Malthusianisme aux couleurs vertes : De la xénophobie à la démophobie

« Une trop forte immigration met en danger les espaces de repos en Suisse » : cette petite phrase de deux Conseillers nationaux verts, le Zurichois Bastien Girod et la Saint-Galloise Yvonne Gilli, leur a valu, à gauche, d'être accusés d’avoir rallié le camp xénophobe. Erreur d'appréciation, et de lecture : nos deux verts ne sont pas xénophobes, ils sont démophobes. Ça n'est pas moins stupide, si c'est moins méprisable. Ce qu'ils ont en tête ne dit strictement rien d'autre que ceci : plus on est nombreux, plus on pollue. A moins que l'augmentation de notre nombre s'accompagne d'une réduction de nos moyens de polluer. Mais que l'augmentation de la population soit le fait de l'immigration ou de la procréation indigène, le résultat est le même. Or l'immigration, aujourd'hui, est la condition du maintien d'un minimum d'équilibre démographique entre les générations, et la rupture de cet équilibre serait infiniment plus dommageable à notre environnement que la simple augmentation arithmétique de la population.

Bêtise arithmétique
Les Verts avaient déposé au parlement fédéral motions et postulats dessinant une véritable politique d'intégration de l’immigration : Cours de langues pendant le temps de travail, curricula vitae anonymes pour éviter la discrimination à l'embauche, engagement d'étrangers au sein de l'administration fédérale… ces propositions des verts, rejoignant celles des socialistes, dessinaient les contours d'une politique d'immigration prenant en compte la réalité, et non pas les fantasmes rupestres d'une Suisse confinée en vase clos. La « sortie » malthusienne des deux Conseillers nationaux Girod et Gilli fait couac dans ce concert, en manifestant un étrange refus de deux évidences. La première évidence est celle d'une humanité fondamentalement migrante : 3 % de la population mondiale est en état de migration, et il y a en permanence dans le monde 200 millions de migrantes et de migrants, dont vingt à trente millions sont en situation illégale dans les pays où ils résident. Ce double phénomène (la migration, et la résidence illégale) touche tous les pays « développés » augmente la population résidente des uns, freine la dépopulation des autres lorsque, comme en Allemagne ou en Suisse, la natalité indigène ne suffit plus à maintenir un équilibre supportable entre génération. Ce qui nous amène à la seconde évidence : Si toute augmentation de la population dans un espace géographique donné renforce les emprises sur l'environnement de cet espace, et peut en aggraver la dégradation, c'est, en Suisse, non pas la population immigrée mais la population résidante et indigène qui en est surtout la cause : plus âgée, plus riche, et consommant plus que la population immigrée, elle occupe plus d'espace, et pollue plus. Désigner l'immigration comme source de pollution est une ânerie : d'abord parce que plus rien ne freinera l'immigration, à moins de rendre la Suisse si invivable, y compris pour les Suisses, que nul ne songera plus à s'y rendre et que celles et ceux qui y vivent n'auront plus d'autre idée que de la fuir; ensuite parce s'en tenir à un constat bêtement arithmétique n'a pas de sens : ce n'est pas tant la quantité d'habitants qui détermine la pression sur l'environnement que la structure démographique de la population, et l'organisation de l'espace qu'elle occupe.

Commentaires

Articles les plus consultés