Brèves de comptoir

 

La directive interne de la radiotélé romande pour la promotion du langage épicène continue de faire légèrement ricaner, jusqu'en France, où le chroniqueur très réac de la chaîne d'info continue CNews, Pascal Praud, a dénoncé un diktat politiquement correct, et féministe «intersectionniste», son collègue de RTL, Cyprien Cini, se contentant de noter que les journalistes de sa chaîne sont tous et toutes en faute de violer, en disant «bonjour à tous» plutôt que simplement «bonjour» ou «bonjour à toutes et tous», la règle d'user d'un langage épicène. Que la RTS devienne une référence féministe pour les résistants au féminisme devrait nous réjouir, mais on a quand même comme un léger doute, cette référence étant aussi celle d'un medium accusé d'être un bouillon de culture harceleuse, tripoteuse et peloteuse...

Lors du procès de Pierre Maudet devant le tribunal de police, le procureur Grodecki a eu des mots très forts pour qualifier les relations de Maudet, de ses copains entrepreneurs et des potentats d'Abu Dhabi : des «noces barbares». Une expression qui renvoie à un roman de Yann Queffelec et au film qu'en a tiré Marion Hänsel. Le film raconte l'histoire d'un enfant né d'un viol, placé dans une institution pour débi-les légers dont il s'échappe en l'incen-diant pour se cacher dans l'épave d'un bateau, où sa mère le retrouve. Il la tue, puis se suicide. Un pur drame, plutôt eschylien, sophocléen ou euripidien que shakespearien, mais en tout cas largement au-dessus du niveau courtelinesque de l'«affaire Maudet». Le procureur aurait voulu grandir Maudet en dramatisant sa faute, il ne s'y serait pas pris autrement. Ouais, ça doit être ça.

Dans la «Tribune de Genève» du 23 février, la Conseillère nationale UDC Céline Amaudruz se plaint que seuls les habitants de la Ville puissent voter sur le projet de parking Clé-de-Rive alors que «c'est un projet pour l'ensemble du canton». En fait, le parking pouvant être utilisé par tous les automobilistes venant en Ville, c'est même un projet pour l'ensemble de la «Grande Genève». On se demande donc pourquoi l'UDC ne demande pas carrément que les habitants des communes françaises et vaudoises voisines puissent voter...

Sarkozy condamné à trois ans de prison, dont un an ferme. Deux se-maines après que Maudet ait été condamné à des jours-amende. Mais personne n'a relevé l'impact du verdict genevois sur le français ? C'est trop de mépris de la province...

Dimanche, après des mois de débats passionnés, une trentaine de membres de SolidaritéS ont fait scission du mouvement et ont fondé une nouvelle organisation, «Résistons !» (mais à quoi ? au risque de l'unité ?). La décision de SolidaritéS de ne pas présenter de candidat à l’élection partielle (à laquelle, pourtant, la gauche de la gauche a un candidat, Morten Gisselbaek, du Parti du Travail, que ne soutiennent ni SolidaritéS ni Résistons! ) a servi de prétexte. Résultat : les anciens de SolidaritéS passés à «Résistons!» se retrouvent dans la même situation que les anciens de SolidaritéS passés au Parti du Travail. Et pour la votation de dimanche, la nouvelle formation donne exactement les mêmes mots d'ordre que l'ancienne, d'où elle sourd et dont elle affirme s'inscrire «politi-quement» dans la continuité. Pour rendre encore plus évidente l'absence de divergence politique perceptible entre le canal historique et le canal nouveau, celui-ci proclame qu'il «situe son action au sein d’Ensemble à Gauche» et entend même, tant qu'à faire, «participer aux débats du prochain congrès de solidaritéS-Suisse, à l’automne prochain». On quitte donc SolidaritéS sans quitter ni SolidaritéS ni Ensemble à Gauche. La question nous brûle dès lors les lèvres : pourquoi la scission ? Ben... parce que. Contentez-vous de ça. Et si vous ne vous en contentez pas, attendez le prochain épisode. En espérant qu'il sera un peu moins teinté de règlements de compte personnels, et d'un peu plus de sens politique. On rêve. On peut ?

Le Conseiller municipal PLR Simon Brandt a eu plus de chance avec la justice que son mentor Pierre Maudet, s'il en a eu beaucoup moins avec la police : le Tribunal fédéral a admis le recours qu'il avait déposé contre le refus du Ministère Public de récuser un policier en charge de son ar-restation dans le cadre d'une procédure pour violation du secret de fonction. Les conditions de son arrestation ayant été marquées par la disproportion des moyens engagés et des méthodes utilisées contre lui (en gros, on l'a traité comme un potentiel terroriste alors qu'il n'était accusé que d'avoir transmis à la presse un rap-port sur les notes de frais des fonctionnaires municipaux), Simon Brandt avait déposé plainte contre le policier, pour abus d'autorité. Mais le policier était resté actif dans l'enquête. Simon Brandt en avait donc demandé la récusation, en même temps que celle des autres policiers (une dizaine, pas moins) mobilisés pour l'arrêter. Le Ministère public ayant refusé sa demande sans l'avoir entendu, le Tribunal fédéral a jugé que son droit d'être entendu a été violé. Le Ministè-re Public devra donc à nouveau se pencher sur sa demande de récusation, mais cette fois en respectant son droit à être entendu. «C'est une petite victoire», commente l'avocat de Simon Brandt. Son client a bien été condamné par ordonnance pénale (à 80 jours amende à 170 francs par jour) pour violation du secret de fonction, mais il a contesté cette décision et sera donc jugé  par le Tribunal de police à juge unique. Simon Brandt réclame par ailleurs 1,1 million de francs d'indemnités pour tort moral, compte tenu des conditions particulières de son arrestation. Voilà. Y'a donc pas que l'«Affaire Maudet» dans la vie genevoise, et il faudrait pas qu'elle fasse de l'ombre à d'autres «affaires», ça serait dommage.




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