Concurrence dans le marigot xénophobe genevois

OPA du MCG sur l'UDC genevoise
Le MCG semble en être convaincu : à Genève, l'électorat UDC est à prendre, et avec lui une bonne partie des membres et des militants du parti blochérien genevois (« parti blochérien genevois » étant d'ailleurs le nom que le Conducator du MCG pensait donner à son parti au moment où il le créait). Et si le MCG est convaincu de pouvoir avaler l'UDC genevoise, c'est qu'il considère que la quête de respectabilité bourgeoise de la direction udéciste cantonale, l'épisode Soli Pardo digéré, n'est pas pour rien dans la perte de l'électorat populaire que le discours xénophobe et sécuritaire de l'UDC avait séduit -en recouvrant ses choix politiques ultra-libéraux d'un masque populiste. Le calcul du MCG, qui adresse d'ailleurs également d'énamourées oeillades « aux militants et aux représentants de mouvements de la gauche populaire qui sont les grands absents du parlement genevois actuel », n'est pas dénué de pertinence : le parti de Stauffer peut s'appuyer, à Genève, sur l'exemple tessinois : la Lega n'a certes pas avalé l'UDC tessinoise, mais elle l'a contrainte à n'être au Tessin que son appendice, quitte à ce que les élus fédéraux de la Lega fassent partie du groupe UDC aux Chambres fédérales, faute de pouvoir constituer un groupe indépendant avec des alliés -du genre MCG, précisément. Les élections de 2011 permettront de vérifier la pertinence des calculs du MCG. En attendant, on s'autorisera à ne pas bouder son plaisir au spectacle des deux crocodiles de la droite populiste se disputant le marigot xénophobe et sécuritaire local.

« A Droite Toute ! »
Aux élus et aux membres de l'UDC genevoise, le MCG lance un appel ironique : quittez votre Titanic politique avant qu'il ait sombré. Que la section cantonale d'un parti national (l'UDC) qui pèse autour de 30 % des suffrages disparaisse corps et biens après s'être fracassée contre l'iceberg de sa propre insignifiance politique reste toutefois une hypothèse très optimiste : le statut de parti national de l'UDC peut maintenir à flot son esquif genevois, et un accord entre MCG et UDC (la formation d'une sorte d' « A droite toute ! » au flanc tribord de l'Entente, comme il est encore une « A gauche toute ! » au flanc babord de l'Alternative...) pourrait calmer le jeu, les thèmes porteurs et les réflexes fondamentaux du MCG et de l'UDC étant les mêmes (le sécuritarisme, la xénophobie, l'europhobie, le poujadisme fiscal)... mais l'OPA du MCG sur l'UDC genevoise inquiète suffisamment l'UDC suisse pour qu'elle ait dépêché à Piogre une triplette de baillis (Blocher, Baader, Baltisser) pour tenter de remettre de l'ordre dans le foutoir local, les petits chefs de l'UDC genevoise s'empressant d'annoncer qu'ils feraient ce que les grands chefs de l'UDC suisse leur ordonnent de faire. Cela étant, l'offensive staufférienne sur l'UDC permet de situer le MCG dans le paysage politique : S'il ne cesse de se proclamer « ni de gauche, ni de droite », c'est bien sur la droite de la droite genevoise que le MCG lance une offensive (même s'il drague également les militants et les représentants de la « gauche populaire »). Ce sont bien l'UDC d'abord et l'Entente ensuite qui ont été les principales victimes du succès électoral du MCG l'automne dernier. Mais comme ces élections ont également été marquées par la progression de la « gauche de la gauche » (au total des deux listes issues d'« A Gauche Toute ! »), c'est bien à une victoire, sur les partis gouvernementaux, de deux oppositions, celle incarnée par le MCG et celle de gauche (AGT), qu'on a assisté, et c'est bien sur le terrain de l'opposition que le MCG a gagné et qu'il peut encore encore gagner sur l'UDC, tant qu'il ne s'aligne pas sur elle. Opposé à un tel alignement, le député MCG Mauro Poggia estime qu' « on ne peut pas se battre pendant des mois pour dire qu'on n'est pas d'extrême-droite et aller serrer la main de Christoph Blocher ». Mais si, mais si, on peut. Faut juste se laver et s'essuyer les mains après.

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