Châteaux électoraux en Espagne : Tous perdants


Tous perdants, à un titre ou un autre, même ceux qui se croient gagnants : tel est le résultat des élections espagnoles. La droite (le Parti "Populaire" du Premier ministre Rajoy), avec 137 sièges, reste loin de la majorité absolue (176 sièges), même si elle regagne cinq des sièges perdus lors des précédentes élections; le centre (Ciudadamos) n'obtient que 32 sièges et ne peut prendre part à une coalition majoritaire qu'avec la gauche, à condition que celle-ci accepte de se coaliser elle-même -or si le PSOE, avec 85 sièges, reste la première force de gauche, il  recule encore, alors que la coalition "Unidos Podemos" (71 sièges) des deux forces de "gauche de la gauche" (Podemos et Izquierda Unida) perd un million d'électeurs, le total des deux forces de gauche n'atteignant pas non plus la majorité absolue, et la division restant profonde entre le PSOE et "Unidos Podemos", alors même que leurs programmes sont plus convergents qu'eux-mêmes ne l'admettent. Bref, ces élections anticipées sont un coup pour rien. Et signent à la fois l'échec de la tentative de la "gauche de la gauche" de rééditer l'exploit grec de Syriza (renvoyer la social-démocratie dans les poubelles de l'histoire, mais en prenant sa place), l'échec du "centre" de se poser en interlocuteur indispensable de la droite, l'échec de la droite de gagner une majorité parlementaire absolue et l'échec du PSOE de sortir de sa propre crise.

Ensemble à gauche" ne gagne pas les élections espagnoles...


Les élections législatives de dimanche confirment celles de décembre dernier : le paysage politique espagnol est bel et bien sorti du bipartisme PP-PSOE, mais sans s'éclaircir pour autant. A moins que la gauche espagnole ne consente à se regarder elle-même en face... ce qu'elle ne serait d'ailleurs pas seule à devoir faire...
La gauche de la gauche, et pas seulement l'espagnole, attendait beaucoup des élections législatives de dimanche en Espagne. Elle en attendait ce qu'elle attendait, et crut un temps avoir obtenu, des législatives grecques qui virent l'ascension, puis la victoire, de Syriza. Puis sa conversion résignée au "réalisme politique", c'est-à-dire à la soumission aux rapports de force. L'échec d'"Unidos Podemos", alors que les sondages lui prédisaient de dépasser le PSOE, lui aura au moins évité ce destin morose : prendre la place de la social-démocratie pour finir par faire la même politique qu'elle, après l'avoir dénoncée.
L'alliance entre Podemos (qui est déjà une coalition de multiples petites formations allant de la gauche socialiste à la gauche révolutionnaire) et Izquierda Unida (issue du Parti communiste) procédait d'un constat d'évidence : aucun des deux ne peut gagner seul, les deux pouvaient gagner (et ont perdu) ensemble. Mais gagner quoi ? Le pouvoir ? Ou "seulement" la première place à gauche, devant le PSOE, en revendiquant même son héritage et en se voulant la "nouvelle social-démocratie" à la place de l'ancienne bouffée aux mites ? Le défaut d'union entre les deux formations de gauche les avait, en décembre dernier, empêché d'atteindre l'un ou l'autre de ces objectifs. Là où Podemos se présentait seul, il avait obtenu 12 % des suffrages; là où il se présentait en coalition avec IU et des régionalistes de gauche (en Galice et en Catalogne, notamment), ces listes atteignaient 20 %. La première raison de l'alliance était donc éminemment pragmatique : additionner les suffrages. "Pour gagner, il faut additionner beaucoup de gens", expliquait Pablo Iglesias. Mais ça ne suffit pas : il faut aussi savoir, et dire clairement, pourquoi on les additionne, parce que sinon cette addition finit par se résumer en celle des concurrences, des divergences et des contradictions.
Et que le résultat,  c'est qu'"Ensemble à gauche" ne gagne pas les élections espagnoles.

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