Traversée routière de la rade ou du petit lac : Boulet d'obstination
Recalé à Berne pour avoir déposé un dossier ne répondant pas aux
critères de subventionnement fédéral, le Conseil d'Etat genevois
s'obstine à proposer une traversée autoroutière du (petit) lac. Il y
va seulement un peu plus sur la pointe des pieds, en ayant modifié
sa stratégie pour la calibrer aux critères fédéraux : il définit
désormais cette traversée du lac comme «complémentaire» de
l'élargissement de l'autoroute de contournement, qui pourra, si
Genève parvient à la faire inscrire dans l'arrêté fédéral idoine,
être financée par la Confédération au titre de la suppression des «
goulets d'étranglement ». On prévoit un horizon 2020-2025 pour cette
suppression du « goulet d'étranglement » que représente aujourd'hui
l'autoroute de contournement, surchargée. Et un horizon 2030 (ou
plus tard, le plus tard possible...) pour la réalisation du boulet
d'obstination : le pont ou le tunnel lacustre. Au moins, ça nous
laisse un peu de temps pour organiser l'opposition à cette
dispendieuse (trois milliards et demi) fumisterie.
Qu'un projet vaseux s'enlise nous paraît assez logique...
L'Office fédéral des routes a rendu son rapport sur la suppression des «goulets d'étranglement» dans le réseau des routes nationales. Ce rapport confirme ce que l'Office avait déjà dit : l'élargissement de l'autoroute de contournement de Genève est indispensable, la traversée du lac n'est, peut-être, éventuellement, qu'utile. Et encore faut-il qu'on le prouve. Et on est loin de l'avoir prouvé. D'ailleurs, le Conseil des Etats a purement et simplement refusé de l'inscrire dans la planification du réseau des routes nationales. Et donc dans les ouvrages qui pourraient être financés par la Confédération alors que ce financement est indispensable à ce projet : il va coûter au moins trois milliards et demi, et c'est un investissement hors de portée du seul canton de Piogre. Or la Confédération, soumise à des demandes concurrentes de financement d'infrastructures routières venant de toutes les régions (et comme les moyens à disposition sont tout de même limités, il va falloir faire des choix) a des doutes : non seulement le machin va coûter un saladier, mais son utilité n'est pas démontrée, alors qu'en revanche son impact environnemental négatif est plus qu'évident. En outre, il va, sur la rive gauche, déboucher dans des zones peu urbanisées (et qui refusent de l'être plus), à la population faible (par rapport à la rive-droite), et qui n'ont nul besoin, et moins encore envie, de se retrouver avec un pont sous le nez ou un tunnel sous les pieds.
« Pourquoi la traversée du Léman s'enlise-t-elle à Berne? », se demandait Le Temps, à propos des réticences de la Confédération à financer le machin qui, en pont ou en tunnel, devrait relier (selon le projet du Conseil d'Etat) à travers le Petit Lac, le Vengeron à la Pointe à la Bise. Pour la modique somme d'au moins trois milliards et demi de francs. Qu'un projet vaseux s'enlise nous apparaît assez logique, mais la réponse de l'office fédéral des routes ne pouvait le dire aussi clairement; elle va donc se contenter de relever que ce machin n'entre dans aucune des cases du fonds d'infrastructure qui devrait être mis à contribution : ce n'est ni un achèvement du réseau des routes nationales, ni un moyen d'éliminer un « goulet d'étranglement » du trafic, ni une réponse à un besoin de mobilité accru, et la Confédération soupçonne Genève d'essayer de lui emphysiquer un projet d'agglomération en le faisant passer pour une infrastructure routière. Soupçon excessif : En fait, il ne s'agit que d'un gros gadget politicien très coûteux et très nuisible qu'on veut faire payer par la Confédération parce qu'à force de vider les caisses cantonales en accordant des cadeaux fiscaux à qui n'en avait pas besoin, on n'a plus les moyens de se payer soi-même les trucs dont on n'a pas besoin non plus, mais dont on a très, très envie.. Une sorte de grosse Genferei bétonnée, quoi.
L'Ingénieur cantonal, René Leutwyler, est convaincu que «Genève a des arguments à faire valoir» pour convaincre Berne de casquer pour la traversée du lac. Mais ce n'est pas Berne qu'il faut d'abord convaincre, Monsieur l'Ingénieur, c'est Genève. Les Genevoises et les Genevois, donc. Qui ont refusé à une très nette majorité, le 9 juin 1996, deux projets de traversée de la rade, l'un en pont, l'autre en tunnel. En conséquence de quoi, dix jours plus tard, devant le Grand Conseil, le Conseil d'Etat (composé uniquement de représentants de la droite, c'était le joli temps du «monocolore»...) déclarait que désormais la politique genevoise des transports reposerait sur deux piliers : le développement des transports en commun et l'utilisation optimale de l'autoroute de contournement. Le Conseil d'Etat a changé, depuis, certes, mais il serait tout de même assez curieux que ce soit à nous de rappeler au gouvernement ce que signifie la « continuité des engagements de l'Etat », et, a contrario, ce que suggèrent les retournements de vestes et les volte-faces politiques. Même à six mois des élections, quand il est assez courant que l'on se mette à défendre n'importe quoi pour peu que l'on suppose que ce n'importe quoi soit dans l'air du temps.
