82 % de la richesse à 1 % de la population : Bienvenue dans le meilleur des mondes


82% de la richesse créée l'an dernier dans le monde a fini dans les mains du 1% le plus riche de la population de la planète, les femmes payant le prix fort de ces inégalités, a dénoncé lundi l'ONG Oxfam, lors de la publication, à la veille de l'ouverture du World Economic Forum (WEF) à Davos, de son rapport intitulé "Récompenser le travail, pas la richesse". Et si 1 % de la population mondiale a accaparé 82 % de la richesse crée, la moitié de la population mondiale, soit 3,7 milliard de personne, n'en a rien touché du tout. Reste 18 % de cette richesse, que se partage (inégalement) 49 % de la population. Dont nous, ici. Bienvenue dans le meilleur des mondes : le nôtre.

Quand tout le monde et n’importe qui, sauf les milliardaires et les mendiants, est réputé faire partie de la « classe moyenne », c’est bien que cette classe n’en est pas une

Oxfam a donc ouvert, à sa manière, le Forum de Davos : En rappelant l'inégalité constitutive du monde tel qu'il est : 1 % de la population détient 82 % des richesses, depuis 2010 la richesse de l'"élite économique" a augmenté en moyenne de 13% par année, entre mars 2016 et mars 2017 "s'est produite la plus grande augmentation historique du nombre de milliardaires" et multi-milliardaires (en dollars). Et sur 10 nouveaux milliardaires, 9 sont des hommes. En revanche, "tout en bas de la pyramide", ce sont les femmes qu'on retrouve : elles gagnent partout moins que les hommes, et sont partout sur-représentées dans les emplois les moins bien payés et les plus précaires. L'Organisation internationale du Travail précise : la pauvreté au travail ne recule pas, malgré la "reprise" économique dans les pays "développés". Ailleurs, si on créée effectivement des emplois, on en créée moins que la croissance de la population le nécessiterait, et surtout, on créée des emplois sous payés, sans protection sociale, et pour des travaux effectués au mépris de toute protection de la santé des travailleurs : 300 millions de travailleuses et de travailleurs dans les pays "émergents" ou "en développement", dont la majorité de la population active d'Afrique sub-saharienne, gagnent moins de 1,90 dollar par jour, 730 millions moins de 4 dollars.

Pour autant, on ne cèdera pas ici à l’illusion de croire que les 99 % de la population qui doivent se partager le 28 % de la richesse que le 1 % de la population leur laisse, forment la nouvelle classe dominée, la nouvelle plèbe, un nouveau prolétariat de substitution : ces 99 % ne sont qu’un agrégat, une addition de groupes sociaux qui n’ont entre eux aucune solidarité de classe, et ne forment ensemble aucune force sociale, ni aucune force politique cohérente. On peut en effet être de la classe des privilégiés sans être multi-milliardaire, et de n’être pas un nabab ne fait pas d’un médecin, d’un professeur d’université, d’un chef d’entreprise, d’un cadre dirigeant ou d’un haut fonctionnaire un exploité. Quand tout le monde et n’importe qui, sauf les milliardaires et les mendiants, est réputé faire partie de la « classe moyenne », c’est bien que cette classe n’en est pas une. Autrement dit, qu’elle n’existe pas, sinon comme un mythe.
« Ils sont 1 %, nous sommes 99 % » n’est donc pas seulement une ânerie (si nous étions 99 %, le monde ne serait pas tel qu'il est), c’est surtout une ânerie dangereuse, en laquelle tout projet de changement social radical ne peut d’abord que s’engluer, pour ensuite se dissoudre, et enfin disparaître.



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