Feue La Poste ?
Quand le service public devient un accessoire des commerces privés
Ce soir, le Conseil municipal de Genève votera sans doute une motion appelant la Municipalité (le Conseil administratif) à intervenir pour empêcher la fermeture de plusieurs bureaux de poste en Ville, d'autres fermetures étant annoncées (et certaines déjà effectuées) dans d'autres communes : 16 des 53 offices postaux du canton sont menacés, les uns de fermeture pure et simple, les autres de remplacement par des "agences postales" installées dans des commerces privés : une épicerie à Hermance, une pizzeria à Confignon, une supérette à Cressy. Ces agences ne peuvent effectuer qu'une partie des services d'un véritable office postal, et leurs employés ne sont pas couverts par la convention collective de La Poste. Le syndicat (Syndicom) exige un moratoire sur le fermeture des offices, le respect par les "agences postales"des normes de la convention collective. Il exige aussi que le politique reprenne la main sur le service public postal, et ne laisse pas être géré comme s'il ne s'agissait que d'une entreprise privée, pratiquant au nom de la "rationalisation", et grâce à la sous-traitance, un dumping salarial qu'à Genève même le patronat a accepté de combattre, avec les syndicats et l'Etat.
"Ce n'est pas une chose rare qu'il faille reprendre le monde de trop de docilité" (Blaise Pascal)
Une résolution ou une motion d'un Conseil municipal, fût-il celui de la capitale mondiale du monde mondial, ne suffira évidemment pas à arrêter La Poste dans sa politique d'abandon de son service au public. Mais elle dira au moins ce qu'une collectivité publique a à dire à ce qui fut un service public. C'est d'ailleurs ce qu'ont déjà fait les conseils municipaux, ou les mairies, d'Anières, de Meinier et d'Avully. Et ce qu'une pétition demande à ceux de Vernier de faire. Le texte soumis au Conseil municipal de la Ville de Genève émane du MCG ? Peu importe : il peut concourir à la fois à soutenir le Conseil administratif dans ses propres démarches face à La Poste, et à contraindre celle-ci à assumer, et à expliquer, publiquement ses choix autrement qu'en se réfugiant derrière des chiffres -et encore, en les sélectionnant, en affichant le déficit du service postal universel, mais en étant bien plus discrète sur les salaires de ses dirigeants. Et sur les "économies" qu'elle fait en usant et en abusant de la sous-traitance : La Poste est désormais l'un des principaux client des entreprises de travail temporaire (Manpower, Adecco)
Il est vrai que nous sommes, à gauche, co-responsables de cette situation, puisque nous n'avons pas, quand on le pouvait, résisté comme on aurait dû à la mise en route d'un véritablement démantèlement du service public : En 1997, la libéralisation du marché des communications est passée comme une lettre... à la poste : sans référendum, ce fut la fin du monopole des PTT, et des PTT elles-mêmes, séparées en deux entités, La Poste et Swisscom. Aujourd'hui, La Poste et ses trois filiales (Poste Suisse, Postfinance et Car Postal) ne couvre plus ses frais dans les domaines où elle dispose encore d'une prééminence (les lettres de moins de 50 gr), et ne réalise plus guère de bénéfices que grâce à Postfinance. Elle ferme ses offices les moins "rentables" et sous-traite une partie des prestations qu'ils offraient à des commerces privés, mais elle fait des centaines de millions de francs de bénéfices (645 millions en 2015, dont 200 millions reversés à la Confédération). Or "Un service public ne doit pas satisfaire ses actionnaires" (la Confédération, dans le cas de la Poste) mais le public, et on n'a pas à lui demander d'être rentable mais d'être utile, expliquait alors Zeynep Ersan Berdoz, au nom des initiants d'un texte dont on a quelques raisons aujourd'hui de regretter n'avoir pas soutenu.
On a failli ? On a failli. "Ce n'est pas une chose rare qu'il faille reprendre le monde de trop de docilité" , soupire Blaise Pascal. Raison de plus pour se réveiller, même un peu tard : quand le syndicat demande que "le politique reprenne la main" sur le service public, c'est aussi cela que cela veut dire : rappeler à ce service qu'il est la propriété de tous, et non de ses seuls "managers", et qu'à confondre les règles du service public et celles de l'économie privée, on finit par tuer le premier sans rien ajouter à la seconde.
