Fonds de tiroir

Donc, après le vote imbécile du 9 février, l'Union Européenne a annoncé le « gel » des négociations avec la Suisse sur la participation helvétique aux programme de recherche européens et à la mobilité des étudiants (Erasmus). Il s'en est suivi une mobilisation des recteurs des universités, des organisations étudiantes, des écoles polytechniques, pour éviter de se retrouver dans le situation antérieure à ces accords, celle d'un «pays tiers », qui exclut que des universités suisses dirigent des programmes de recherche. Les Polys de Zurich et Lausanne traités comme l'Université de Ouagadougou, la honte... En plus, ces mesures frapperaient des composantes de l'électorat (les universitaires et les villes universitaires -sauf Lugano) qui ont massivement repoussé l'initiative udéciste. Mais au fond, c'est plutôt malin de la part de l'UE de taper là où ça fait mal aux milieux détenant le plus de pouvoir : c'est vrai que les populations agrestes des Waldstaetten s'en foutent un peu, d'Erasmus et de la recherche universitaire, mais pas les milieux dont les « princes qui nous gouvernent » sont les plus proches... Mais on sait jamais : il y a certainement des électeurs de l'UDC dont les enfants vont à l'Université, ou y travaillent, et voulaient bénéficier des programmes européens... Enfin, c'est pas si mal, pédagogiquement, de mettre en évidence les conséquences de nos conneries : elles plaisent beaucoup à l'extrême-droite européenne, mais c'est pas l'extrême-droite européenne qui va les payer : ce sont les Suisses eux-mêmes.

Il avait de bonnes idées, l'ambassadeur de Suède en Suisse, pour convaincre le bon peuple helvète d'accepter l'achat des avions de combat suédois «Gripen»: « plus nous ferons les gros titres sur la Suède, plus nous pourrons démontrer nos partenariats, mieux ce sera », écrivait-il dans un rapport à son gouvernement. Et d'évoquer, pêle-mêle, un festival de littérature enfantine suédoise à Genève, une promotion culinaire dans les magasins Globus, des conférences au centre d'électronique et de microtechnique de Neuchâtel et au Poly de Lausanne... tout et n'importe quoi, pourvu que ça parle de la Suède -et pas d'avions de combat. Manquait plus qu'un concert revival d'Abba. Bon, il a été freiné dans ses élans par le Département de la Défense, l'ambassadeur, mais son activisme a quand même eu un effet : dissuader le PDC de prendre la tête de la campagne pour le Gripen. Ils n'aiment pas le saumon à l'aneth, les démo-chrétiens ? Ou c'est parce que les Suédois sont luthériens ?

La « libre circulation » n'est pas à sens unique : des Suisses en profitent aussi, par dizaines de milliers. En 2012, 105'000 ressortissants de l'Union Européenne (ou de l'AELE, impliquée dans la « libre circulation ») se sont établis en Suisse et 50'000 Suisses dans l'Union Européenne (ou l'AELE), 40'000 ressortissants d'Etats tiers (hors UE ou AELE) se sont établis en Suisse et 20'000 Suisses dans des Etats tiers. La balance migratoire penche certes, pour la Suisse, du côté de l'immigration, mais rapportés à la population respective de la Suisse et des pays d'où viennent les immigrants, elle penche lourdement du côté de l'émigration : la proportion de Suisses s'établissant hors de Suisses est, évidemment, incomparablement plus élevée que celle d'Européens s'établissant en Suisse. 430'000 Suissesses et Suisses sont établis dans des pays de l'Union Européenne. Notre pays reste donc un pays d'émigration, temporaire, durable ou définitive, dans le temps même où il est aussi un pays d'immigration : plus de 1,5 % de la population suisse de la Suisse qui quitte chaque année la Suisse, c'est pas rien...Bon, l'UDC et le MCG nous expliqueront que c'est rien que des traîtres, mais ça en fait quand même beaucoup, de traîtres, 60'000 par année, et près d'un demi-million rien que dand les pays de l'ennemi héréditaire (l'Europe, donc)...

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