Crise libyenne : L'Europe sauve la mise de la Suisse
Il y a un mois, l'un des deux Suisses retenus depuis des mois en Libye, en rétorsion de l'arrestation à Genève du fils du Frère en chef, a pu retrouver le sol suisse. Le deuxième otage suisse du clan Kadhafi a, lui, été conduit en prison sous prétexte d'infraction aux lois sur l'immigration. Pour en arriver à ce dénouement mi-figue, mi-datte, il aura fallu que les ambassadeurs européens à Tripoli passent la nuit dans une ambassade de Suisse encerclée par des policiers armés, et que l'Union européenne s'engage, contrainte et forcée par le « mécanisme de Schengen », dans un conflit qui au départ ne la concernait absolument pas, mais qui, sans cet engagement européen, en serait encore au stade où il était lorsque Hans-Rudolf Merz revenait de Tripoli avec le linge sale des otages, mais sans les otages. La Suisse sortie du merdier libyen par l'Europe ? Le principal enseignement de la crise libyenne ne manque pas d'ironie. La même que celle dont l'ineffable Kouchner tenta de faire preuve lorsqu'à la question d'un journaliste suisse sur une possible solidarité de l'Europe avec l'Helvétie face à la Libye, il fit mine de s'étonner : « Ah bon, la Suisse est membre de l'Union ? Excellente nouvelle ! » .
De l'Europe comme bouée de sauvetage
Souvenez-vous : en août 2009, notre président d'alors, Hans-Rudolf Merz, s'en était allé à Tripoli présenter à papa Kadhafi de plates excuses pour le traitement de non-faveur réservé à fiston par la police genevoise. Et l'éditorialiste du Temps de soupirer, soulagé : « selon toute évidence, la crise libyenne est en phase d'atterrissage ». Ce fut l'atterrisage le plus long (six mois...) de l'histoire de l'aviation. Encore a-t-on dû compter sur les aiguilleurs du ciel européens pour que l'atterrisage d'un des deux passagers retenus en Libye puisse se faire C'est aussi l'intervention des ambassadeurs européens qui a évité que l'ambassade suisse à Tripoli soit prise d'assaut par la police libyenne, et c'est encore vraisemblablement une intervention européenne qui tirera de la geôle où on a dû le laisser, le deuxième des passagers que l'on s'était promis de ramener il y a six mois. Ce n'est pas de gaieté de coeur que l'Union Européenne s'est portée au secours de la Suisse, mais parce qu'elle y a été entraînée une fois mis en route le mécanisme de l'espace Schengen, par lequel un pays membre dudit l'espace peut, tout seul, en limiter l'accès aux ressortissants d'Etats tiers. En usant de ce mécanisme contre plusieurs centaines de Libyens, membres ou proches du clan au pouvoir, et en provoquant en retour une mesure du même ordre prise par la Libye à l'encontre de tous les ressortissants européens, la Suisse a délibérément fait dégénérer une crise bilatérale en crise multilatérale, pour obliger l'UE à se porter à son secours. Reste à savoir si la Suisse pourra encore longtemps user ainsi de l'Union Européenne comme d'une bouée de sauvetage, sans en être membre. Une telle situation n'est pas si confortable que les europhobes feignent de le croire : la Suisse est contrainte d'appliquer des décisions et des normes à l'élaboration desquelles elle ne peut prendre aucune part, et ne peut compter sur aucune solidarité de la part de l'Europe, sinon celle à laquelle elle la contraint en usant de mécanismes (ceux de Schengen, en l'ocurrence) prévus pour tout autre chose, et dont, du coup, l'Europe songe à changer le fonctionnement. La crise libyenne a ainsi été un révélateur supplémentaire de l'absurdité de la situation de la Suisse à l'égard de l'Union Européenne. Il en faudra encore combien, de ces douloureuses révélations, pour qu'on se résolve à regarder la réalité en face et qu'on renonce à traduire la vieille devise de la Confédération, « un pour tous, tous pour un » en un pitoyable « tous à notre secours quand on est dans la merde » ?
De l'Europe comme bouée de sauvetage
Souvenez-vous : en août 2009, notre président d'alors, Hans-Rudolf Merz, s'en était allé à Tripoli présenter à papa Kadhafi de plates excuses pour le traitement de non-faveur réservé à fiston par la police genevoise. Et l'éditorialiste du Temps de soupirer, soulagé : « selon toute évidence, la crise libyenne est en phase d'atterrissage ». Ce fut l'atterrisage le plus long (six mois...) de l'histoire de l'aviation. Encore a-t-on dû compter sur les aiguilleurs du ciel européens pour que l'atterrisage d'un des deux passagers retenus en Libye puisse se faire C'est aussi l'intervention des ambassadeurs européens qui a évité que l'ambassade suisse à Tripoli soit prise d'assaut par la police libyenne, et c'est encore vraisemblablement une intervention européenne qui tirera de la geôle où on a dû le laisser, le deuxième des passagers que l'on s'était promis de ramener il y a six mois. Ce n'est pas de gaieté de coeur que l'Union Européenne s'est portée au secours de la Suisse, mais parce qu'elle y a été entraînée une fois mis en route le mécanisme de l'espace Schengen, par lequel un pays membre dudit l'espace peut, tout seul, en limiter l'accès aux ressortissants d'Etats tiers. En usant de ce mécanisme contre plusieurs centaines de Libyens, membres ou proches du clan au pouvoir, et en provoquant en retour une mesure du même ordre prise par la Libye à l'encontre de tous les ressortissants européens, la Suisse a délibérément fait dégénérer une crise bilatérale en crise multilatérale, pour obliger l'UE à se porter à son secours. Reste à savoir si la Suisse pourra encore longtemps user ainsi de l'Union Européenne comme d'une bouée de sauvetage, sans en être membre. Une telle situation n'est pas si confortable que les europhobes feignent de le croire : la Suisse est contrainte d'appliquer des décisions et des normes à l'élaboration desquelles elle ne peut prendre aucune part, et ne peut compter sur aucune solidarité de la part de l'Europe, sinon celle à laquelle elle la contraint en usant de mécanismes (ceux de Schengen, en l'ocurrence) prévus pour tout autre chose, et dont, du coup, l'Europe songe à changer le fonctionnement. La crise libyenne a ainsi été un révélateur supplémentaire de l'absurdité de la situation de la Suisse à l'égard de l'Union Européenne. Il en faudra encore combien, de ces douloureuses révélations, pour qu'on se résolve à regarder la réalité en face et qu'on renonce à traduire la vieille devise de la Confédération, « un pour tous, tous pour un » en un pitoyable « tous à notre secours quand on est dans la merde » ?
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