Fonds de tiroir


Titre du « Temps » du 1er décembre: «A Dacca, le pape ose le mot Rohingyas » (la population musulmane de Birmanie, persécutée par les extrémistes bouddhistes et l'armée birmane), qu'il n'avait pas osé prononcer à Rangoon. Le Pape évoque donc, timidement, au Bangladesh où ils se sont réfugiés par centaines de milliers, la persécution des Rohingyas, qu'il n'avait pas condamnée en Birmanie, là d'où ils sont chassés par des massacres, la destruction de leurs maisons et de leurs biens et le viol des femmes. Un pape qui ne dénonce pas des crimes contre l'humanité là où il se perpètrent, mais là où des survivants ont pu se réfugier, on aura de la peine à prendre ça pour une manifestation de courage évangélique. Mais moins de peine à se souvenir que c'est une tradition vaticane. Et on se dit que François devrait prendre un autre modèle que celui de Pie XII. Mais il est vrai qu'on n'a jamais attendu grand chose d'un pape, ni de son église, ni d'ailleurs d'aucune église. Et qu'on ne peut donc se dire déçus. Juste navrés d'être confortés dans notre anti-cléricalisme par la persistance des lâchetés cléricales.

Le cas Buttet n'est pas isolé, nous dit «Le Temps» de vendredi dernier : une «députée de longue date» déclare qu'il y a «quelques prédateurs sexuels au parlement» fédéral, d'autres évoquent des hommes «lourds, collants, insis-tants». Des femmes parlementaires doi-vent fuir des séances de commission pour ne pas être tripotées par des collègues masculins, l'une d'entre elles évoque même un collègue monnayant son soutien à une proposition en échange d'une coucherie. L'édito du «Temps» décrit une «prise en otage» des femmes politiques victimes de harcèlement (ou pire), sur le mode du «Soit tu restes et tu acceptes les règles définies par des hommes qui peuvent te harceler en toute impunité, soit ta carrière s'arrête ». Une troisième solution, un bon coup de genou dans les génitoires du harceleur, ne semble pas envisagée. Et c'est bien dommage.

L'évêque de Coire revendique 1,2 million de francs d'un fonds alimenté par les catholiques zurichois depuis 1990, pour financer la création d'un évêché de Zurich. Qui ne sera pas créé. Mais si l’évêché de Zurich n'est pas là, les sous des catholiques zurichois, eux, sont là. Et donc l'évêque de Coire (qui est aussi celui de Zurich, comme l'évê-que de Fribourg est aussi celui de Genève) les veut pour lui et ses oeuvres. Avec cet argument imparable, style Robin des Bois (ou plutôt Frère Tuck) : «Il est clair que l'ordinariat de l'évêché n'a pas droit, juridiquement, à ce fonds. Mais il y a droit, moralement ». Bon sang, mais pourquoi on n'y avait pas pensé plus tôt, cons de pauvres qu'on est? On pourrait par exemple nous pointer à notre caisse maladie pour réclamer le remboursement de nos primes en disant que même si on y a pas droit juridiquement, on y a droit moralement...

L'Institut de hautes études en administration publique a couronné Genève « champion suisse des finances cantonales » en 2016 pour la couverture de ses charges par ses revenus courants. Or en 2016, Genève n'avait pas de budget et fonctionnait avec les « douzième provisonnel ». Pourquoi on s'échauffe chaque année avec les budgets municipaux ou cantonaux si ça va mieux quand on n'en a pas ?

Le Conseiller national PDC valaisan Yannick Buttet est en congé maladie. Accusé de harcè-lement sexuel, il a démissionné de la vice-présidence du PDC suisse et de la présidence, c'est-à-dire de la Mairie, de sa commune (Collombey-Muraz), mais pas de son mandat de parlementaire fédéral (il est seul à pouvoir prendre cette décision : son parti peut éventuellement l'exclure du groupe, mais pas du parlement, où il continuerait à siéger en tant qu'indépendant). Il continuera donc de toucher ses indemnités de parlementaire. Buttet n'admet (et encore : contraint et forcé) que de s'être comporté comme un « gros lourd », à cause de l'alcool. C'est pas sa faute, c'est la faute au pinard s'il a tripoté des collègues (dont l'UDC genevoise Céline Amaudruz) et si, le soir de l'élection d'Ignazio Cassis au Conseil fédéral, il a dû être raccompagné dans sa chambre d'hôtel par la police fédérale. Et non content de plaider la maladie (l'alcoolisme), et d'assurer qu'il va suivre un traitement, il se plaint qu'on est en train de « détruire sa vie » quand on fait état de ses hauts faits. D'ailleurs, l'armée lui a retiré son arme de service (son pistolet d'ordonnance -il est lieutenant-colonel), pour sa sécurité et celle des autres. Et le voilà quasiment tout nu, mais accroché à son siège comme un morpion à une couille, à clamer qu'il est doublement victime : de l'alcool et d'une cabale. On le béatifie comme martyr tout de suite ou on attend la fin de l'enquête ?

Donc, le Conseil municipal de la Ville de Genève a décidé de remplacer l'actuel règlement des piscines municipales, qui ne prescrit pour y entrer que de porter des tenues de bains et ne fait aucune distinction entre les femmes et les hommes quant aux tenues à adopter, et de le remplacer par l'ancien règlement, qui, lui, prescrivait pour les femmes (on cite) : « maillot de bain une pièce ou deux pièces, bras nus, jambes au maximum au-dessus du genou, pas de jupe ou de robe de bain ». Motivation, implicite dans le texte mais explicite dans les discours de ses auteurs : interdire le «burkini» (tenue de bain couvrante). Après quoi, il ne restait plus qu'à tartiner rhétoriquement sur le thème de la résistance à l'islamisme. La droite et l'extrême-droite étant majoritaires au Conseil municipal quand elles s'additionnent, si idiote qu'elle était, la proposition ne pouvait qu'être adoptée. Et le fut donc (même, pour certaines élues de droite, en devant se boucher le nez et les oreilles). Sur quoi, aux quelques âneries déjà gratinées entendues lors des débats se sont ajoutées des exhalaisons carrément merdeuses sur Facebook (Plainte a été déposée contre son austra-lopithèque d'auteur), du genre, à la socialiste Amanda Gavillanes : « pas de piscines pro-muzuls, salope ! »... A la Conseillère municipale d'« En-semble à Gauche » Annick Ecuyer : « Notre travelo de gauche parle des muzuls !!!! Merde, on est à Genè-ve!»... A la Verte Uzka Khamis Vannini : « Oh la vilaines genevoise pro-muzuls !!! Vas chier ! » (on a respecté l'orthographe originale de l'auteur, un incertain Michel Wicki). Comme dit le proverbe cu-rafifi : « quand on remue la merde, faut pas s'étonner que ça pue ».

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