Modification de la loi genevoise sur les zones de développement : Quête de cens
Le 24 novembre, à Piogre, les citoyennes et citoyens de la capitale mondiale du monde mondial devront répondre à la question : êtes vous d'accord de rétablir en douce le scrutin censitaire ? Bon, évidemment, la question ne leur est pas posée aussi clairement, mais c'est de cela dont il s'agit : d'accorder aux propriétaires fonciers, individuels ou collectifs, le privilège de pouvoir déclencher une votation populaire sur un plan localisé de quartier sans devoir faire ce qu'on exige des non-propriétaires (la plèbe, quoi), et sans même que la commune ait pris position, ce qui, dans le processus référendaire actuel, ouvre déjà le droit à un référendum populaire.Un quarteron de proprios qui n'ont besoin ni de disposer des droits politiques, ni même de résider dans la commune concernée, passeraient ainsi avant le corps électoral de cette commune, pour la seule raison qu’ils sont propriétaires fonciers dans un périmètre concerné par un PLQ. Un retour au scrutin censitaire. Une première en Suisse, et, à Genève, un retour de 175 ans dans l'histoire de la démocratie...
Un contre-projet à la démocratie
Les plans localisés de quartier, qui détaillent les aménagements des quartiers dans les zones de développement, sont soumis à une obligation de concertation préalable à leur adoption par le Conseil d'Etat, sur préavis des Conseils municipaux. Ces préavis sont soumis au référendum facultatif, autrement dit au vote des citoyennes et des citoyens de la commune (y compris les étrangers qui, sous condition de résidence, disposent du droit de vote municipal). On est là dans un processus démocratique normal, où toutes celles et tous ceux qui ont le droit de vote peuvent l'exercer, de manière parfaitement égalitaire. La proposition qui est soumise au vote cantonal (et là, les étrangers qui disposaient du droit de vote au plan municipal n'en disposent plus) vise à donner plus de droits aux propriétaires concernés par un PLQ qu'aux autres habitants : ils pourraient à eux seuls provoquer une votation sans avoir besoin de lancer un référendum et de récolter des signatures, la qualité de propriétaire concernée suffisant -pour autant que la majorité d'entre eux soient opposés au PLQ : s'il y a 10 propriétaires concernés et que six sont opposés, ça suffit. Même s'ils n'ont pas le droit de vote. Même s'ils ne résident ni dans la commune, ni dans le périmètre concerné. Même s'il ne s'agit pas de personnes réelles, physiques, mais de personnes "morales" (entreprises, associations, fondations, acteurs publics...).
Ce projet régressif, qui alourdit, ralentit et
renchérit le processus de concertation et d'adoption des plans
localisés de quartier, fait suite à une initiative populaire des
propriétaires de villas, à laquelle le Grand Conseil avait
décidé d'opposer un contre-projet, mais que la majorité de
droite e rendu si peu "contre"qu'une fois adopté, l'initiative
avait été retirée, puisque ce qu'elle proposait était repris par
le soi-disant "contre"-projet, qui n'est finalement qu'un
contre-projet à la démocratie. On donnerait ainsi à un
"quarteron de proprios" le droit d'imposer non seulement un
référendum municipal (alors qu'il faut, dans les villes, des
centaines de signatures, et plusieurs milliers en Ville de
Genève, pour y arriver démocratiquement), mais d'imposer ce
résultat au Conseil municipal, qui actuellement délibère sur le
préavis de la commune (c'est le résultat de cette délibération
qui est actuellement soumis au référendum facultatif, dans un
processus démocratique normal). C'est ce droit "exclusif" des
propriétaires (notamment ceux de villas) qui est contesté par le
comité référendaire. Parce qu'il leur donnerait un droit que
n'ont pas les autres habitants et riverains locataires. Et qui
est totalement méprisant de l'intérêt général puisqu'il donne à des intérêts privés un pouvoir accru
dans l'aménagement du territoire dans un
canton où les logements manquent et où les terrains
constructibles sont rares, et où la zone villa occupe 46 % des
surfaces bâties en ne logeant que 10 % de la population.
Ce retour à une forme de suffrage censitaire (un
droit de référendum réservé à des propriétaires) est une
première en Suisse, que même le Conseil d'Etat à majorité de
droite trouve "inacceptable sur le principe", et douteux quant à
sa conformité au droit fédéral.
Fasse le vote du 24 septembre que cette première soit aussi une dernière...
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