Fonds de tiroir

 «Les dix personnes les plus riches du monde se sont enrichies pendant la crise de la Covid», dénonce l'ONG Oxfam. Et alors ? Le milliard de personnes les plus pauvres du monde se sont bien ap-pauvries dans le même temps, fallait bien compenser pour établir l'équilibre, non ?

Titre du «Matin Dimanche» de dimanche dernier : «La montée en puissance de Pékin passe par Genève». Et dans l'article dessous, on lit : «le bras de fer entre les puissances occidentales et la Chine se joue à Genève»... Et l'article conclut : «Pour défendre ses intérêts et sa vision du monde, Pékin avance désormais en force et sans complexe. Et c'est à Genève, bastion du multilibéralisme, dédié au dialogue et à la paix, que s'étire la ligne de fracture ». Ben forcément, on est quand même le centre du monde, la capitale mondiale du monde mondial, non ?

L'enquête menée au sein de la radiotélé suisse romande (RTS) après que «Le Temps» ait révélé les pratiques de harcèlement sexuel de cadres de l'entreprise, a abouti au départ de deux d'entre eux, l'un démissionnant de son poste, l'autre étant sanctionné et déplacé. En outre, le rédacteur en chef de l'actualité télévisée a annoncé son départ de la RTS («l'envie n'y est plus»...) et celui des ressources humaines son départ de son poste (tout en restant dans l'entreprise). Le directeur de la chaîne romande, Pascal Crittin, et le patron de la SSR, Gilles Marchand, restent à leur poste : le Conseil d'administration de la SSR leur a maintenu sa confiance (tout en relevant des «insuffisances managériales». Quant à l'ex-présentateur du TJ Darius Rochebin, passé sur la chaîne française LCI, il est disculpé de tout acte pénalement répréhensible. Cet aboutissement de l'enquête a suscité la colère du collectif genevois de la grève féministe, en pointe dans la dénonciation des pratiques de harcèlement au sein de la RTS : «les plaintes des victimes ont été entendues, pas écoutées».Des demandes d'excuses ont bien été présentées par le président du Conseil d'administration de la SSR, Jean-Michel Cina, assorties d'un engagement à appliquer la «tolérance zéro» à «toute forme de harcèlement», le sujet étant désormais d'«importance stratégique», et le directeur de la SSR, Gilles Marchand, a bien reconnu «des décisions erronées», les a regrettées et s'en est excusé, mais ces excuses et ces engagements peinent à convaincre.  Quant au «Temps», dont l'enquête avait fait éclater l'affaire, il considère que le traitement qui doit se faire d'ici fin juin  des 180 témoignages anonymes non encore traités (sur les 230 témoignages reçus par le Collectif de défense mandaté pour les recevoir) «laisse ouvertes de nombreuses questions». Et la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga dit de même que «l'affaire n'est pas réglée» (des enquêtes disciplinaires pourraient encore être lancées). Le syndicat des mass media (SSM) s'interroge sur la cohérence entre le rapport et les décisions (ou les non-décisions) du Conseil d'administration de la SSR, et attend «des mesures concrètes très rapides» pour que «la direction passe de la parole aux actes». Bref, quelque chose nous dit qu'on n'a pas fini d'en entendre parler, du harcèlement à la SSR (et pas seulement dans sa part romande : au Tessin aussi) et qu'il ne suffira pas que quelques présidents ou directeurs confessent quelques «erreurs» pour que leur entreprise se revête de lin blanc et de probité candide après avoir déménagé dans une banlieue lausannoise... Eh ouais, une entreprise, c'est un lieu de pouvoir. Et ceux qui ont du pouvoir finissent presque toujours par en abuser -ou rêver de le faire.


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