Elections municipales genevoises et élections fédérales : La droite se met au frai

C'est une belle réussite, que la fusion libérale-radicale, à Genève : les radicaux s'allient au PDC, les libéraux à l'UDC, sans que ni les premiers ni les seconds renoncent à s'allier entre eux, avec pour résultat que plus personne, pas même les alliés, ne comprend plus rien à la stratégie d'alliance de la droite locale. Sinon qu'elle a apparemment fait une croix, funéraire, sur les élections municipales en Ville de Genève et dans les grandes communes, pour se préparer aux élections fédérales et à une grande alliance de toutes les droites pour essayer de piquer l'un des deux sièges sénatoriaux que l'Alternative détient, et y asseoir le postérieur de Christian Lüscher, qui a de toute façon toujours été prêt à toutes les alliances à droite et à l'extrême-droite. « A Droite ensemble », c'est l'annonce d'un frai avec n'importe qui, pour pondre n'importe quoi mais sur un siège fédéral.

D'une élection l'autre

Les élections municipales sont déjà perdues ? cap sur les Fédérales ! Hors de ce calcul électoral, qui semble bien être celui de la droite genevoise, tout n'est que fumerolles rhétoriques : ainsi du pari qu'au contact d'une droite bourgeoise supposée être « raisonnable », l'UDC s'assagira et en reviendra à ses bonnes vielles traditions agrariennes, conservatrices, certes, mais pas populistes, et qu'elle cesseras de taper sur le clou xénophobe, europhobe et raciste. Attente dont même ceux qui font mine de la cultiver savent qu'elle est illusoire : l'UDC sait pertinemment que si elle s'embourgeoise (ou plutôt si elle embourgeoise ses postures puisque sur le fond, et à l'heure des choix sociaux et économiques, elle n'a jamais fait autre chose que ce que le patronat lui demandait de faire), elle fait naître, sur sa droite, des mouvements qui reprennent les attitudes auxquelles elle a renoncé : le MCG à Genève, la Lega au Tessin prospèrent ainsi sur le soupçon, ou l'accusation, d'un ralliement de l'UDC à la droite traditionnelle. Et en France, la ligne « à droite toute ! » de Sarkozy et de sa fine équipe de conseillers a surtout profité, lors des dernières élections cantonales, au Front National (en parfaite traduction du principe « mieux vaut l'original que la copie »)... et au PS. Mais à Genève comme ailleurs, la gauche (et plus précisément encore, la « gauche à la gauche du PS » et la gauche du PS lui-même) aurait cependant grand tort de se contenter de se réjouir des tourments de la droite, et plus grand tort encore de s'en satisfaire pour la surpasser électoralement. Non seulement parce qu'à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, mais surtout parce que sur cet oreiller de paresse, le risque est grand de s'endormir, et de remettre à des lendemains chantants la nécessaire refondation de la gauche elle-même. On ne fonde ni une stratégie ni une alternative sur la seule incompétence de ses adversaires (et d'ailleurs, si on a peut-être à Piogre la droite la plus bête du monde, c'est un trophée que nous sommes parfaitement capables de lui contester). La bataille des Municipales genevoise n'est pas encore gagnée, ni en Ville de Genève, ni à Vernier, ni à Carouge, ni ailleurs : la déliquescence de la droite démocratique en Ville et dans les grandes communes ne donne pas mécaniquement la victoire à la gauche, si celle-ci ne se mobilise pas. Et cela vaut plus encore pour les élections fédérales, en la campagne desquelles nous sommes déjà entrés, et qui vont s'imposer à nos agendas (y compris à celui de la nouvelle formation politique, « La Gauche ») dès le soir du dernier épisode des Municipales. Nous entendons bien, ce soir là, fêter l'élection de notre quatre candidates et candidats en Ville, de nos deux (ou trois, à Vernier) candidates et candidats dans les grandes communes de la ceinture urbaine, de nos candidates et candidats uniques ailleurs. Mais cette fête ne sera qu'un intermède. Même sans majorité stable au Conseil Municipal, la Ville restera un contre-pouvoir à un gouvernement cantonal, un parlement cantonal, une majorité de communes, une majorité de cantons, un parlement fédéral et un gouvernement fédéral, tous de droite. Mais il y a un paradoxe en cette situation : elle est à la fois confortable et épuisante. Confortable, parce que rien au fond n'est plus satisfaisant pour l'esprit et l'ego que pouvoir camper en son bastion, sous son drapeau, en ayant raison presque tout seul contre presque tout le monde. Mais épuisante, puisque camper en son bastion, c'est aussi consacrer tous ses efforts pour le tenir, pour ne pas reculer. Et donc ne pas avancer.

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