Initiative socialiste contre les allégements fiscaux accordés aux multinationales : La parole sera au peuple...

Le PS genevois a décidé, en assemblée générale, de ne pas retirer son initiative populaire « Pas de cadeaux aux multinationales - pour la suppression des allégements fiscaux », lancée en septembre 2011 et qui avait abouti avec plus de 13'000 signatures. La majorité de droite du Grand Conseil avait tenté de l'annuler, le Tribunal fédéral l'a validée, à l'exception d'une disposition transitoire qui avait le défaut d'être rétroactive en proposant non seulement la fin des allègements fiscaux pouvant être accordée aux entreprises multinationales, mais aussi l'annulation de ceux déjà accordés. Reposant sur de solides principes de gauche et parfaitement cohérente des autres propositions socialistes en matière de fiscalité, l'initiative sera donc (mais quand ?) soumise au vote populaire, que le Conseil d'Etat et le Grand Conseil lui opposent ou non un contre-projet. Parole sera donc donnée au peuple.

Un combat de ceux qu'on n'a perdus d'avance que quand on a renoncé à les mener...

le choix que le PS devait faire, maintenir ou retirer son initiative contre les allègements fiscaux accordés aux multinationales, était à la fois tactique et programmatique.
Choix tactique : le Conseil d'Etat promet un contre-projet indirect, que la droite promet de soutenir, en échange du retrait de l'initiative. Doit-on, au nom du principe « un  tiens vaut mieux que deux tu l'auras » (un contre-projet parlementaire promis vaut mieux qu'un vote populaire périlleux), accepter de retirer un texte qu'on a fait signer par 13'000 personne, au profit d'un autre texte, qui ne reprend quasiment rien de celui de l'initiative, mais propose, ce qui n'est pas sans importance mais dont on devrait se contenter, que ce qui relevait d'une directive interne au Conseil d'Etat (les critères et les conditions des allègements fiscaux accordés aux multinationales) fasse désormais l'objet d'une loi, soumise à référendum ?
Choix programmatique : le PS se bat contre les allègements fiscaux accordés aux multinationales, le contre-projet promis par le Conseil d'Etat veut les inscrire dans la loi. La contradiction est donc flagrante entre ce que les uns (le PS) proposent et ce que les autres (le gouvernement, la droite parlementaire) promettent de propose. Le choix programmatique est ainsi celui de continuer à revendiquer ce que le PS, et la gauche en général, revendiquent, et donc de maintenir l'initiative populaire, ou de la retirer au profit d'un texte qui ne reprend aucune de ces revendications. Il y a bien des motifs à notre opposition aux allègements fiscaux -ils étaient déjà ceux de notre opposition aux « forfaits fiscaux », ils sont aussi ceux de notre opposition à une fixation trop basse du taux d'imposition des entreprises. Les multinationales ne sont pas des entreprises comme les autres : elles peuvent s'installer là où les impôts qu'elles ont à payer sont les plus bas, et ainsi à la fois assécher les ressources fiscales des pays qu'elles quittent, et bénéficier de privilèges fiscaux dans les pays où elles s'installent. Combattre ces privilèges, c'est non seulement combattre une inégalité devant l'impôt, et revendiquer des ressources fiscales nouvelles ici, c'est aussi combattre la perte de ressources fiscales dans des pays qui en manquent pour assurer l'existence de leurs propres services publics. Un combat pour la solidarité, que la gauche mène, au plan cantonal comme au plan national, avec les organisations d'entraide et de coopération au développement. Une question de principe autant qu'une question de programme.

On votera donc, à Genève, sur l'initiative socialiste pour l'abolition des privilèges fiscaux accordés aux multinationales. On sait que la campagne sera difficile, et que, pour user d'un euphémisme, la victoire en votation est loin d'être acquise. On connaît même déjà l'argumentaire du Conseil d'Etat, de la droite, de l'extrême-droite et du patronat -on n'a aucun mérite à le connaître déjà puisque c'est le même à chaque votation sur les privilèges, les rabais, les cadeaux fiscaux accordés aux multinationales, ou sur le secret bancaire : les multinationales (ou les banques), ça créée des emplois, les multinationales iront ailleurs si on leur fait la gueule ici, vous connaissez la chanson comme nous. Et puis quoi ? Si on vous répète  que la terre est plate, s'aplatit-elle pour autant?  Le développement économique de Genève ne peut-il se faire autrement qu'en transformant Genève en hub de la finance et de la prédation économique internationale ? N'avons-nous pas un programme à défendre, d'un autre développement, fondé sur des activités (et des emplois) socialement utiles, correspondant aux besoins et aux droits de la population de la région (et pas seulement du canton) ?

Faire accepter par le peuple du canton (et du canton seulement, hélas) l'initiative socialiste ne sera pas aisé, nul n'en disconvient. Mais c'est un vrai, beau, solide combat de gauche. De ceux qu'on n'a perdu d'avance que quand on a renoncé à les mener.    


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