Ce qui est après tout une assez bonne définition de la démagogie ordinaire en temps d'élections.
Qu'un projet vaseux s'enlise nous paraît assez logique...
L'Office fédéral des routes a rendu son rapport sur la suppression des «goulets d'étranglement» dans le réseau des routes nationales. Ce rapport confirme ce que l'Office avait déjà dit : l'élargissement de l'autoroute de contournement de Genève est indispensable, la traversée du lac n'est, peut-être, éventuellement, qu'utile. Et encore faut-il qu'on le prouve. Et on est loin de l'avoir prouvé. D'ailleurs, le Conseil des Etats a purement et simplement refusé de l'inscrire dans la planification du réseau des routes nationales. Et donc dans les ouvrages qui pourraient être financés par la Confédération alors que ce financement est indispensable à ce projet : il va coûter au moins trois milliards et demi, et c'est un investissement hors de portée du seul canton de Piogre. Or la Confédération, soumise à des demandes concurrentes de financement d'infrastructures routières venant de toutes les régions (et comme les moyens à disposition sont tout de même limités, il va falloir faire des choix) a des doutes : non seulement le machin va coûter un saladier, mais son utilité n'est pas démontrée, alors qu'en revanche son impact environnemental négatif est plus qu'évident. En outre, il va, sur la rive gauche, déboucher dans des zones peu urbanisées (et qui refusent de l'être plus), à la population faible (par rapport à la rive-droite), et qui n'ont nul besoin, et moins encore envie, de se retrouver avec un pont sous le nez ou un tunnel sous les pieds.
« Pourquoi la traversée du Léman s'enlise-t-elle à Berne? », se demandait Le Temps, à propos des réticences de la Confédération à financer le machin qui, en pont ou en tunnel, devrait relier (selon le projet du Conseil d'Etat) à travers le Petit Lac, le Vengeron à la Pointe à la Bise. Pour la modique somme d'au moins trois milliards et demi de francs. Qu'un projet vaseux s'enlise nous apparaît assez logique, mais la réponse de l'office fédéral des routes ne pouvait le dire aussi clairement; elle va donc se contenter de relever que ce machin n'entre dans aucune des cases du fonds d'infrastructure qui devrait être mis à contribution : ce n'est ni un achèvement du réseau des routes nationales, ni un moyen d'éliminer un « goulet d'étranglement » du trafic, ni une réponse à un besoin de mobilité accru, et la Confédération soupçonne Genève d'essayer de lui emphysiquer un projet d'agglomération en le faisant passer pour une infrastructure routière. Soupçon excessif : En fait, il ne s'agit que d'un gros gadget politicien très coûteux et très nuisible qu'on veut faire payer par la Confédération parce qu'à force de vider les caisses cantonales en accordant des cadeaux fiscaux à qui n'en avait pas besoin, on n'a plus les moyens de se payer soi-même les trucs dont on n'a pas besoin non plus, mais dont on a très, très envie.. Une sorte de grosse Genferei bétonnée, quoi.
L'Ingénieur cantonal, René Leutwyler, est convaincu que «Genève a des arguments à faire valoir» pour convaincre Berne de casquer pour la traversée du lac. Mais ce n'est pas Berne qu'il faut d'abord convaincre, Monsieur l'Ingénieur, c'est Genève. Les Genevoises et les Genevois, donc. Qui ont refusé à une très nette majorité, le 9 juin 1996, deux projets de traversée de la rade, l'un en pont, l'autre en tunnel. En conséquence de quoi, dix jours plus tard, devant le Grand Conseil, le Conseil d'Etat (composé uniquement de représentants de la droite, c'était le joli temps du «monocolore»...) déclarait que désormais la politique genevoise des transports reposerait sur deux piliers : le développement des transports en commun et l'utilisation optimale de l'autoroute de contournement. Le Conseil d'Etat a changé, depuis, certes, mais il serait tout de même assez curieux que ce soit à nous de rappeler au gouvernement ce que signifie la « continuité des engagements de l'Etat », et, a contrario, ce que suggèrent les retournements de vestes et les volte-faces politiques. Même à six mois des élections, quand il est assez courant que l'on se mette à défendre n'importe quoi pour peu que l'on suppose que ce n'importe quoi soit dans l'air du temps.
Ce qui est après tout une assez bonne définition de la démagogie ordinaire en temps d'élections.
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