Lancement de l'initiative législative cantonale "Climat urbain"
Conquête de l'espace
A Genève, "Actif-trafic" lance une initiative
législative cantonale "Climat urbain", pour rendre l'espace
urbain aux mobilités douces et à la végétation, au rythme de
reconquête annuelle de 1 % de la surface dévolue au trafic
motorisé. Soutenue par les partis de gauche, les Verts libéraux
et une vingtaine d'associations et mouvements (dont l'ATE,
l'AVIVO, la Grève du Climat), l'initiative prolonge, et d'une
certaine manière relance, celle sur la mobilité douce, acceptée
par le peuple il y a dix ans mais toujours pas appliquée. Elle
s'inscrit aussi dans une démarche nationale, puisque des textes
semblables sont ou seront proposés à Bâle, Saint-Gall,
Winterthur, Zurich et Berne. Elle s'inscrit enfin dans une
tendance marquée des votes populaires : en septembre, les
Genevois du canton acceptaient la suppression de places de
stationnement, et en mars ceux de la Ville refusaient un nouveau
parking à Rive... et un sondage de l'année dernière, en pleine
première vague de pandémie, indiquait que les habitants des
villes avaient l'intention, une fois les restrictions de
déplacement levées, de s'y déplacer le plus possible à pied, à
vélo ou en transports public. Reste à leur en donner la
possibilité sans leur imposer des risques et des nuisances qui
en dissuadent encore beaucoup. La conquête de l'espace est une
longue marche, comme dirait Gagarine. Même celle de l'espace
urbain.
On peut obtenir des feuilles de signatures ici :
https://www.actif-trafic.ch/node/963#besoin-de-vous
L'agora n'est pas un parking, c'est un espace où
se rassemblent des personnes
L'initiative "Climat urbain" lancée à Genève (et
dans plusieurs autres villes suisses, ce qui incidemment
réaffirme le rôle central des villes dans la mise en oeuvre
d'une transition environnementale) demande la libération de 10 %
de la voie publique affectée au trafic motorisé, à raison de un
pour cent par an pendant dix ans, et sa reconversion en espace
végétalisé, piétonnier, cycliste, mais aussi en voies réservées
aux transports publics, dans les treize communes genevoises de
plus de 10'000 habitants. Cette réaffectation doit se faire en
maintenant la végétation existante,une commission consultative
chargée de surveiller la mise en oeuvre des mesures de la loi
serait instaurée, le Conseil d'Etat devra lui rendre rapport
tous les deux ans. La loi proposée n'implique aucune taxe ni
impôt supplémentaire.
Tenant tout à la fois des politiques des
transports, de l'aménagement, de l'urbanisme, de la santé et de
l'environnement, la reconquête de l'espace urbain est aussi une
reconquête de l'air : végétaliser permet de lutter contre le
réchauffement, de réduire la circulation motorisée et ses
émissions polluante, y compris le bruit (un quart de la
population du canton de Genève doit supporter des émissions de
bruit excessives, dues au trafic motorisé) et d'améliorer la
sécurité des piétons et des cyclistes. Les émissions de CO2
dues au transport pèsent un tiers du total de toutes les
émissions, et continuent d'augmenter. Et c'est les villes, et
d'entre elles les plus denses, comme Genève, qui sont les plus
exposées au réchauffement climatique (la température moyenne à
Genève pourrait augmenter de 4,5 ° d'ici quarante ans, de sept
degrés d'ici septante ans, si rien n'est fait pour la freiner),
tout y concourant : l'imperméabilisation des sols, la couleur
foncée du revêtement des rues, une végétalisation insuffisante,
la concentration des moteurs. Mais comme ce sont aussi ces
villes où il est le plus facile de se passer de moteur pour se
déplacer, ce sont aussi dans ces villes que récupérer de
l'espace pour la marche, le vélo ou la végétation s'impose.
L'urgence du choix politique se conjugue ici à la facilité de sa
mise en oeuvre concrète.
Il y a soixante ans, les
situationnistes assénaient : "La circulation est
l'organisation de l'isolement de tous. C'est en quoi elle
constitue le problème dominant des villes modernes. (...) en
fait, on n'habite pas un quartier d'une ville, mais le
pouvoir. On habite quelque part dans la hiérarchie."
(Internationale situationniste, août 1961). Sous le mouvement
brownien des "pendulaires", il y a l'ordre social.
L'espace public, c'est l'espace qui différencie autant qu'il relie la société civile et l'Etat, les citoyens et le pouvoir politique. Il doit être accessible à tous les citoyens, ils doivent pouvoir s'y assembler, y former l'"opinion publique". Dès lors, la qualité de l'espace public est liée à la qualité de la démocratie locale. Et l'exigence d'une reconquête de cet espace est l'exigence d'une reconquête démocratique.
L'agora n'est pas un parking, c'est un espace où se rassemblent, librement, des personnes.
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