« Papier de position » du PS suisse sur la « politique migratoire » : Renvoi genevois à l'expéditeur


Les socialistes genevois (le parti municipal de la Ville et le parti cantonal) proposeront au congrès du PSS, en septembre prochain à Lugano, de refuser d'entrer en matière sur le «papier de position» en matière de politique migratoire, proposé par la direction du parti Si les socialistes genevois reconnaissent parfaitement la nécessité pour le Parti Socialiste de se doter d'un texte programmatique sur la «politique migratoire», ils en attendent qu'il exprime, précisément, une position, des propositions, un programme socialistes, et non la reprise adoucie des propositions, et pire encore :  des stéréotypes et des amalgames produits et entretenus par la droite et l'extrême-droite.

La migration : ni une question ethnique, ni une question sécuritaire - une question sociale...

Créé il y a un siècle et quart par des militants suisses, mais surtout étrangers réfugiés en Suisse pour y poursuivre leur combat politique après les défaites des révolutions européennes, se revendiquant encore comme partie prenante d'un mouvement international pour l'émancipation des peuples, la défense et l'extension des droits fondamentaux, l'égalité dans l'accès à ces droits la solidarité avec celles et ceux qui combattent pour eux,  le Parti Socialiste devrait refuser les amalgames, les stéréotypes, les confusions mentales et politiques qui nourrissent la xénophobie, favorisent les entreprises de l'extrême-droite xénophobe et imprègnent les prises de positions de la droite parlementaire.

Or le texte qui proposé aux socialistes comme programme de « politique migratoire » légitime, en les reprenant, les falsifications rhétoriques xénophobes : parler d'«immigration massive» en Suisse aujourd'hui est une falsification de la réalité. La confusion des termes est constante dans le texte de la direction du PSS : c'est ainsi, par exemple, qu'on y confond réfugiés et requérants d'asile ou étrangers et immigrants alors qu'un nombre considérables d'étrangers habitant en Suisse y sont nés, et n'y ont donc pas immigré, et que par ailleurs des milliers d'immigrants ne sont pas étrangers mais sont des Suisses venus, ou revenus, de l'étranger, parfois chassés par les crises économiques et politiques, voire les conflits militaires. Formellement, ce texte est donc déjà inacceptable. Mais il est aussi fondamentalement, parce qu'il évacue toute réflexion sur les causes des migrations, qu'il ne fait aucune référence au programme général du parti comme si les « questions migratoires » étaient hors du champ de ce programme ou qu'elles devaient être traitées en l'oubliant, qu'il met au premier plan la dimension économique de l'immigration au lieu de la dimension politique et éthique, et que ce faisant, il reprend du patronat tout le discours utilitariste sur le « besoin d'immigrants » en tant que main d'oeuvre nécessaires aux entreprises suisses. Or comme l'écrivait déjà Max Frisch : quand « on fait venir des bras, ce sont des hommes qui viennent » !

La Liberté, la Justice, la Solidarité : telles sont supposées être les valeurs fondamentales du socialisme, que rappellent d'ailleurs le programme du PSS « Pour une démocratie économique d'orientation sociale et écologique ». Ces trois valeurs doivent déterminer la réponse que les socialistes vont donner à chaque question politique, et les propositions qu'ils font sur chaque enjeu politique. La migration est l'un de ces enjeux, la réponse socialiste à cet enjeu ne peut  donc se fonder que sur la liberté, la justice et la solidarité -ou cesser de se prétendre socialiste.

La question de la migration n'est ni une question ethnique, ni une question nationale, ni une question sécuritaire, c'est une question sociale, à laquelle la réponse ne peut être donnée que par la politique sociale, tant il est confirmé par toute l'expérience accumulée depuis des décennies que les entraves légales à l'immigration ne produisent jamais qu'une immigration illégale accrue et que la répression du séjour illégal n'étend jamais que le séjour clandestin...

Nous avons, dans tout programme politique portant sur les migrations, à concilier deux droits fondamentaux : la liberté de circulation et la protection sociale. Or on ne les conciliera pas en faisant passer l'un avant l'autre, mais en les conjuguant. l'un à l'autre, comme doivent se conjuguer la liberté et l'égalité, à moins de réduire la première à celle des plus forts et la seconde à celle qui règne dans les cimetières.

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