Fonds de tiroir


Le 27 juillet dernier, la journée a été chaude, à l'aéroport de Genève : déploiement de policiers, contrôles systématiques de tous les voyageurs, jusque sur la route menant à l'aéroport... la veille, les douanes de l'aéroport étaient averties par un coup de fil anonyme que le lendemain, une femme cachant une bombe allait prendre un avion. Principe de précaution : l'avertissement paraît crédible, on prend les mesures qui s'imposent. Et puis, on a fini par comprendre que l'« avertissement » était simplement (si on peut dire) le fait d'une femme jalouse voulant empêcher son mari de partir avec sa maîtresse, réelle ou supposée (lui assure que celle que sa femme croit être sa maîtresse est juste une cliente de son épicerie). Jugée à Annecy en comparaison immédiate, l'épouse jalouse s'est pris six mois, dont trois ferme. Et risque de se voir condamnée à rembourser une partie du préjudice (plusieurs dizaines de milliers de francs) causé à la collectivité publique genevoise (blocage de l'aéroport, mobilisation policière) par son coup de sang. On sait pas ce qu'il en est, mais même s'il en est vraiment ce que l'épouse soupçonnait, notre vieux fonds phallocrate nous fait nous dire que le mari avait raison de se barrer. Le plus loin possible. Seul ou accompagné. Il a juste eu tort de vouloir se barrer en avion. Le train, quand même, c'est plus romantique. Ou même le bateau : un débarcadère de la CGN envahi par la police parce qu'un téléphone anonyme a annoncé qu'une terroriste allait couler un bateau, ça aurait été plus rigolo... Euh... il en pense quoi, Darbellay ?

Donc, voilà, il y a deux UDC vaudoises. L'officielle et la dissidente, laquelle n'en clame pas moins être plus UDC que l'officielle -dont elle reprend le slogan suisse « Rester libre », et à laquelle elle proclame son allégeance.  Après l'exclusion de Claude-Alain Voiblet et de Pierre Oberson de l'UDC, pour une sombre histoire d'affiches électorales arrachées, cinq conseiller communaux lausannois ont créé un nouveau groupe au sein du parlement municipal, à la présidence duquel ils ont réussi à faire élire l'un des leur, groupe plus nombreux (sept sièges) que celui de l'UDC (cinq sièges). Ce groupe a finalement donné naissance à un nouveau parti : le parti libéral-conservateur. Qui a annoncé qu'il présenterait une liste aux prochaines élections cantonales (il dispose déjà d'un élu au Grand Conseil, en la personne roborative de Voiblet, qui y siège en tant qu'indépendant). A quoi l'UDC (l'officielle, donc) a répondu en décidant que tous ses membres qui adhéreraient au PLC seraient automatiquement exclus du parti. Voila. On sait aussi s'amuser, dans les parlements vaudois. Mais faut dire qu'ils n'avaient pas de MCG, les rupestres, alors ils doivent un peu improviser. Alors voilà, ils en ont un, de MCG. Même qu'un conseiller communal du PLC, policier de son état (ouais, on recrute aussi dans la maison poulaga, comme le MCG...) s'est fait tirer les noreilles par sa hiérarchie pour avoir posé avec sa plaque de policier sur la page Facebook du tout nouveau parti plus UDC que l'UDC. Et ouala, une fois de plus, à Genève, on été précurseurs. Mais bon, là, on aurait pu s'abstenir, quand même...

