens, dans 1500 ans, vos descendants (si l'humanité tient
jusque là) s'en feront des couilles en or. S'ils ont encore
des couilles.
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