Fonds de tiroir

Selon une enquête de l'Université et de l'Ecole polytechnique de Zurich, près de 60 % des salariés en Suisse reconnaissent être parfois improductifs au travail, parce qu'en train de rêvasser. En outre, un quart des salariés reconnaissent avoir transmis des informations confidentielles concernant leur entreprise, et un septième avoir volontairement accumulé du retard dans leur travail pour pouvoir le rattraper en heure supplémentaires mieux payées. Et avec tout ça, la majorité des salariés de ce pays se disent satisfaits de leur travail. Ce qui confirme ce qu'on ne cessera ici de prêcher:  flemmer, cancaner et traîner au boulot, c'est la recette du bonheur professionnel.

Vendredi après-midi, dans la froidure, on manifestait pour exiger du Grand Conseil qu'il accepte la recevabilité de l'initiative syndicale contre le dumping salarial, que la droite et le Conseil d'Etat voulaient invalider partiellement au motif de sa « partialité »  (l'initiative prévoyant la création d'une inspection des entreprises, chargée d'enquêter sur les cas de sous-enchère salariale, et formée uniquerment de représentants des travailleurs). Ben on a été entendus là où on ne pensait trouver que des sourds : à l'UDC. On savait que la gauche allait soutenir l'initiative (elle en venait), mais il était attendu que l'UDC rejoigne le PLR et le PDC pour l'invalider (le MCG ne pouvant le faire, la dénonciation de la sous-enchère salariale dont il rend les frontaliers seuls responsables étant de son fonds de commerce). Mais voilà : deux jours avant, le Conseil d'Etat avait proposé d'invalider aussi, partiellement, une initiative de l'UDC pour une traversée routière de la rade (en tunnel). Et l'UDC n'a pas apprécié. Et donc, pour se venger, elle a voté à gauche. Na ! Et du coup, pour l'en remercier, la gauche a fait en sorte de propulser un UDC, Eric Bertinat, plutôt qu'un PLR, à la présidence de la commission parlementaire d'enquête sur les «dysfonctionnements» de la Cour des Comptes. Quand la tactique parlementaire est aussi limpide que le code d'honneur des bandits corses ou le kanûn albanais, on comprend tout de suite mieux...

Au Qatar, un poète a été condamné à la prison à vie, au terme de six audiences généralement secrètes, pour avoir soutenu les soulèvements du «Printemps Arabe» et critiqué le régime de l'Emir. Lequel régime et lequel Emir ont survécu par la répression à ces printemps et à ces critiques, et règlent leurs comptes. N'empêche : qu'un régime politique aient encore les poètes en assez haute estime pour les envoyer en prison le restant de leur jour, si c'est pas rassurant pour les libertés, c'est rassurant pour les hiérarchies culturelles. Le monde est donc divisé en deux : les sociétés où les poèmes font gagner l'éternité aux  poètes et les sociétés où ils leur font prendre perpétuité...

« Débandade chez les élus municipaux » , titre le « GHI »  de mercredi dernier, à propos de la masse de démissions de Conseillères et conseillers municipaux enregistrés lors de la législature 2007-22, et depuis 2011. Selon la Chancellerie d'Etat, plus de la moitié des élues et élus municipaux de 2007 avaient été remplacés en 2011 (450 remplacements), et en un an et demi de la nouvelle légistalure, 247 conseillères et conseillers municipaux ont du être remplacés, la plupart sur démission. Dans les communes de Meyrin, Onex et Chêne-Bourg, le tiers des parlements municipaux avait été remplacé entre 2077 et 2011. A Thônex, après un an et demi d'une législature de quatre ans, c'est déjà le tiers du Conseil Municipal qui a démissionné, dont deux élus du MCG qui n'ont toujours pas été remplacés par leur parti depuis cinq mois. Explications de cette hémorragie, recueillies par l'hebdo gratuit : la charge est trop lourde, prend trop de temps, l'environnement politique est trop stressant, la reconnaissance sociale n'est plus ce qu'elle était. Et la professeure de politique locale Katia Horber-Papazian de conseiller aux élus de « faire preuve à l'avenir d'un engagement sans faille », « d'être en mesure de très bien réseauter »  et d'être « très bien formés », même si « les élus genevois sont déjà parmi les mieux formés du pays ». C'est ce qu'on se dit d'ailleurs à chaque séance du Conseil Municipal ou de ses commissions : Putain, ce qu'on est bien formés... Mieux, ce serait carrément trop.

C'est « Le Courrier » du 29 novembre qui nous l'apprenait : pour trouver 27 millions d'« économies » en 2013 et cinquante millions d'ici 2015, les Hôpitaux Universitaires de Genève ont payé six millions au groupe Boston Consulting, qui fait dans le conseil (pas gratuit) aux entreprises, et qui a concocté le désormais célèbre plan Perquatremance («  Per4mance », en sabir de consultant qui tente de faire dans le jeu de mot dans la seule langue qu'il est à peu près capable d'utiliser). Le même groupe avait déjà pondu pour quatre millions de francs en 2008 un plan d'économie (« Victoria ») de 80 millions, qui avait abouti à la suppression de 350 postes. On voit donc que les « per4mances » de Boston machinchose baissent : il y a cinq ans, il permettait des économies vingt fois plus importantes que le pognon qu'il recevait pour les proposer, aujourd'hui, il ne permettrait plus que des économies cinq ou dix fois plus importantes que ses honoraires. La « nouvelle gestion hospitalière » sert donc moins à améliorer les « per4mances » de l'hosto qu'à améliorer l'ordinaire des « 6ultants » de Boston truc...

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