"Pour toutes et tous, sans privilèges" : Zavez dit "transparence" ?


L'exigence croissante de transparence (et donc de publicité) du financement de la vie politique et de ses acteurs étant ce qu'elle est, et impliquant évidemment la transparence (et donc la publicité) de la rétribution et de l'indemnisation des élus, et des petits avantages dont ils bénéficient, et compte tenu de l'expression de cette exigence par le Conseil municipal de la Ville de Genève à l'égard du Conseil administratif, on a demandé à celui-ci de nous fournir la liste de exhaustive de toutes les prestations monétaires, indemnités et avantages, en espèces ou en nature, que la Ville accorde ès qualités aux membres de son Conseil municipal. On pourrait s'étonner de ce qu'un Conseiller municipal ne connaisse pas tout ce dont il peut bénéficier de la part de sa Municipalité... à la lecture de la liste*, puisqu'on la reçue, tout s'explique : elle tient plus d'un inventaire à la Prévert (ou d'un Cadavre Exquis à la Breton) que d'un statut rationnel. Voyons donc...
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la liste complète est téléchargeable sur https://www.fichier-pdf.fr/2019/05/06/ie-84/

"restaurer la confiance en augmentant la transparence envers les citoyens"


Dissipons d'emblée un possible procès d'intention : il ne s'agit pas ici de dénoncer des privilèges dont nous, modestes conseillers municipaux, fussent-ils ceux de la capitale mondiale du monde mondial, jouirions indûment (tout privilège étant par définition indu). Nous ne détenons aucun privilège. Seuls les autres (les conseillers administratifs, les députés, les conseillers d'Etat, les parlementaires fédéraux, les conseillers fédéraux -et on en passe) jouissent de privilèges. Nous, nous avons des droits. De justes compensations de notre engagement désintéressé. La reconnaissance quasi symbolique de notre apport immarcescible à la démocratie locale.

Inventorions : Il y a d'abord les jetons de présence, dont nous avons fixés nous-mêmes le montant pour cinq ans. Ils sont de 143 francs par séance plénière (il y en a quatre par session ordinaire, plus celles des sessions extraordinaires, soit une cinquantaine de séances par année), et de 110 francs par heure de séance de commission (soit en moyenne, toutes commissions confondues, 40 heures de séance par année). Ces jetons on les touche dès qu'on a signé la feuille de présence. Ensuite, on peut passer toute la séance au bar, on touchera quand même nos jetons de présence (au bar). On peut aussi roupiller pendant toute la séance, on touchera quand même nos jetons (de sommeil). Et ce ne sont pas là des privilèges, ce ne sont que des dus. Légitimes, incontestables. Et fiscalisés, ce qui en atteste forcément la légitimité. Au final, et en moyenne, chaque Conseiller-e municipal-e de la Ville de Genève touche de la Ville (en plus des autres avantages dont il ou elle dispose) plus d'une vingtaine de milliers de francs par an, dont il ou elle redistribue une portion (variable) à son parti, ce qui fait de la rémunération des élus un moyen (un tantinet hypocrite) de financement des partis politiques...

Il y a ensuite quelques autres prestations de la Ville aux membres de son parlement : fourniture d'un ordinateur (parce que nous n'en n'avions pas ?), d'une imprimante (nous n'en n'avions pas non plus) et des cartouche d'encre. Et quelques cadeaux : des billets gratuits pour le Grand Théâtre et le Victoria Hall, des abonnements généraux Unireso (75 membres du Conseil municipal se font ainsi offrir la gratuité des TPG -mais ils sont évidemment tous prêts à l'étendre à tous les habitants de la Ville), la prise en charge de la connexion internet (si on n'était pas conseillers municipaux, on serait pas connectés ?). Et puis quelques autres petites attention dont vous trouverez la liste exhaustive sur
https://www.fichier-pdf.fr/2019/05/06/ie-84/.

Dans son rapport sur les notes de frais du Conseil administratif, dont nous fîmes presque tous gorges chaudes, on lit cette recommandation (la dixième) de "publier annuellement la rémunération de ses membres en y incluant (toutes les) prestations perçues", recommandation dont la Cour considère, fort justement, qu'elle doit "notamment permettre de répondre à l'inadéquation de la "culture éthique" et de restaurer la confiance en augmentant la transparence envers les citoyens". Avec le souci de la cohérence qui fait tout notre charme, et animé de l'inébranlable volonté de mériter la confiance des citoyens qui ont eu la faiblesse de nous élire au parlement municipal de la capitale mondiale du monde mondial, pouvions-nous ne pas nous appliquer à nous-même les exigences que nous voulons imposer à nos Magnifiques Seigneurs et Syndics ?
Non, évidemment : une exigence de transparence qu'on n'imposerait qu'aux autres, sans se l'imposer à soi-même, ne relèverait que du voyeurisme.

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