Genève : Une initiative populaire pour alléger les frais dentaires

Les dents de l'amer

Les dents de l'amer : L'assurance-maladie de base ne rembourse pas les soins dentaires, qui peuvent être considérables : au total, en Suisse, ils se montaient en 2020 à près de 4.2 milliards de francs, soit environ 5% des coûts totaux de la santé, et à une moyenne de près de 500 francs par habitant-e et par an..une absurdité de plus dans le système de la LAMAL. quand 6 à 20 % de la population renonce à des soins dentaires faute de pouvoir les assumer financièrement (puisqu'ils sont assumés à 90 % par les ménages), que plus de 40 % des élèves du primaire souffrent de lésions dentaires, que plus de 110'000 ont requis des soins dentaires en 2020-21, que les enfants des familles les moins argentées sont deux fois plus concernés que les autres, que la permanence dentaire de la Croix-Rouge ne désemplit pas.
Le Parti socialiste a lancé une initiative législative cantonale proposant la création d'un "chèque dentaire" de 300 francs par an valable dans tous les cabinets dentaires du canton, offert à toute personne au bénéfice de subsides maladie -sauf celles dont les frais dentaires sont pris en charge par l'Hospice général ou les prestations complémentaires AVS/AI. Si toutes acceptaient cette offre (elles sont 126'000 dans le canton), il en coûterait 45 millions de francs au canton en comptant le coût des mesures de prévention que l'initiative propose également, avec la nomination d'un "dentiste cantonal" (comme il y a déjà un Médecin cantonal) chargé de les superviser. C'est trop, 45 millions ?
ce n'est, en gros, que 0,5 % du budget cantonal, ce peut être financé par une taxe sur les produits nuisibles à la dentition, et c'est un coût qui n'est atteint que si tous les bénéficiaires potentiels du "chèque dentaire" le réclament. C'est trop peu, 300 francs par an (le montant du chèque) ? c'est 60 % des dépenses dentaires moyennes de chaque habitant de notre pays.C'est trop prudent, comme proposition ? Ce n'est pas le terme d'un programme, seulement une étape. Alors, franchissons-là !

On télécharge les feuilles de signature ici : https://www.fichier-pdf.fr/2022/11/08/feuille-de-signaturesoins-dentaires/


Les soins dentaires, un enjeu de santé publique et de justice sociale

Le PS genevois a renoncé, du moins pour l'instant, à relancer une initiative pour la création d'une assurance-dentaire obligatoire. Non qu'il y soit opposé (il avait soutenu celle du Parti du Travail), mais parce que toutes les initiatives lancées sur cette revendication ont échoué devant le peuple, dans le canton de Vaud en 2018, à Genève en 2019, à Neuchâtel il y a deux mois, et qu'un temps d'inflation et de vie chère n'est pas le meilleur pour proposer une charge supplémentaire sur le revenu des salariés (une telle assurance serait en effet financée paritairement par les employeurs et les salariés). Le "chèque dentaire" est une réponse à une urgence, pas aux faiblesses structurelles du système d'assurance-maladie dans notre pays prospère et pingre. Prospère parce que pingre ou pingre parce que prospère ? Peu importe : prospère, il a les moyens de construire une véritable protection sociale, pingre il ne le fait pas. Il faudra donc revenir devant le peuple avec un projet plus ambitieux que celui d'une réponse à l'urgence, et on le fera -mais il faut d'abord répondre à une urgence un véritable enjeu de santé publique -d'où, aussi, le contenu préventif de l'initiative socialiste : l'impossibilité d'assumer le coût de soins dentaires que la faiblesse de la prévention dans ce domaine rend trop souvent nécessaires a des conséquences parfois dramatique sur la santé des personnes qui y sont confrontées : pas traitées à temps, les affections bucco-dentaires peuvent dégénérer, à partir d'inflammations ou d'infections,en maladies cardio-vasculaires, infections respiratoires, diabète...

L'OMS définit depuis 1946 la santé comme "un état de complet bien-être physique, mental et social, (qui) ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité". La santé dentaire est, évidemment, constitutive de cet état de bien-être (il faudrait n'avoir jamais subi une rage de dent pour le nier...), mais c'est un état inatteignable pour nombre de ménages à bas revenus qui  choisissent, pour réduire leurs primes d'assurance-maladie, de renoncer à toute assurance complémentaire pourvant couvrir au moins une partie de leurs dépenses de soins dentaires. Et lorsque ces soins leurs sont nécessaires, elles hésitent à se rendre chez le médecin, ne s'y rendent que tardivement ou renoncent carrément à s'y rendre, et se soignent au dafalgan ou au clou de girofle.

En aidant financièrement les personnes qui en ont besoin (et elles seules) et en les encourageant à aller régulièrement chez le dentiste ou l’hygiéniste, mais aussi en mettant en place une véritable politique de prévention, l'initiative socialiste contribue à ce que l'on considère enfin les soins dentaires soient enfin considérés comme un enjeu, et un enjeu prioritaire, de santé publique et de justice sociale à Genève. Il serait temps.

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