Gaza : L'UNRWA dans la ligne de mire d'Israël

En finir avec les Palestiniens ?

Le jour même où la Cour Internationale de Justice concluait à un risque de génocide perpétré à Gaza, Israël accusait  plusieurs employés de l'agence de l'ONU qui a reçu mandat de prendre en charge les millions de réfugiés palestiniens de toute la région, L'UNRWA,  d'avoir participé au pogrom du 7 octobre, l'UNRWA en licenciait immédiatement neuf (un dixième est mort et les identités de deux autres n'étaient pas confirmées) et annonçait une enquête approfondie, ce qui n'a pas empêché les Etats-Unis, le Canada, l'Allemagne, l'Australie, l'Italie, la Finlande, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Japon) de suspendre leur financement de l'UNRWA (l'Union Européenne, qui a réclamé un audit, et la Suisse, dont la contribution se monte à vingt modestes millions, ont annoncé attendre plus d'informations que celles délivrées par Israël). Israël a en outre annoncé qu'elle interdirait à l'UNRWA de travailler à Gaza après la guerre. Or l'UNRWA est indispensable à la survie de la population civile palestinienne, et "ce serait un désastre de démanteler l'agence", a averti le commissaire général de l'UNRWA, Philippe Lazzarini, dont Israël a demandé la démission. Un désastre, pour les Palestiniens. Le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé les Etats ayant suspendu leur financement à "au moins garantir" la poursuite des opérations de l'UNRWA à Gaza, où deux millions de civils en dépendent pour leur survie au quotidien, alors que même avec la contribution des USA et de leurs alliés, l'agence n'a pas les moyens de répondre aux besoins. Et que des camions acheminant de l'aide humanitaire à Gaza ont été empêchés d'y entrer par des barrages de manifestants israéliens exigeant qu'aucune aide n'y soit acheminée avant la libération des otages. Israël voudrait-il en finir avec l'UNRWA pour en finir avec Gaza, sinon avec les Palestiniens ?

Priver l'UNRWA des moyens de son action, une punition collective des Palestiniens pour les crimes du Hamas

La modeste contribution suisse à l'UNRWA avait déjà failli, à la fin de l'année dernière, succomber à la vindicte de la droite parlementaire. A deux voix de majorité, grâce à la division du Centre et au vote compact des sénateurs romands, le Conseil des Etats avait finalement refusé le 14 décembre de supprimer le crédit de 20 millions que la Confédération accorde à l'agence onusienne d'aide aux six millions de réfugiés palestiniens des territoires occupés, de Jordanie, de Syrie, et du Liban. l'UNRWA, crédit que la droite majoritaire du Conseil national avait deux jours avant décidé de supprimer. au prétexte, déjà, de connivence entre l'UNRWA et le Hamas. Le directeur de l'UNRWA, le Suisse Philippe Lazzarini, s'était indigné d'une "décision choquante", qu'il avait attribué à une "propagande israélienne pour discréditer toute assistante et toute protection des Palestiniens", protection dont l'UNRWA est un acteur essentiel (elle assume la gestion des camps de réfugiés et leur infrastructure, ainsi que l'éducation), au point, a résumé Philippe Lazzarini, que "si l'UNRWA s'effondre, l'assistance humanitaire dans la bande de Gaza s'effondre", comme toutes les infrastructures sociales, sanitaires, éducatives. Priver l'UNRWA des moyens de son action, est-ce autre chose qu'une punition collective des Palestiniens (pas seulement ceux de Gaza, ceux de Cisjordanie aussi, et ceux des camps de réfugiés dans les pays voisins) pour les crimes du Hamas ?

L'Espagne a accru sa contribution à l'UNRWA après l'annonce du gel de celles des USA et de leurs alliés. La Suisse pourrait en faire autant. Elle en a les moyens -pas la volonté politique. Elle est pourtant dépositaire des Conventions de Genève, fondatrices du droit international humanitaire, qui doit s'appliquer à tous. Y compris aux Palestiniens. "L'UNRWA fait partie du problème (israélo-palestinien), pas de la solution", disait pourtant en 2018 le Conseiller fédéral Ignazio Cassis, reprenant une antienne du gouvernement Netanyahou, qui veut en finir avec l'UNRWA accusée de "perpétuer le conflit" en entretenant l'idée le retour des réfugiés. Comme pendant des siècles les juifs ont entretenu le rêve, fondateur du sionisme comme un rêve peut l'être d'un projet politique,  de l'"an prochain à Jerusalem" ?

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