Crise sanitaire : au Sud, les plus pauvres doivent se débrouiller sans l'Etat


Urgence solidaire

Des centaines de millions de travailleuses et de travailleurs, notamment dans l'agriculture et le textile, privés de leur emploi et de tout revenu, ou licenciés pour être ensuite réengagés à des conditions pire encore que celles qui leur étaient imposées avant leur licenciement, ou encore forcés de poursuivre ou de reprendre un travail sans aucune protection sanitaire; des droits fondamentaux foulés au pied; des populations laissées, dans les favelas, les townships, les bidonvilles, sans aide, sans protection, sans revenu, sans soins; des évacuations forcées, sans relogement : telles sont les conditions imposées aux plus précarisés de nos semblables, non par l'épidémie mais par l'incapacité des gouvernants, ou leur refus pur et simple, d'y répondre. Alors ces populations se débrouillent par elles-mêmes  et leurs mouvements sociaux s'organisent, distribuent l'aide que l'Etat ne distribue pas, défendent les droits fondamentaux que les gouvernants ignorent, ou violent. Le Solifonds appelle à soutenir ces populations, ces mouvements et ces organisations dans leurs actions de solidarité, mais aussi dans leur revendication de suspension du paiement des intérêts de la dette publique, pour dégager des ressources à affecter à la construction d'un système de santé capable de répondre aux crise sanitaires. Répondez à cet appel : www.solifonds.ch, mail@solifonds.ch, PC-80-7761-7


Soutenir le soutien aux mouvements sociaux


La crise liée à la coronapandémie frappe avec une particulière dureté les populations du Sud, dont les structures sanitaires déjà incertaines en temps "normal" s'effondrent littéralement.  L'OMS se dit  "très préoccupée par le nombre croissant de cas (de covid) dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires" aux systèmes de santé défaillants, voire inexistants. C'est le cas en Afrique, déjà théâtre de la malaria et même, actuellement, d'une invasion de criquets pèlerins menaçant toute l'Afrique de l'est de pénurie alimentaire, et des dizaines de millions de personnes de famine. Et Terre des Hommes annonce que sept millions d'enfants et d'adolescents détenus dans des prisons surpeuplées, délabrées et manquant d'infrastructures sanitaires sont exposés au covid. Quant au confinement, il signifie pour des millions de personnes la perte de la totalité de leurs revenus, sans aucune aide sociale pour compenser, fût-ce très partiellement, cette perte. Enfin, des millions de personne dépendant pour vivre, dans le monde, des transferts de fonds en provenance de celles et ceux de leur proche qui se sont exilés en Europe ou en Amérique du nord et envoie régulièrement une partie de leurs revenus à leurs familles restées au pays. En 2019, selon la banque mondiale, ce sont 554 milliards de dollars US qui ont ainsi été envoyés des pays riches vers les pays pauvres. Mais la crise du coronavirus a fait reculer d'environ 20 % ces transferts, du fait de la réduction des revenus des émigrés. De ce fait, les familles qui les recevaient se retrouvent plongées dans des difficultés parfois insurmontables. Partout, les inégalités se creusent et la pression sur les droits fondamentaux s'accroît.

Face à la crise pandémique, qui s'ajoute souvent à la crise climatique, dans les Etats les plus défaillants (que ce soit par choix délibéré, comme au Brésil de Bolsonaro, ou par manque de moyens), les populations doivent s'organiser elle-même pour survivre. Et les mouvements sociaux existant y concourent : la solidarité et l'entraide à la base supplée à l'absence de l'Etat : cuisines collectives offrant des repas aux plus démunis, distribution de colis de nourriture, d'articles d'hygiène, de masque par les syndicats, soutien juridique aux travailleuses et aux travailleurs licenciés. Et les mouvements en appellent aux gouvernements pour qu'ils interrompent le service de la dette et investissent les ressources ainsi préservées dans le soutien à la population et dans le système de santé. 


Au Pakistan, des millions de travailleuses et de travailleurs (dont beaucoup travaillent à domicile, dans le secteur informel) ont été mis à pied, sans indemnités, sans salaire, sans allocations de chômage, quand les multinationales de la mode ont annulé leurs commandes et que le gouvernement a fermé les usines. Six millions de travailleuses et de travailleurs ont été licenciés, et nombre d'entre eux ont été ensuite réengagés, sans contrat de travail,  à des conditions salariales et sociales moins bonnes et sans protection sanitaire, quand les commandes des multinationales sont revenues. Les syndicats HBWWF et NTUF se battent pour que les salaires soient versés, que les licenciements soient empêchés, que des mesures de protection sanitaires des travailleuses et travailleurs soient prises. Les deux syndicats distribuent en outre des colis alimentaires à celles et ceux qui ont perdu leur emploi. Enfin, ils exigent que le Pakistan cesse d'assumer le service de sa dette à l'égard des créanciers internationaux et affecte les ressources ainsi économisées à la création d'assurances sociales élémentaires : assurance-chômage, indemnités journalières, assurance-vieillesse. 


En Afrique du Sud, le gouvernement a pris des mesures de prévention contre la propagation du virus, qui supposent que les habitants qui doivent les respecter disposent de toilettes et d'eau courante. Dont les habitants des bidonvilles ne disposent pas. Pas plus qu'ils ne disposent de services sanitaires publics, ni même se services de voirie. Le mouvement des sans-abri "Abahlali baseMjondolo" s'est donc organisé pour suppléer à ces absences : installation de citernes d'eau potable et de toilettes mobiles, colis alimentaires -mais aussi résistance aux expulsions et aux destructions des habitants précaires -les seuls dont disposent les populations citadines les plus pauvres. 


Au Brésil, qui est devenu l'épicentre, le "cluster" mondial de l'épidémie avec un million de cas et 50'000 morts, le Mouvement des sans-toi (MTST), affronte la même situation qu'en Afrique du Sud -avec la circonstance aggravante du négationnisme du gouvernement de Bolsonaro. La population des quartiers les plus pauvres, privés de toilettes, de produits de nettoyage et d'eau courante, a été brutalement frappée par les partes d'emploi et de revenu, et est dans l'impossibilité de respecter les précautions sanitaires élémentaires. Les services de santé sont saturés, le gouvernement tient les victimes de la pandémie pour quantité négligeable et les évacuations forcées et les coupures de flux continuent. Le MTST brésilien, tente de pallier à cette situation en formant des "brigades sanitaires", en distribuant des colis alimentaires et des articles d'hygiène, en mettant sur pied des cuisines collectives offrant des repas gratuits, en dressant des tentes pour isoler les personnes symptomatiques.

Le Solifonds soutient ces mouvements et ces organisations. Soutenez ce soutien :

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