Ce soir, le Conseil municipal de Genève votera sans doute une motion appelant la Municipalité (le Conseil administratif) à intervenir pour empêcher la fermeture de plusieurs bureaux de poste en Ville, d'autres fermetures étant annoncées (et certaines déjà effectuées) dans d'autres communes : 16 des 53 offices postaux du canton sont menacés, les uns de fermeture pure et simple, les autres de remplacement par des "agences postales" installées dans des commerces privés : une épicerie à Hermance, une pizzeria à Confignon, une supérette à Cressy. Ces agences ne peuvent effectuer qu'une partie des services d'un véritable office postal, et leurs employés ne sont pas couverts par la convention collective de La Poste. Le syndicat (Syndicom) exige un moratoire sur le fermeture des offices, le respect par les "agences postales"des normes de la convention collective. Il exige aussi que le politique reprenne la main sur le service public postal, et ne laisse pas être géré comme s'il ne s'agissait que d'une entreprise privée, pratiquant au nom de la "rationalisation", et grâce à la sous-traitance, un dumping salarial qu'à Genève même le patronat a accepté de combattre, avec les syndicats et l'Etat.
"Ce n'est pas une chose rare qu'il faille reprendre le monde de trop de docilité" (Blaise Pascal)
Une résolution ou une motion d'un Conseil municipal, fût-il celui de la capitale mondiale du monde mondial, ne suffira évidemment pas à arrêter La Poste dans sa politique d'abandon de son service au public. Mais elle dira au moins ce qu'une collectivité publique a à dire à ce qui fut un service public. C'est d'ailleurs ce qu'ont déjà fait les conseils municipaux, ou les mairies, d'Anières, de Meinier et d'Avully. Et ce qu'une pétition demande à ceux de Vernier de faire. Le texte soumis au Conseil municipal de la Ville de Genève émane du MCG ? Peu importe : il peut concourir à la fois à soutenir le Conseil administratif dans ses propres démarches face à La Poste, et à contraindre celle-ci à assumer, et à expliquer, publiquement ses choix autrement qu'en se réfugiant derrière des chiffres -et encore, en les sélectionnant, en affichant le déficit du service postal universel, mais en étant bien plus discrète sur les salaires de ses dirigeants. Et sur les "économies" qu'elle fait en usant et en abusant de la sous-traitance : La Poste est désormais l'un des principaux client des entreprises de travail temporaire (Manpower, Adecco)
Il est vrai que nous sommes, à gauche, co-responsables de cette situation, puisque nous n'avons pas, quand on le pouvait, résisté comme on aurait dû à la mise en route d'un véritablement démantèlement du service public : En 1997, la libéralisation du marché des communications est passée comme une lettre... à la poste : sans référendum, ce fut la fin du monopole des PTT, et des PTT elles-mêmes, séparées en deux entités, La Poste et Swisscom. Aujourd'hui, La Poste et ses trois filiales (Poste Suisse, Postfinance et Car Postal) ne couvre plus ses frais dans les domaines où elle dispose encore d'une prééminence (les lettres de moins de 50 gr), et ne réalise plus guère de bénéfices que grâce à Postfinance. Elle ferme ses offices les moins "rentables" et sous-traite une partie des prestations qu'ils offraient à des commerces privés, mais elle fait des centaines de millions de francs de bénéfices (645 millions en 2015, dont 200 millions reversés à la Confédération). Or "Un service public ne doit pas satisfaire ses actionnaires" (la Confédération, dans le cas de la Poste) mais le public, et on n'a pas à lui demander d'être rentable mais d'être utile, expliquait alors Zeynep Ersan Berdoz, au nom des initiants d'un texte dont on a quelques raisons aujourd'hui de regretter n'avoir pas soutenu.
On a failli ? On a failli. "Ce n'est pas une chose rare qu'il faille reprendre le monde de trop de docilité" , soupire Blaise Pascal. Raison de plus pour se réveiller, même un peu tard : quand le syndicat demande que "le politique reprenne la main" sur le service public, c'est aussi cela que cela veut dire : rappeler à ce service qu'il est la propriété de tous, et non de ses seuls "managers", et qu'à confondre les règles du service public et celles de l'économie privée, on finit par tuer le premier sans rien ajouter à la seconde.
Commentaires
Enregistrer un commentaire