"Zéro Pub" : une initiative toujours à soutenir



Libérer l'espace public

L'initiative populaire municipale "Zéro Pub", déposée en novembre 2017, veut libérer l'espace public genevois de l'envahissante publicité commerciale. Le Conseil administratif de la Ville y est majoritairement opposé : il tient aux modestes revenus que la pub commerciale apporte au budget municipal. Le Conseil municipal, lundi, a renvoyé le texte en commission. Il en ressortira avec trois propositions possibles : le soutien à l'initiative, le soutien à un contre-projet, le refus sans contre-projet. Le plénum du Conseil municipal en décidera : s'il refuse l'initiative ou lui oppose un contre-projet, le peuple votera. S'il accepte l'initiative, le peuple n'aura pas besoin de voter et l'initiative sera mise en œuvre. Et c'est tout ce qu'on souhaite : libérer l'espace public de l'emprise du consumérisme.


Reconquérir l'espace public, rendre nos discours cohérents

La majorité du Conseil administratif de Genève refuse donc l'interdiction de l'affichage commercial dans l'espace public. Les autres demandes de l'initiative "zéro pub", il les accepte : amélioration des conditions de déplacement des personnes à mobilité réduite, dont les déplacements sont entravés par les panneaux d'affichage, et octroi de panneaux vierges laissés à la libre expression des habitants. Mais ces deux demandes (qu'on soutiendra évidemment aussi) ne sont pas le cœur de l'initiative. Le cœur de l'initiative, c'est l'interdiction de la pub commerciale. A quoi la majorité du Conseil administratif (Esther Alder et Rémy Pagani ont fait savoir qu'elle et lui soutenaient l'initiative) s'oppose donc, au motif principal que ça priverait la Ville de 3,4 millions de francs de rentrées (celles de la redevance due par l'entreprise détentrice de la concession d'affichage), plus quelques centaines de milliers de francs de prestations assumées par l'entreprise.  Cela, sur un budget municipal de 1,2 milliard de francs. L'enjeu n'est donc pas financier, mais politique, social, culturel. Et symbolique.

Supprimer la publicité commerciale dans l'espace public serait une reconquête de cet espace -une manière de l'émanciper du consumérisme. Ce serait aussi un moyen de lutter contre l'enlaidissement de la ville. Ce serait enfin une manière de dire que, quand la Ville de Genève décrète l'"urgence climatique" et proclame les droits des femmes, elle ne fait pas que tenir un discours, elle le traduit aussi en actes simples, immédiatement perceptibles, concrètement mesurables. On ne peut pas condamner l'utilisation de l'avion pour des déplacements qu'on peut faire en train et laisser les compagnies "low coast" (ou les autres) inciter par voie d'affiches à prendre l'avion plutôt que le train, ou prôner une alimentation naturelle et équilibrée et laisser les fast-food inciter à se goinfrer de saloperies, ou affirmer que la municipalité est exemplaire dans le combat pour la dignité des femmes et laisser placarder des affiches sexistes...
On ne sait pas ce qui sortira de la commission du Conseil municipal qui va étudier l'initiative et choisir entre les trois positions qui seront proposées au Conseil (on ne se fait guère d'illusions sur les chances de l'initiative face à une majorité parlementaire de droite et d'extrême-droite, si on espère en la cohérence des discours et des actes de la gauche -toute la gauche), mais si l'initiative est soumise au vote populaire, on la soutiendra. Pour libérer l'espace public du racolage consumériste. Et mettre un peu de cohérence entre nos proclamations programmatiques et nos recommandations de vote : on  finirait sinon par ressembler au PLR et à sa conversion écologique.

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