Dans la série « y'en a point comme nous », épisode « on est bien contents pour eux », on a appris grâce à la société de conseil HKP que les dirigeants de sociétés suisses sont les mieux payés d'Europe. Et aussi les plus prompts à dénoncer toute tentative de les imposer plus, eux ou leurs sociétés, mais ça, c'est pas HKP qui le dit, c'est nous, parce qu'on a mauvais esprit. Bref, les salaires des directeurs des 76 plus grosses entreprises européennes cotées en bourse ont progressé de presque 10 % en 2015 et s'établissent en moyenne à 6,35 millions de francs annuels, ceux des 20 plus grosses sociétés suisses de l'indice SMI s'établissant à près de 7,5 millions. Des dix premiers présidents de directoires les mieux payés d'Europe, cinq sont suisses, alors que la taille de leurs sociétés est inférieure à la taille des grandes sociétés européennes. Par ailleurs, les salaires des directeurs ont augmenté alors que les bénéfices de leurs entreprises ont, en moyenne, diminué. Mais peu importe. Quand on aime, on ne compte pas, et le salaire au mérite, c'est beau dans les discours, mais quand on est directeur, les discours, c'est pour les autres. Si on passe des directeurs aux présidents des Conseils d'administration, les présidents d'entreprises suisses cartonnent encore plus : sur les dix présidents les mieux payés, six sont suisses, dont les trois les mieux payés : celui de Nestlé (6,1 millions d'euros), celui d'UBS (5,34 millions) et celui de Roche (4,2 millions). Ouala. Et le premier qui trouve que c'est trop sera privé de prestations complémentaires pour jalousie. Et toc.

Il s'appelle Robin Keller. Il vient d'être promu lieutenant de notre glorieuse armée suisse. Et il est aussi le responsable du PNOS pour la Suisse orientale. C'est quoi, le PNOS ? Un groupuscule d'extrême-droite. Donc l'armée suisse, qui ne cesse par ailleurs de proclamer qu'elle pratique en son sein la «tolérance zéro» à l'égard des extrémistes, laisse un extrémiste de droite prendre du galon. Alors qu'un service spécialisé, «Extrémisme dans l'armée» a été créé en 2002 pour prévenir les infiltrations de fachos, de gauchos ou, plus récemment d'islamos. Mais lesdits « extrémistes » ne peuvent être exclus de l'armée que s'ils ont été condamnés pour un délit pénal. Et en Suisse, avoir des idées «extrémistes» n'est pas un délit. En 2015, le service « Extrémisme dans l'armée » a traité 34 dénonciations: six concernaient de l'extrémisme «violent» (donc de l'extrémisme en actes, pas seulement en paroles). Et sur les 28 autres cas, 16 concernaient des extrémistes de droite, 10 des islamistes et seulement deux des extrémistes de gauche. Faut s'y résigner, camarades, on est passés de mode.

Bonne nouvelle (si, si, y'en a) sur le front de la défense des droits zumains: le Conseil fédéral a annoncé le 29 juin qu'il proposait la mise en place d'une institution nationale des droits humains, comme en disposent une centaine d'Etats dans le monde, dont 35 sont membres comme la Suisse du Conseil de l'Europe. Pour qu'une telle institution puisse réellement fonctionner, elle devrait disposer non seulement d'une base légale, mais aussi d'un budget. Le gouvernement suisse évalue ce budget à un million de francs. C'est peu. Trop peu. Amnesty International propose donc aux cantons et aux privés de participer au soutien financier de cette institution. On devrait d'ailleurs aussi le proposer (et d'ailleurs on va le faire à la nôtre) aux communes, en particulier aux villes, et tout spécialement à la capitale mondiale des droits humains. Genève, de son petit nom. Parce que les discours et les lois, c'est bien beau, mais que c'est au pied de la caisse qu'on mesure la cohérence des engagements pour les droits humains...

Il y a six ans, à l'entrée du Jardin Anglais, un grand calicot avait été tendu : « vite des toilettes, il y a ur-gence ! », C'était pas du meilleur goût, mais c'était clair : pour les milliers de personnes qui se rendent dans le jardin ou devant l'horloge fleurie, il n'y avait qu'un seul WC, et il était payant. Six ans plus tard, rien n'a changé, sauf pendant les « grands événements » genre « Fête de Genève » où des WC temporaires sont installés. Sinon, il y a les buissons. Ou la burqa. La capitale mondiale du monde mondial a le sens de l'accueil...

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