Travailleurs de la terre en Afrique du Sud : En finir avec le servage !

Il y a trente ans était créé en Suisse le Solifonds (Fonds de solidarité pour les luttes de libération sociale dans le tiers-monde). La première action de cette organisation, fondée par le parti socialiste, les syndicats et des mouvements de solidarité internationale, fut de soutenir les syndicats sud-africains, en un temps où régnait encore l'apartheid, ou Nelson Mandela était encore en prison, où 87 % du territoire sud-africain était aux mains de « blancs » ne représentant que 15 % de la population. Trente ans plus tard, alors que l'Apartheid a été aboli, que Nelson Mandela, devenu président en sortant de prison, a été honoré du Prix Nobel de la Paix, que l'Afrique du Sud est gouvernée par le Congrès National Africain (ANC), fer de lance de la lutte contre l'apartheid, seuls 6 % des terres ont été redistribuées et les ouvrières et ouvriers agricoles travaillent toujours dans des conditions  s'apparentant au servage...

Debout, les damnés de la terre...

Sitôt créé il y a trente ans, le Solifonds avait lancé sa première campagne : un soutien aux syndicats africains (c'est-à-dire organisant des travailleurs « noirs ») du textile et de la métallurgie d'Afrique du Sud, lors d'une grève contre l'entreprise Alusaf (en mains suisses pour 22 %). L'apartheid régnait alors. Et le même Solifonds remet la compresse, trente ans plus tard, en appelant au soutien des syndicats des ouvrières et ouvriers agricoles d'Afrique du Sud. Parce que le mouvement qu'ils ont lancé pour obtenir des salaires leur permettant de vivre dignement est réprimé par les propriétaires terriens... et par le gouvernement de l'ANC -le parti de la lutte contre l'apartheid... Le Solifonds relance donc une action de solidarité avec les syndicats des travailleuses et travailleurs de la terre sud-africains.

Depuis le 6 novembre dernier, parti de la petite ville de De Doorns, un mouvement se développe et s'enracine, à la surprise partagée des propriétaires terriens (ou fermiers) employeurs des travailleurs agricoles et du gouvernement,  pour un salaire minimal de 16 francs par jour, dans un contexte de précarité sociale absolue, face à un système quasi féodal, en l'absence, au départ du moins, de syndicats. Ce refus grandissant de continuer à subir des conditions de travail, de vie et de salaire indignes est d'abord le fait des jeunes et des femmes, qui mènent depuis quatre mois des actions (grèves, blocages d'autoroute, manifestations, marches) que le gouvernement de l'ANC réprime : un manifestant a déjà été tué, de nombreux autres blessés, et plus d'une centaine arrêtés.
Pour les « damnés de la terre » sud-africains, rien, ou presque, n'a changé depuis l'abolition de l'apartheid en 1994, alors même que les lois ont été bouleversées. En 1913, le Native land act avait attribué 80 % des terres d'Afrique du Sud aux 20 % de population «blanche», et la population « noire » fut progressivement parquée dans des banlieues-ghettos des grandes villes, et dans des réserves, les bantoustans. 90 ans plus tard, et trente ans après la fin de l'apartheid, moins de 6 % des terres que les « blancs »  avaient accaparées ont été restituées aux « noirs », et la réforme agraire promise n'a en réalité jamais été faite.  Les travailleuses et les travailleurs agricoles dépendent toujours totalement, comme des serfs, de leurs employeurs. Le salaire minimum, déjà très bas (7 francs 50 par jour...) n'est pas respecté, et on contraint ceux qui doivent s'en contenter à acheter avec cette aumône des produits alimentaires chez leur employeur, qui les leur vend à des prix surfaits -et qui leur fait en outre payer un loyer pour des logements qui tiennent du taudis. Et depuis 1994, plus d'un million de personnes, en majorité des ouvrières et ouvriers agricoles, surtout les plus âgés, ont été chassés, sans que le ministère du Travail, chargé de faire respecter des lois interdisant en principe cette pratique, fasse quoi que ce soit -quand il ne prend pas fait et cause pour les employeurs.
Une coalition d'ONG, d'organisations populaires et de syndicats s'est formée pour apporter un soutien aux travailleuses et travailéleurs agricoles en lutte pour leurs droits à vivre dignement de leur travail -mais cette coalition est elle-même dépourvue des moyens nécessaires. Elle a donc fait appel au Solifonds pour un soutien financier afin de coordonner les comités locaux, renforcer la solidarité, développer l'information afin de faire connaître les causes de ce qui est devenu un véritable soulèvement des « damnés de la terre »  sud-africains.

C'est pour apporter ce soutien que le Solifonds a aujourd'hui besoin du nôtre : SOLIFONDS, Case postale, 8031 Zurich, mail@solifonds.ch, www.solifonds.ch Compte postal 80-7761-7

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