Retour sur le refus de la loi CO2 : Une étape, rien qu'une étape

La nouvelle loi CO2 a été refusée au plan national par 51,6 % des suffrages, mais acceptée à 61,4 % à Genève. Hors des villes, dans la Suisse rurale et périurbaine, "la Suisse des pendulaires et des propriétaires de villas, la Suisse qui dépend le plus du pétrole", comme la résume Antonio Hodgers. ce n'est pas sur l'urgence climatique qu'on a voté, c'est contre les taxes. Et peu importe que leur produit devait être redistribué : on était contre les taxes, point barre. Payer son essence plus chère ? Nan ! Payer son billet d'avion plus cher ? Nan ! Prendre le train plutôt que l'avion pour aller s'abreuver sur les ramblas ? Nan ! On est écolo, si ça ne coûte rien. Céline Amaudruz peut donc saluer une "victoire de la classe moyenne". Et Simonetta Sommaruga annoncer que qu'elle s'engagera pour prolonger la loi CO2 actuelle. Pour la gauche et les Verts, c'est insuffisant, et il faut revenir avec de nouvelle mesures, en sortant des taxes et de la redistribution. Une initiative populaire pourrait être lancée pour la "décarbonisation de la place financière", et une autre sera soumise dans les mois à venir au vote populaire : l'"initiative des glaciers", plus radicale dans son contenu que la loi qui vient d'être refusée : elle propose en effet l'interdiction pure et simple de l'utilisation d'énergies fossiles d'ici trente ans, au plus tard.

Tenter de répondre à l'urgence climatique en oubliant l'urgence sociale, cela produit des "gilets jaunes"

Le refus de la loi CO2 a fait une première victime : la présidente du PLR suisse, Petra Gössi, qui a démissionné de sa présidence. Elle incarnait un possible virage "vert" (très pâle, pourtant) des radelibes, mais elle a été lâchée par ses troupes, son électorat et même ses lieutenants, tel le funeste grimpion valaisan Philippe Nantermod, alors que la loi portait une marque PLR visible et que c'est d'abord le PLR qui devait mener campagne pour la faire passer. Au lieu de quoi la position du parti était minée par des notables, combattue par les Jeunes PLR, et que sitôt le refus populaire de la loi connu, certains (Nantermod, notamment) se sont empressés de proclamer la fin de la "vague verte" et d'accuser les Verts de ne pas l'avoir assez soutenue (alors que 85 % de leurs électeurs l'ont fait), puis, comme la Conseillère nationale vaudoise Jacqueline de Quattro,  ont repris le discours de l'UDC contre une loi punitive et taxatrice (en glissant au passage une proposition de déductions fiscales). Bon, c'est pas grave, les Nantermod, c'est le problème du PLR suisse, pas le nôtre, qu'il se démerde avec, on a autre chose à faire. A commencer par faire comprendre que des mesures fortes, radicales au sens étymologique du terme (s'attaquant à la racine des problèmes) contre les causes humaines du réchauffement climatique sont inévitables, en sus d'être légitimes. Le vote d'il y a huit jours ne ferme pas le débat, n'en est qu'un moment, mais un moment de confirmation (pour nous) ou de révélation (pour d'autres) qu'on ne relèvera pas l'urgence climatique sans relever en même temps l'urgence sociale. Cela vaut pour des mesures telles que celles proposées par la loi CO2 refusée par le peuple, et cela vaut pour toutes les mesures environnementales que nous aurons à proposer. Car à tenter de répondre à l'urgence climatique en oubliant l'urgence sociale,on ne produit en France que des"gilets jaunes" et en Suisse un "non" à la loi CO2. 

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