Elections fédérales : pas de révolution d'octobre prévue
De la météo et de la politique...
Peut-on acheter une élection ? 
    
Certes, le résultat des élections dépend des
        convictions des électeurs et des électrices. Certes. Mais il
        dépend aussi des moyens engagés par les candidats et leurs
        partis pour leurs campagnes. Et elles coûtent cher, les
        campagnes électorales, même en Suisse. Pour la première fois au
        niveau d'élections fédérales, les budgets de campagne des partis
        dès 50'000 francs, et les dons que les candidats reçoivent
        au-delà de 15'000 francs, doivent être publiés (avec les noms
        des donateurs) et sont accessibles sur le site du contrôle
        fédéral des finances, qui pourra dénoncer les abus et les
        violations du devoir d'annonce aux autorités de poursuite
        pénale, avec à la clef la menace d'une amende pouvant aller
        jusqu'à 40'000 francs. Une paille, au regard de certains budgets
        de campagne : 2 millions et demi pour le PLR, 2 millions pour le
        Centre, 1,6 million pour les Verts (qui ont bénéficié d'un don
        exceptionnel), un million pour le PS... et quatre millions et
        demi pour l'UDC. Quant aux campagnes personnelles, le candidat
        qui dispose pour mener la sienne du budget le plus élevé est un
        PLR zurichois, Andri Silberschmidt, avec 280'000 francs.  Chez
        les Romands, ce sont aussi deux PLR qui cartonnent, Olivier
        Feller (110'000 francs) et Laurent Wehrli (105'000). D'ailleurs,
        les dix campagnes personnelles qui disposent des budgets les
        plus élevés sont presque toutes celles de candidats PLR, à la
        seule exception du socialiste zurichois Islam Alijai (175'000),
        en situation de handicap et expliquant qu'il a de ce fait besoin
        de davantage de moyens de campagne. 
      
Une élection, c'est évidemment l'affaire des électeurs et des électrices. Mais c'est aussi l'affaire -et sans doute faudrait-il le mettre au pluriel : les affaires... des lobbies, des groupes d'intérêt, des groupes de pression. Les deux plus anciens, avec les syndicats de travailleurs (mais qui pèsent moins qu'eux, surtout financièrement mais aussi politiquement, puisque leur courroie de transmission politique, le PS, est minoritaire), le patronat et la paysannerie, sont alliés depuis plus d'un siècle, et cette vieille alliance qui semblait avoir pris pas mal de plomb dans l'aile (droite) est cette année ressuscitée : elle s'affiche sous l'étiquette d'un machin baptisé "Perspective suisse" où on retrouve l'Union suisse des paysans (USP), Economie suisse et l'USAM, en appelant à voter pour les "en faveur de l'économie et de l'agriculture", c'est-à-dire pour n'importe quel parti de droite (UDC, PLR, Centre, Verts libéraux), contre le PS et les Verts. Une belle unité qui regroupe dans l'urgence des forces souvent opposées : ainsi lors de la campagne sur l'initiative pour des multinationales responsables, l'USP reprochait à Economie suisse de ne défendre que les multinationales. Mais rien de tel qu'un adversaire commun (la gauche, en l'occurrence) pour resserrer les rangs et échanger des petits et grands services : la droite économique combattra avec l'USP toute nouvelle politique agricole, l'USP renoncera à soutenir toute nouvelle initiative pour contrôler les grandes entreprises. Sauf que l'USP, ce n'est pas tout le monde paysan (ni, d'ailleurs, Economie suisse tout le patronat)...
Le tour de Suisse des lobbies ne peut s'achever
        sans remarquer une absence : celle des villes. Il leur manque,
        aux villes, un lobby parlementaire aussi efficace que les
        lobbies historiques, agricole et patronal et, plus récents, et
        sans doute les plus efficaces, ceux de la santé et de l'énergie.
        Le lobbyisme est désormais constitutif du système parlementaire
        (en Suisse comme ailleurs),  les lobbies sont d'autant plus
        puissants que leur champ d'activité est financièrement
        considérable, et d'autant moins capables de compromis. "Le Matin
        Dimanche" a analysé les deux commissions de l'énergie (celles du
        Conseil national et du Conseil des Etats) : leurs 38 membres
        totalisent 56 liens d'intérêt, avec des associations économiques
        ou environnementales, ou des entreprises directement concernées.
        Et ils ont distribué 27 cartes d'accès permanent au Palais
        fédéral à des lobbyistes, liés aux producteurs d'énergie
        (gazière, solaire, éolienne, hydraulique, nucléaire, pétrolière,
        xylière...). On n'est pas dans l'opacité :  "Personne ne ment
        sur la marchandise. On sait très bien qui représente quoi",
        confirme la Conseillère aux Etats verte genevoise Lisa Mazzone.
        La question n'est pas celle de la transparence, elle est celle
        de la marge restant pour répondre aux enjeux politiques
        autrement qu'en servant des intérêts particuliers, et en s'étant
        fait offrir par eux une campagne électorale victorieuse. 
      
46 % des personnes interrogées par gfs doutent que
        "la politique" puisse relever les défis de l'avenir (retraites,
        changement climatique, etc.) d'ici 2050. Peut-être en
        douteraient-ils moins si le résultat d'un processus démocratique
        (dont une large majorité se dit satisfaite) n'apparaissait pas
        comme pouvant être acheté...
      
      



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