Transports publics genevois, fonction publique, budget du canton : SchwarzPeter in Genf
Demain, comme nul en Romandie ne peut l'ignorer, les Transports
Publics Genevois devraient être en grève, malgré un début de négociation «
encourageant », selon les syndicats. « Qui pilote le droit de grève
dans les services publics et aux TPG ? », s'interrogent la Communauté
genevoise d'Action Syndicale et le Cartel Intersyndical des services
publics. Réponse : personne. Les syndicats négocient, organisent la
grève, exercent le droit de grève -mais leurs interlocuteurs,à
commencer par le gouvernement,, jouent à propos de la grève comme à
propos du financement du service public, au très vieux jeu du «
SchwarzPeter », où il s'agit de se débarrasser le plus vite possible
d'une carte (le « Pierre noir ») en la refilant au voisin. Le
gouvernement renvoie les syndicats au Conseil d'administration des
TPG, ou à leur direction qui les renvoie au Conseil
d'administration, avec qui les syndicats négocient mais qui les
renvoie quand il peut au parlement ou au gouvernement qui les
renvoie au parlement qui les renvoie au gouvernement. Lequel est lui
aussi, dans ce conflit comme dans d'autres, en grève. Mais depuis un
an. Et sans aucun service minimum.
Demain jeudi, à 16 heures 30, devant l'Hôtel-de-Ville,
à l'appel de tous les syndicats genevois, on se rassemblera pour
soutenir la grève des TPG et les actions de défense du service
public. Y'a urgence.
« C'est pas moi, c'est ma soeur, qu'a cassé la machine à vapeur »
Réduire la fréquence et l'étendue horaires des transports publics,
réduire des lignes, en fusionner d'autres, supprimer des postes de
travail, licencier du personnel : ce serait à Genève, selon le
Conseil d'Etat et la majorité parlementaire, le prix à faire payer
aux Genevois pour avoir décidé d'une baisse des tarifs des TPG. Le
Conseil d'administration de la régie, les syndicats et la gauche ont
bien essayé de proposer une alternative à cet élagage (dont une
augmentation de la subvention publique), la droite gouvernementale
et parlementaire n'en a pas démordu : il faut faire payer aux TPG la
baisse de leurs tarifs. Après quoi, la riposte des syndicats étant
la grève de la semaine dernière et celle de demain, il n'y eut plus
personne pour assumer, dans la gestion du conflit comme dans le
débat politique, les responsabilités du gouvernement (et du
parlement). Or elles sont déterminantes, ces responsabilités.
La direction des TPG est sous l'autorité du Conseil d'administration
des TPG, qui est sous tutelle politique du Conseil d'Etat, qui doit
rendre compte au parlement. Jusque là, on est dans une répartition
des tâches normale, qui permettrait aux uns et aux autres de faire
leur boulot s'ils avaient la moindre intention de le faire. Or les
syndicats en sont à demander au Conseil d'Etat, de « désigner un
interlocuteur pour s'exprimer au nom du gouvernement et ouvrir de
véritables négociations ». Parce que d'interlocuteur crédible, les
syndicats n'en ont pas. Ou en ont tellement d'incrédibles se
renvoyant la balle les uns aux autres que les syndicats eux-mêmes
sont en ce moment le seul acteur de ce conflit à faire leur travail,
à avoir une position cohérente et à l'assumer.
La Communauté d'action syndicale et le Cartel syndical résument : «
le Conseil d'Etat énonce des principes généraux pour la galerie mais
s'empresse d'actionner la prétendue autonomie d'un établissement
public autonome pour briser une grève qui demeure l'expression d'un
malaise profond et d'un vide de dialogue social ». Et surtout
l'expression de la nécessité, pour les salariés des TPG comme de
l'ensemble des services publics, de se battre pour la défense à la
fois de leurs propres droits et du service public en tant que tel,
non pas face au Conseil d'administration ou à la direction des TPG,
mais face au Conseil d'Etat et au Grand Conseil, le premier étant
seul à pouvoir retirer (pour le réviser) le contrat de prestation
que le Grand Conseil doit avaliser demain, et le second seul à
pouvoir, précisément, l'avaliser. Or c'est ce contrat qui est cause
du conflit, parce que c'est ce contrat (soutenu par un Conseil
d'Etat aux abonnés absents, et par une majorité parlementaire
MCG-UDC-PLR-PDC qui n'en a rien à secouer des transports publics)
qui implique une réduction des prestations des TPG, la suppression
d'une centaine d'emplois, le licenciement d'une soixantaine
d'employés. On notera malignement au passage que Conseillers d'Etat,
députés, membre du Conseil d'administration et de la direction des
TPG, tous bénéficient de la gratuité des transports publics genevois
(voire suisses)...
Vous pensiez avoir élu des gouvernants ? Vous avez engagé des mimes.
Très doués pour les postures avantageuses, la mentonnière virile, le
geste auguste du magistrat dictant les lois... mais c'est tout : au
premier conflit, sous la toge du consul, on retrouve l'écolier
essayant de refiler la punition à son copain « c'est pas moi,
M'sieur, c'est l'autre ». En Barthassat dans le texte : « Que les
syndicats se débrouillent avec le Conseil d'administration, après on
verra ».
Parce que « c'est pas moi, c'est ma soeur, qu'a cassé la machine à
vapeur »...
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