Soutenir les mouvements sociaux pour qu'émerge une alternative

Partout dans le monde la pression s'accroît sur les mouvements populaires, les mouvements sociaux, les syndicats, lorsqu'ils s'opposent aux politiques d'austérité, et combattent les choix des pouvoirs politiques et économiques. Cette pression, et la répression qui l'accompagne, n'a pourtant pas conduit ces mouvements à cesser de lutter -mais pour poursuivre leur combat, ils ont plus que jamais besoin de solidarité, et d'un soutien matériel. Le Solifonds lance dont un appel de fonds pour financer l'assistance juridique à ces mouvements, l'information sur leurs luttes, l'aide à la mobilisation de celles et ceux qu'ils défendent.

La force du mouvement social ailleurs, sa faiblesse ici, et la nécessaire solidarité partout...

D'une soirée passée à débattre, hier, avec un militant de l'Union pour l'habitat populaire de São Paulo du mouvement social qui, dans cette ville dont la population dépasse celle de la Suisse entière, lutte pour le droit à la Ville, le droit au logement, l'autogestion et l'autoconstruction de l'habitat, nous retirons d'abord, en comparant la force de ce mouvement et la faiblesse de ceux qui aujourd'hui tentent de se constituer chez nous, un sentiment d'urgence. Non que les situations soient les mêmes à São Paulo et à Genève, mais parce que les maux et les adversaires sont les mêmes : la spéculation foncière, la négation du droit au logement, le mépris des habitants, l'utilisation du prétexte de nouvelles infrastructures (ou, comme à Cornavin, de la modernisation d'anciennes) pour chasser (ou changer par la « gentrification ») les populations des quartiers populaires (les favelas au Brésil, les Grottes à Genève)... Cette faiblesse des mouvements sociaux ici, comparée à leur force ailleurs, a pour conséquence première de laisser les victimes du système (les expulsés de leur logement, par exemple) seules face à la machine (les propriétaires, le huissiers, la police) qui les broient, quand l'existence d'un fort mouvement social en lequel elles s'inséreraient les protégerait mieux que toutes les lois: dans les années trente, à Genève, nous rappelait Rémy Pagani hier soir, les syndicats et le comité de chômeurs se mobilisaient pour empêcher les expulsions, ou récupérer les appartements après le passage des huissiers... aujourd'hui, l'expulsé-e est seul-e devant la porte de son appartement vidé, à la serrure changée...

Ce dont il s'agit, ici comme à São Paulo, c'est du droit à la ville, non à la ville comme agglomérat d'individualités, de routes et de commerces, mais à la ville comme espace collectif où tous les droits fondamentaux se conjuguent. Il se trouve que ce droit, à São Paulo, est porté par un puissant mouvement social, mais qu'il n'est encore à Genève porté que par nos discours. Il se trouve aussi que le mouvement social de São Paulo est partie prenante d'un mouvement national qui fédère les mouvements locaux et régionaux, et qui est lui même fédéré aux autres mouvements nationaux dans une coordination continentale, alors que les mouvements sociaux dans nos pays peinent même à se coordonner régionalement. Et donc peinent à être, dans leur isolement et leur localisme, porteurs d'une alternative, et même d'une résistance efficace.

Le Solifonds lance un appel au soutien des mouvements sociaux dans le monde. Et donne des exemples à l'appui de l'urgence d'un tel soutien :
- Au Paraguay, on fait semblant d'avoir préservé la démocratie après la destitution du président Lugo, et on a donc maintenu les élections prévues le 21 avril de l'année prochaine. Le putsch contre Lugo est passé aux oubliettes, et la répression des mouvements sociaux (en particulier celle des paysans sans terre) se pourszuit sans que les media n'en soufflent mot;
- Au Pérou, c'est contre les oppositions à l'empoisonnement de l'environnement par des mines de cuivre que la répression s'acharne;
- Au Zimbabwe, ce sont des milliers de personnes qui risquent d'être chassées de leurs terres par la production d'éthanol;
- au Pakistan, c'est le syndicat des ouvrières et ouvriers du tissage qui fait face à l'armée et à la police;
- en Colombie, les actions des syndicats, des mouvements sociaux et des organisations de défense des droits humains sont criminalisées au nom de la « sécurité démocratique »...
... etc, etc....
Les mouvements ainsi confrontés à la répression mérite plus que notre admiration silencieuse : ils ont besoin de notre soutien.  Parce que l'alternative à la marche funèbre du capitalisme financier, c'est d'eux, de ces mouvements sociaux, qu'elle viendra. Même en Suisse. Et que les soutenir, c'est donc permettre l'émergence de cette alternative, qu'il serait parfaitement illusoire d'attendre de quelque gouvernement que ce soit. Même de gauche.

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