Dumping salarial dans la secteur de la petite enfance : le référendum aboutit

Non à une "attaque méprisante"

La majorité de droite (du Centre au MCG en passant par le PLR et l'UDC) du parlement genevois s'en était prise fin juin aux conditions de travail et de salaire dans le secteur de la petite enfance : l'autorisation d'exploiter une crèche non municipalisée et non signataire d'une convention collective de travail ne serait plus conditionnée au respect du salaire minimum établi par les usages de la branche, c'est-à-dire, concrètement, par la convention collective signée par la Ville de Genève, mais au respect de n'importe quel salaire minimum établi par une autre convention collective, ou du statut du personnel d'une collectivité publique, ou du salaire minimum légal (24 francs de l'heure). Or l'usage de la Ville de Genève prévoit pour le personnel de la petite enfance des salaires supérieurs à tous ceux prévus par ces autres textes.  La gauche et les syndicats ont lancé un référendum contre cette incitation au dumping salarial et le référendum a largement abouti, avec près de 11'000 signatures. On votera donc, et on votera NON à "cette attaque méprisante envers le travail des professionnels des crèches, qui sont en majorité des femmes", comme la résume le syndicat SIT.

Quand la droite remet en évidence la municipalisation des crèches

Pour la droite genevoise, il s'agit de favoriser la création de crèches privées plutôt que publiques, pour répondre au manque de places (il manque 3200 places dans le canton pour satisfaire la demande, dont un millier de places en Ville, et la demande continue d'augmenter). Et pour favoriser la création de crèches privées, il faut leur permettre de moins bien payer leur personnel que les crèches publiques alignées sur l'usage de la Ville, ce que l'auteure du projet de la droite, la PLR Barbier-Muller considère comme une "ingérence dans le marché". Un marché dont la marchandise sont les enfants... Pourtant, la Convention collective de la Ville, négociée avec le partenaire social (les syndicats) ne prévoit pas des salaires délirants : 35,75 francs de l'heure pour une éducatrice, 29 francs 20 pour une assistante socio-éducative, 31 francs 85 pour les auxiliaires. Même la nouvelle Conseillère d'Etat Anne Hiltpold, désormais en charge du préscolaire au niveau cantonal, a plus que des doutes sur le projet de sa camarade de parti, lui rappelle que le personnel concerné est essentiellement féminin, et souhaite une revalorisation de sa fonction plutôt qu'une dévaluation de son salaire. Quant aux syndicats, ils affirment que la réponse à la pénurie de places de crèches ne saurait consister à s'attaquer au salaire des femmes travaillant pour la petite enfance -les femmes formant la majorité du personnel du secteur. Pour le personnel concerné, les pertes mensuelles que pourraient provoquer la mise en oeuvre du projet de la droite atteindraient de 500 à 800 francs pour un temps plein... C'est cela, le dumping salarial. C'est à cela, qu'aboutit, et peut-être cela que vise, le projet de la droite. Elle s'attaque au personnel de le petite enfance, mais après lui, à qui le tour ?

Pour les syndicats, et pour le comité référendaire, qui rappellent que la pénurie de personnel dans la secteur de la petite enfance est une réalité depuis des années, ce n'est évidemment pas en dégradant les conditions de travail et de rémunération de ce personnel qu'on encouragera à en faire partie, ni qu'on permettra la création de nouvelles places en crèche, mais en faisant financer par les communes (et pas seulement par la Ville de Genève) cette création, indispensable pour répondre à la demande des parents de tout le canton. De cela, "et non pas du développement au rabais de quelques places en crèche privée", conclut le SIT.

Et c'est ainsi que le coup bas de la droite genevoise remet en pleine évience le seul projet capable de répondre aux difficultés des crèches et de concrétiser le droit à un accueil de la petite enfance comme un droit au même titre que le droit à l'école : la municipalisation des crèches. Et là non plus, pas seulement en Ville de Genève et à Lancy...

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