Elections municipales genevoises : Une double majorité nécessaire

 

Dans trois semaines, les communes genevoises auront élu leurs Conseils municipaux et leurs Exécutifs, en totalité ou en partie (cette élection-là se jouera en deux tours), et les électrices et les électeurs ont reçu ou vont recevoir incessamment ou peu leur enveloppe de vote (les étrangères et les étrangers établis disposant du droit de participer à cette élection). Hier soir, "Léman Bleu" proposait un "grand débat" entre toutes et tous les candidats et les candidates au Conseil administratif de la Ville de Genève Un "grand débat" autour de quelques-uns des enjeux thématiques de ces élections, mais qui aura contourné l'enjeu de savoir quelles majorités  au Conseil municipal et au Conseil administratif sortiront des urnes :  de gauche ou de droite ? Au Conseil administratif, la gauche détient quatre sièges sur cinq. Au Conseil municipal, elle est majoritaire avec huit sièges de plus que la droite. Or il n'y a que là, au Conseil municipal, que la droite peut, éventuellement, espérer redevenir majoritaire (elle l'a plus souvent été que la gauche), ses ambitions pour le Conseil administratif se limitant à ravir un siège vert. Bref, l'enjeu est bien de savoir si la gauche conservera ou non la double majorité qui lui est nécessaire pour poursuivre la politique engagée depuis des années. Et faire jouer à la commune le rôle qu'elle est seule à pouvoir jouer, parce que par définition, la commune est le service public en actes : n’étant pas fauteuse de lois, sa seule réalité politique est celle de la mise à disposition de services, de la concrétisation de droits fondamentaux, de la matérialisation des discours politiques. La commune est le service public, parce qu’elle n’est rien d’autre –sauf à se nier en tant que commune.

Au cas où, du 5 au 9 mars, à Genève, à la salle Caecilia (23 r. Carteret), le spectacle "Louise" avec Charlotte Filou ressuscitera Louise Michel, et une discussion suivra sur l'héritage de la Commune (de Paris...) 

Réservations : https://caecilia.goshow.ch/louise/inscription

« Passer du gouvernement des hommes à l’administration des choses »

A l'élection du Conseil municipal, les trois partis de gauche présentent des listes apparentées (la gauche de la gauche ayant fort heureusement réussi à présenter une liste commune à toutes ses composantes) , et à l'élection du Conseil administratif socialistes et Verts présentent en commun les candidatures de Christina Kitsos (Maire en titre), Alfonso Gomez (Conseiller administratif sortant), Joëlle Bertossa et Marjorie de Chastonay. En face, la droite est divisée : aucun apparentement, seulement une liste commune au Centre et aux Verts libéraux. Et l'UDC, le MCG, LJS qui présentent des candidats dont la fonction est de "tirer" la liste et d'être présents dans les media.

La double majorité au Conseil municipal et au Conseil administratif, disions-nous, est indispensable pour que puisse se poursuivre une politique sociale, environnementale et culturelle répondant aux besoins et concrétisant les droits des 210'000  habitantes et habitants de la deuxième ville de Suisse. Une politique de justice sociale, de responsabilité environnementale, de pluralisme culturel, de respect et de concrétisation, sur le terrain, dans la réalité, des grands principes proclamés tant par la constitution genevoise que par la constitution fédérale, mais que les majorité de droite sévissant tant aux parlements qu'aux gouvernements du canton et de la Confédération privent de pans entiers de traduction réelle. Les communes, à Genève, où elles n'ont été instaurées que par le régime français en vigueur de 1798 à 1813, ont moins de compétences que partout ailleurs en Suisse. Et cela vaut pour celle de Genève comme pour les autres. Elles doivent au moins se battre pour garder celles dont elles disposent encore, mais elles doivent aussi se battre pour en conquérir de nouvelles. Et cela aussi, ou surtout, ou d'abord, vaut pour celle de Genève, qui fait déjà tout ce qu'elle peut faire dans un cadre légal et constitutionnel genevois qui tient du carcan, dans un canton qui ne cesse de la vouloir contraindre à un rôle d'exécutante de ses basses œuvres. Un rôle dont elle ne veut pas, et qu'elle a les moyens financiers et humains et la volonté politique (celle, précisément, de sa majorité de gauche), de contester -elle n'a pas hésité à le faire devant les tribunaux, pour se voir reconnaître le droit d'accorder des allocations de rentrée scolaire aux familles les plus modestes, par exemple.

La gauche de la Ville de Genève veut pouvoir continuer à "Agir pour une Genève solidaire, inclusive et durable". Sous cette formulation qui fleure bon sa langue de bois, il y a un programme dont des éléments essentiels ont déjà commencé à être mis en oeuvre, et dont précisément la droite remet en cause la mise en œuvre : la municipalisation progressive des institutions de la petite enfance, par exemple, mais aussi le renforcement du dispositif d'hébergement d'urgence , désormais intercommunal, le soutien à toutes les formes de mobilité douce et à la réduction du trafic motorisé au centre ville, l'usage du droit de préemption pour la construction de logements, le renforcement du pluralisme culturel par le renforcement des moyens accordés aux acteurs, aux lieux, aux champs culturels non institutionnels, et l'amélioration du statut et de la rémunération des artistes. Rien de tout cela n'aurait été possible sans une majorité politique pour le mettre en œuvre. Et rien de tout cela ne serait garanti si en Ville de Genève sévissait la même majorité qu'au Grand Conseil -une majorité au sein de laquelle mitonne d'ailleurs le vieux projet de supprimer purement et simplement cette commune de Genève (ce que les forces de l'Ancien Régime revenues au pouvoir en 1814 dans les fourgons de la Saint-Alliance avaient fait en 1815) qui a le toupet inimaginable de vouloir mener une politique qui réponde aux besoins de ses habitants plutôt qu'aux obsessions de la droite cantonale.

Le PS résume :  "Non, on ne gère pas une ville comme on gère une épicerie, non l’autre n’est pas le problème...). Oui, une redistribution des richesses est nécessaire, oui, une politique anticyclique est désirable en temps de crise et d’incertitudes telles que nous avons le grand malheur de les connaître, oui le combat pour un logement accessible et décent, pour le pouvoir d’achat des ménages, pour l’accès à l’emploi, à une retraite décente et à la formation est essentiel.

C’est, par cette définition de la commune selon les services qu’elle rend, dire en quoi nous importe la défense et l'élargissement de son autonomie, de sa capacité d’action et de sa primauté sur tout autre espace politique. Nous sommes « municipalistes » parce qu' à la question : qu’attend-on de la Commune ? nous répondons que nous en attendons ce qu’elle seule, parce qu'elle est le service public en actes, peut offrir sur le terrain, sans appareil de contrainte. 

Un projet politique que les vieux socialistes résumaient en une formule que nous faisons nôtre: «passer du gouvernement des hommes à l’administration des choses »

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