Petit concours pré-électoral de xénophobie très ordinaire

La droite suisse vidange avant Noël

A quelques jours d'intervalles, l'UDC d'abord (à tout seigneur et en cette matière, tout douteux honneur), le PRD ensuite, ne faisant d'ailleurs que ce qu'il fait depuis bientôt dix ans -courir derrière son concurrent de droite et s'accrocher à son maillot pour tenter de ne pas être distancé par lui, se sont lancés pour leur petit Noël dans le concours pré-électoral de xénophobie ordinaire, inauguré par l'adoption de l'initiative udéciste sur le « renvoi des criminels étrangers » . L'UDC propose d'instituer des examens de maîtrise d'une langue nationale (du moins suppose-t-on qu'il s'agit d' « une » des langues nationales, mais le doute s'installe, Christoph Blocher n'ayant évoqué que « notre langue » -ne s'agirait-il que du züritütsch ?) préalable à l'octroi d'une autorisation de séjour aux étrangers non ressortissants de l'Union Européenne. Accroché aux basques de l'UDC, le PRD a certes ajouté sa petite louche à cet épandage, mais c'est bien dans la même fosse septique que tous ces vidangeurs puisent leur engrais électoral

Pisser dans un violon pour l'entendre chanter aux élections

A dix mois des élections fédérales, le même concours qu'il y a trois ans est ouvert : un concours de xénophobie ordinaire, et de propositions de la tartiner en une couche supplémentaire de xénophobie d'Etat. Souvenez-vous : « La période des élections (fédérales 2007) a été particulièrement stigmatisante à l'égard des étrangers » (et des étrangers en général, plus seulement les migrants ou les requérants d'asile), avait judicieusement constaté une équipe de l'Université de Zurich, mandatée par la Commission fédérale contre le racisme pour analyser 3500 articles et annonces de presse parus entre fin juin et la mi-octobre 2007. Conclusion (en forme d'enfoncement de porte ouverte, certes, mais il y a des évidences qu'il faut accepter de devoir enfoncer à coups de maillets dans des têtes réfractaires) : les étrangers sont devenus le thème central de la campagne, à partir d'une image négative (relayée par les media) les assimilant à des criminels au moins putatifs. Comme les jeunes, d'une part, et les musulmans, d'autre part, ont également été stigmatisés, on se doute de la qualité de l'image donnée des jeunes musulmans étrangers. L'UDC a occupé à elle seule 38 % de l'espace médiatique analysé, publié 29 % de toutes les annonces publicitaires parues pendant la période et produit 73 % des références négatives aux étrangers, à quoi les media proches de l'UDC et de la droite radicale (notamment les hebdos Weltwoche et NZZ am Sonntag y ont ajouté 7 %. Et donc, ça recommence, et toute la droite s'y met. L'UDC propose de faire passer des tests de langues dans les ambassades suisses avant d'accorder une autorisation de séjour aux ressortissants non-européens qui la demandent, puis un deuxième test, plus exigeant, en Suisse pour pouvoir y rester (on se réjouit de voir les directeurs des multinationales anglo-saxonnes être contraints à ces tests, et d'entendre à ce sujet les organisations patronales helvétiques). Puis, le PRD s'y est mis -lui propose de réduire de moitié l'immigration extra-européenne et de durcir les conditions du regroupement familial. On attend les propositions du PDC, sans se faire trop d'illusions sur sa capacité à résister à l'envie de suivre le mouvement (il y a un an, il avait déjà demandé le réexamen des naturalisations en cas de non respect des valeurs helvétiques, une charte de ces valeurs, supposées être fondamentales, devant être respectée par les candidats à la nationalité suisse, les « Suisses de souche » n'étant évidemment pas tenus à cette palinodie). Point commun de toutes les propositions de la droite : elles auraient pour effet d'accroître le nombre des immigrants clandestins, puisque c'est une évidence que plus les conditions d'octroi d'un statut d'immigrant légal sont sévères, plus la tentation de s'y soustraire est grande, et leur contournement fréquent. Mais peu importe aux auteurs de ces propositions : pisser dans un violon le fait chanter cette petite musique électorale dont l'UDC se berce depuis 20 ans -sans qu'il y ait, bien au contraire, un immigrant, légal ou non, européen ou non, de moins en Suisse.

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