Le Conseil national veut couper toute aide suisse à l'UNRWA : Minable, honteux, irresponsable

Le Conseil national a fait, hier,  ce que Netanyahou attend d'un parlement comme celui de la Suisse : être aux ordres, non du gouvernement du pays dont il est le parlement, mais aux ordres du gouvernement de l'Etat d'Israël. Qui avait déjà la semaine dernière interdit au chef de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, Philippe Lazzarini, d'entrer dans les territoires occupés, ou les forces israéliennes et les colons multiplient les ratonnades contre les villages, les quartiers et la population palestinienne. Et quelques jours plus tard, donc, sur proposition de l'UDC soutenue par le PLR et des "centristes", une motion a été votée à neuf voix de majorité, demandant la suppression totale des contributions suisses à l'UNRWA. Un vote minable, honteux, et surtout irresponsable : c'est l'UNRWA qui fournit l'essentiel de la logistique et de l'infrastructure permettant aux agences humanitaires d'opérer et d'assurer l'aide d'urgence, et aucune de ces agences, aucune ONG, pas même le CICR, qui n'a cessé de le répéter, ne peut s'y substituer.

"Mené par l'extrême-droite, Israël se suicide pour détruire la Palestine" Faut-il que la Suisse l'y aide ? 

La prestation calamiteuse de la PLR vaudoise Jacqueline de Quattro, lundi soir, à la télé romande, résumait le vote tout aussi calamiteux du PLR et d'une partie du Centre en faveur d'une motion de l'UDC demandant la suppression de la contribution suisse à l'UNRWA: "on ne sait pas". On ne sait pas à quoi sert l'UNRWA. On ne sait pas qui elle aide. On ne sait pas en quoi consiste son aide. On ne sait pas, vraiment ? On le sait : «Sans la participation de l’UNRWA, il n’est guère possible d’apporter de l’aide à Gaza» avait (tardivement) reconnu le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis. A Gaza, deux millions et demi de personnes sont tributaires de l'aide de l'UNRWA. C'est à Gaza qu'est destinée exclusivement l'aide à l'UNRWA qui avait débloquée par la Suisse. A Gaza et à l'aide d'urgence. Or l'UNRWA n'agit pas seulement à Gaza, elle agit aussi en Jordanie, en Syrie, au Liban, dans les territoires palestiniens occupés. Et c'est d'elle que dépendent, quand ils n'ont pas été purement et simplement détruits, tous les services essentiels à la vie des Palestiniens. Tout le monde le sait... sauf la droite suisse. Qui ne veut pas le savoir. Pas savoir que depuis onze mois, Gaza est bombardée sans répit. Le nombre des morts dépasse 40'000, dont 17'000 enfants. Pas savoir que  477 des 564 écoles de Gaza (c'est l'UNRWA qui est en charge du système scolaire gazaoui) ont été au moins endommagées, voire détruites, depuis le début de l'offensive israélienne. Et 45'000 enfants de six ans sont privés d'école. Pas savoir, se contenter des éléments de discours fournis par le gouvernement israélien et ses officines.

En adoptant la motion de l'udéciste appenzellois David Zuberbühler., et en faisant sien, en fait, le vieil objectif israélien de démantèlement pur et simple de l'UNRWA, a majorité du Conseil national demande donc à la Suisse de faire le contraire de ce que font ses voisins européens (et que le 19 juillet le nouveau gouvernement britannique a décidé de faire) : maintenir, ou rétablir, leur contribution à l'UNRWA. Et cette majorité le fait en accusant l'UNRWA d'être complice du Hamas ou noyautée par lui, accusation portée par le gouvernement israélien mais démentie par un premier rapport indépendant et une enquête interne des Nations unie, sans qu'aucun nouvel élément soit venu étayer les accusations israélienne à l’encontre d’une dizaine d’employés de l’agence sur les 3'500 qu'elle emploie à Gaza. Peu importe aux alliés helvétiques d'un gouvernement israélien d'extrême-droite conspué dans les rues israéliennes par des centaines de milliers d'Israéliens et d'Israéliennes dénonçant son abandon des otages, son  refus de toute négociation sérieuse pour les libérer et la poursuite d'une guerre menée non plus contre le Hamas mais contre la population civile de Gaza -mais aussi celle des territoires occupés. Cette population dépend de l'UNRWA pour vivre. Liquider l'UNRWA est donc le moyen, pour l'extrême-droite israélienne et ses alliés à l'étranger, de contraindre les Palestiniens à quitter la Palestine. Et d'y opérer une épuration ethnique -et biblique. Une nouvelle Naqba.

Le 15 août, le Conseil fédéral avait répondu à une motion de la majorité de droite de la commission de politique extérieure du Conseil national, motion demandant que l'aide accordée par la Suisse à l'UNRWA soit réaffectée à l'aide d'urgence. Le  Conseil fédéral avait approuvé cette année, avec le soutien des commissions des deux Chambres, le versement d’une première contribution de 10 millions de francs à l’UNRWA. Il a également rappelé que la Suisse a  soutenu une campagne de vaccination contre la poliomyélite à Gaza: «Ces dépenses concernent l’aide d’urgence, les biens de première nécessité et les vaccins, c’est-à-dire la couverture des besoins vitaux urgents». Et «sans la participation de l’UNRWA, il n’est guère possible d’apporter de l’aide». Il a rappelé que l’organisation dispose de 3500 employés dans la bande de Gaza contre 190 pour la Croix-Rouge et 29 pour le Programme alimentaire mondial. Pour cette même raison, le conseiller fédéral s’est également opposé en vain à une deuxième motion demandant de réaffecter la contribution à l’UNRWA directement à l’aide d’urgence en faveur de la population civile palestinienne.  qu'au contraire la Suisse doit continuer à soutenir l'UNRWA. Et il y a un mois, la Suisse avait condamné les propos du ministre israélien, d’extrême-droite, des Finances, Bezalel Smotrich, pour qui "laisser mourir de faim les habitants de la bande de Gaza pouvait être justifié et moral" pour faire libérer les otages, et ajouté que si Israël laissait entrer de l'aide humanitaire à Gaza (mais pas assez pour aider les Gazaouis à survivre), c'est qu'"on a pas le choix". Et le Département fédéral des Affaires étrangères de répondre qu'"affamer délibérément des civils est un crime de guerre" et que la Suisse attend "du Gouvernement israélien qu'il respecte le droit international humanitaire". Mais aujourd'hui, seule la chute de ce gouvernement peut répondre à cette attente.

"Mené par l'extrême-droite, Israël se suicide pour détruire la Palestine"  résume l'écrivaine libanaise Dominique Eddé. Faut-il que la Suisse l'y aide ? 












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