Fonds de tiroir


La confédération syndicale « Travail Suisse » a présenté la semaine dernière son étude annuelle sur les salaires des dirigeants des grandes entreprises privées, à partir d'un «panel» de 27 entreprises. Dans 22 de ces 27 entreprises, l'indemnité des directeurs généraux (les « CEO ») a augmenté en moyenne de 9 % en un an (2015), avec en tête du classement le patron du Crédit Suisse, qui a touché plus de 20 millions l'année, soit 363 fois plus que son employé le moins payé (en clair, Tidjane Thiam a gagné en un jour ce que son employé a mis un an a gagner). A la tête d'UBS, Sergio Ermotti a touché 14,3 millions (275 fois plus que son employé le moins payé. Les écarts salariaux entre le plancher et le plafond des rémunérations se sont aussi accrus dans la plupart des autres secteurs. On se souvient pourtant d'avoit voté -et appelé à voter- une initiative populaire «contre les rémunérations abusives», dite « initiative Minder », initiative acceptée par le peuple et les cantons et entrée en vigueur en janvier 2014. Or cette initiative n'a produit aucun effet, et s'est révélée inefficace, parce qu'elle ne proposait pas de bloquer les rémunérations les plus élevées, mais seulement de donner aux actionnaires le pouvoir de les accepter ou de les refuser. Or ils les ont acceptées. Parce qu'un actionnaire, c'est toujours très gentil avec les patrons tant que la valeur des actions ne diminue pas. Il est pas égalitaire, l'actionnaire : il est intéressé. Et il fait confiance. D'ailleurs, dans 17 des 29 entreprises scrutées par « Travail Suisse », les actionnaires ont voté les rémunérations des patrons avant même de connaître les résultat de l'entreprise. Finalement, il serait pas tout simplement un peu con, l'actionnaire de base ?

Surprise : le Conseiller d'Etat genevois Mauro Poggia (MCG) et le propriétaire du quotidien économique « l'Agefi » figurent dans les « Panama Papers » en tant qu'actionnaires, voire propriétaires, d'une société « offshore ». Dumenil, sous enquête du fisc fédéral pour soustraction fiscale à hauteur de 54 millions de francs, et dont 25 millions d'avoirs ont été séquestrés, est cité comme actionnaire depuis 2013 d'une société domiciliée aux Iles Vierges, liée à une société luxembourgeoise elle-même liée à 116 autres sociétés. Mais Dumenil a des troubles de mémoire : « j'ai peut-être eu une société offshore, mais j'ai oublié ». Amnésique, le gars. Quant à Poggia, il est cité comme bénéficiaire entre 2004 et 2015 (deux ans après son élection) d'une société offshore mais  il affirme avoir mis fin à ses pouvoir dans cette société en décembre 2013, après son élection mais avant sa prestation de serment, et n'avoir été que fondé de procuration (en tant qu'avocat) pour un  client domicilié à l'étranger, dont les avoirs étaient en Suisse, mais ne provenaient pas d'évasion fiscale. Donc on a un amnésique (Dumenil) et un innocent (Poggia). Et nous voilà rassurés: Panama, à Genève, c'est rien que le nom d'un joli chapeau estival, pas celui d'un moche cache-sexe fiscal.

Personne ne prend les Etats-Unis pour un modèle de laïcité : les dollars portent la devise « in God we trust », le serment au drapeau proclame « One Nation under God », les présidents prêtent serment sur la Bible et terminent tous leur discours par un rituel « God bless America »,  les USA n'ont jamais eu de président ouvertement non-croyant, ni même non-chrétien, et il n'y a même aucun député (représentant ou congressiste) assumant publiquement son athéisme, 42 % des sondés déclarent qu'ils ne voteront jamais pour un musulman, et 51 % jamais pour un athée. Et plus d'un Etatsunien sur trois croit que le monde a été créé en six jours comme il est écrit dans la Bible. Et pourtant... Et pourtant 23 % des person-nes en âge de voter se déclarent «sans religion» (28 % chez les démocrates, 35% chez les moins de 35 ans), des milliers de personnes ont manifesté à Washington le 4 juin dernier pour la laïcité, une fondation «Freedom from religion» appelle les partisans de la laïcité à voter et les athées ont ouvert un bureau politique dans la capitale. Bref, faut pas déespérer : même les athées et les agnostiques ont leur terre de mission.

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