Derrière la progression de la droite populiste, la peur de l'immigration...


Histoires de racines

Les élections européennes de fin mai ont été marquées par une double progression : celle des Verts et celle des populismes de droite. Cette dernière progression, moins forte que prédite, a été largement expliquée par la peur de l'immigration et l'exigence d'un renforcement, contre elle, des frontières. Or les politiques migratoires restent pour l'essentiel des politiques nationales.-et l'Union européenne, en tout cas, a clairement montré qu'elle n'était ni capable, ni désireuse d'en mener une à leur place, ou au-dessus d'elles. De toute façon, "maîtriser l'immigration" par un renforcement des frontières nationales ou continentales relève de l'illusion : aucune frontière n'arrêtera jamais un migrant près à tout pour la franchir. Et toute l'histoire de l'humanité est une histoire de migration. Et tous les êtres humains vivant aujourd'hui sont migrants, enfants de migrants, descendants de migrants. Quant aux migrants proprement dit, ils ne pèsent pas plus de 3 % de la population mondiale. Qu'est-ce en effet qu'un migrant ou une migrante ? Rien d'autre qu'une personne vivant dans un autre pays que celui où elle est née (il n'y a pas d'autre définition de ce qu'est un migrant ou une migrante)... Un Suisse "de souche" établi en France est un migrant, ce que ne sont pas un Kosovar, un Kurde ou un Tamoul de la deuxième génération, né en Suisse... histoires de racines, de souches, de tronc, de branches, de feuilles...


La Suisse dit n'expulser que vers des "zones de paix". Comme les cimetières ?

Le 1er mars est entrée en vigueur en Suisse la nouvelle procédure d'asile, dont le but proclamé est d'accorder  protection aux personnes en danger dans leur pays, en accélérant la procédure (l'enregistrement de la demande et l'instruction du dossier doit se faire en un mois) et en concentrant en un seul lieu les acteurs de la procédure : fonctionnaires, juristes, interprètes, accompagnateurs. Chaque requérant a droit à un conseil et une représentation juridique jusqu'à ce que tombe la décision de première instance, mais on doute que ce conseil et cette représentation soient réellement destinées à l'épauler -on se dit qu'elle a sans doute été prévue  pour faire accepter les décisions de refus d'accorder l'asile, et la rapidité de ces décisions dans les procédures accélérées. 60 % des requérants d'asile, dont les cas sont assez claire pour pouvoir se passer d'une véritable instruction, devraient bénéficier d'une procédure accélérée. En bénéficier ou la subir, puisque dans la plupart des cas (90 % selon les estimations) les premières décisions seront négatives et suivies de renvois (eux aussi accélérés). Car un but non proclamé de la réforme, mais pas moins réel pour autant, est de réduire le plus rapidement possible le nombrer de requérants en Suisse. Ce qui explique que le délai de recours contre la première décision est réduit des trois quarts, puisqu'il passe de 30 à 7 jours. Les cas non traités en procédure accélérée sont attribués à un canton, et la procédure reste grosso modo celle qui était appliquée avant la réforme. Les requérants à qui n'aura pas été appliquée la procédure accélérée pourront rester jusqu'à 140 jours dans des centres fédéraux d'où ils n'auront pas l'autorisation de sortir en dehors de certaines heures, et seront fouillés à leur rentrée. Leurs relations sociales, leur liberté de déplacement, leur droit à une vie privée et familiale et à l'accès aux soins sont limités. En Romandie, Genève est au cœur de ce dispositif de stockage des requérants d'asile. De stockage avant renvoi : Selon un document du 11 avril émanant du Secrétariat d'Etat suisse à la migration, la Suisse est au pinacle du hit-parade des pays qui renvoient des requérants d'asile conformément au système des Accords de Dublin. Un système qui fonctionne "très bien" pour la Suisse, qui en est donc très contente, et apparemment fière d'expulser bien plus de réfugiés vers d'autres pays signataires de l'accord (ou de l'un ou l'autre des 64 pays avec lesquels elle a signé des accords de réadmission), et satisfaite que près de 57 % des requérants d'asile en Suisse finissent par en être expulsés. Y compris vers des pays en guerre comme l'Afghanistan, l'Irak ou la Somalie. Au prétexte qu'il y a dans ces pays des zones en paix.
Comme les cimetières ?

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