Deuxième tour des Municipales genevoises : A gauche, les villes!


Bon, c'est fait (sous réserve évidemment de recours possibles des perdants) : les 21 dernières communes genevoises à n'avoir pas élu, activement ou tacitement, leurs exécutifs l'ont fait. A un taux de participation à quelques points en dessous de la norme déjà médiocre, les 5 % habituels de vote au local s'étant réduits à un petit pourcent avec la réduction de tous les locaux de vote à une boîte  unique pour tout le canton -ce qui nous rappelle de vieux souvenirs de nos premiers vote, lorsqu'un local unique pour tout le canton s'ouvrait au Collège Calvin le mercredi et le jeudi avant les locaux de quartier et de commune, le vendredi, le samedi et le dimanche (c'était avant l'introduction du vote par correspondance). Au passage, il nous semble que les conditions particulières de ces élections municipales coronapositives devraient suggérer à nos Magnifiques Seigneurs de réintroduire le vote par internet. Tout cela dit, on est très satisfait des résultats de ces élections (malgré la disparition du Parti du Travail du Conseil municipal de la Ville, où il siégeait depuis 70 ans, et de la gauche de la gauche du Conseil administratif, où elle siégeait depuis 50 ans) , avec des majorités de gauche en Ville de Genève, à Meyrin, Onex, Vernier, Lancy, Carouge, Versoix, Chêne-Bourg, Chêne-Bougeries, et au Grand Saconnex.  Onex et Carouge ont même des exécutifs totalement féminins...


On a dit ce qu'on voulait faire ? Il faut maintenant faire ce qu'on  a dit.


Le verdict du deuxième tour des Municipales genevoises ne souffre guère d’ambigüité : c'est une claire victoire de la gauche -et, en certaines communes (comme Vernier ou Onex), des candidatures "centristes" soutenues, plus ou moins officiellement, par la gauche contre des candidatures droitières. En Ville, les deux socialistes sont élus en obtenant une majorité absolue des suffrages. La  participation est médiocre ? Elle l'est depuis des lustres, à toutes les élections, et aux municipales plus encore qu'aux autres, et dans les villes plus encore qu'ailleurs (28 % cette fois en Ville, contre 31 % il y a cinq ans). La question posée par l'abstention ne l'est pas au seul propos de l'élection de dimanche dernier, elle l'est donc au propos de toutes les élections, dans un système politique qui ne fait pas de l'élection ce qu'elle est par exemple en France : l'alpha et l'omega de la démocratie. Ici, on vote tous les trois mois, sur tout (et parfois un peu n'importe quoi), et la récurrence désacralise. Il incombe tout de même aux acteurs politiques, aux personnes comme aux organisations, de se rendre intéressants, et de rendre leurs propos, leurs propositions, leurs programmes, aux citoyennes et aux citoyens. S'ils n'y arrivent pas, qu'ils ne s'en prennent qu'à eux-mêmes, et pas aux media ou aux virus -celui de la politique, en tout cas, doit être cultivé...

Comme l'a rappelé le Conseiller d'Etat Thierry Apothéloz dans une lettre aux membres des exécutifs communaux et aux présidentes et présidents des Conseils municipaux, la loi autorise les exécutifs à " prendre toutes les mesures provisionnelles dont l’urgence est commandée par les intérêts de la commune" (LAC art. 48.m). Sans Conseils municipaux pouvant se réunir, tout le pouvoir municipal est donc aux mains des Conseils administratifs, des Maires et des adjoints-e-s. Les Conseils municipaux et administratifs actuels sont encore en fonction jusqu'à fin mai, les nouveaux entreront en fonction le 1er juin, il serait tout de même préférable que les mandats des premiers ne se terminent pas en eau de boudin, ou de coronavirus, sans aucune séance ni plénière ni de commission et que les seules autorités communales fonctionnelles soient des exécutifs en bout de course. On s'est félicité de la permanence démocratique que manifestait la tenue d'élections malgré toutes les restrictions liées à la lutte contre la propagation du Covid. On se féliciterait tout autant de la réactivation des débats et des décisions politiques dans les délibératifs municipaux -sinon, à quoi diable aurait rimé de les élire, si c'est pour ne pas les réunir ?
Sans doute des décisions urgentes doivent être prises pour accompagner socialement, économiquement, culturellement, la lutte contre l'épidémie, et ces décisions peuvent être prises par le Conseil administratif seul (il est même dans la plupart des cas le seul à pouvoir les prendre légalement), mais il va bien falloir les financer, ouvrir pour elles des lignes budgétaires, des crédits extraordinaires, accorder des autorisations de dépense -et cela, seul le Conseil Municipal peut le faire. Même la droite, d'ailleurs, semble prête à le faire : "Nous allons devoir accepter des déficits budgétaires dans le futur pour financer les nécessaires mesures de relance et de soutien qui ne manqueront pas d'arriver", écrivait Simon Brandt dans la "Tribune de Genève" du... 1er avril. Quoique le style prête à critique et la date à méfiance, ce n'était pas un poisson et on en serait presque venu à regretter son échec électoral -il avait d'ailleurs fait à peu près tout ce qu'il pouvait pour se planter... 

Et puis, il y a tous les enjeux des cinq prochaines années -et d'entre eux,. quelques-uns qui traînent depuis cinq ans, et des décisions du Consaeil Municipal sortant et bientôt sorti à réparer. Des engagements ont été pris pendant la campagne électorale, des promesses faites, des programmes présentés. Un exemple, au hasard ? Comme le propose Christina Kitsos ("Le Courrier" du 31 mars), en reprenant une proposition faite lors de la précédente "législature" municipale (mais qui n'avait aucune chance d'être acceptée par la majorité de droite qui y sévissait alors), "la Ville devra internaliser le nettoyage"  et intégrer dans le personnel de la Ville les employées ("il s'agit surtout de femmes", immigrantes de surcroît) des sociétés à qui la Ville a externalisé cette tâche, et qui se retrouvent  "au front" de la lutte contre le coronavirus, "et prennent des risques alors qu'elles sont mal payées".


On a dit ce qu'on voulait faire ? Il faut maintenant faire ce qu'on  a dit.

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