Brèves Troubles

 A Genève, on a rétabli le culte celtique de l'arbre sacré : on hurle chaque fois qu'on abat un arbre, puis on entend promettre qu'on en plantera de nouveaux partout, et c'est très bien. Quoique que le culte, on pourrait s'en passer, mais peu importe. Donc, à Genève, on protège les arbres. A Winterthur, y'en a un qu'on voudrait abattre, un grand chêne octogénaire. Il n'a rien fait de mal, cet arbre, il ne gêne personne... mais il a été offert par le IIIe Reich à un gymnaste du coin médaillé d'or aux Jeux Olympiques de Berlin en 1936. Un Dieu du Stade, quoi, qui avait baptisé l'arbre offert par les nazis du nom de sa fille, Sonja. Alors déjà, un cadeau nazi, ça la fout mal. Mais en plus, il est devenu un lieu de rendez-vous pour des groupes extré-mistes, des néonazis et des islamistes. Du coup, on s'est demandé s'il fallait pas l'abattre, le chêne, même s'il est totalement innocent de sa récu-pération par des glands brunâtres. Et puis, finalement, on a renoncé à l'abattre, le chêne. Et les autorités municipales songent plutôt à en faire un symbole, à «transformer cette histoire sombre en quelque chose de positif», avec une plaque com-mémorative qui rappellerait que Georg Miez, l'athlète à qui il a été offert (sans qu'il ait rien demandé) par le IIIe Reich, n'avait rien d'un sympathisant nazi, et avait refusé de saluer Hitler lors de l'ouverture des jeux. Et c'est ainsi que l'histoire finit toujours par nous rattraper même là où on s'y attend le moins. Au pied d'un chêne, par exemple.

Faut pas en vouloir aux poulets qui pètent un plomb : flic, c'est un boulot qui porte sur les nerfs, le moral, la raison et le contrôle de soi. Ainsi, deux policiers genevois se sont retrouvés devant le tribunal... de police, le 4 juin, pour s'être livrés le 1er mai 2020 à un rodéo automobile nocturne à bord de leurs deux véhicules de service banalisés, sans doute pour impressionner les deux passagères de l'un d'eux (pour être flic on n'en est pas moins zhomme). Donc, les deux poulets sortent du parking du poulailler de Carl-Vogt et se mettent à faire la course, sirène hurlante et feu bleu allumé, en prenant des accès interdits, en roulant sur les voies des bus, en brûlant les feux rouges, en roulant à 120 sur des tronçons limités à 50... l'orgasme, quoi. Mais bon, l'orgasme, à moins de priapisme, ça dure pas : finalement, les deux andouilles se rentrent dedans, et prennent la tangente, avant d'avertir le commissaire de permanence de l'accident -mais en cachant ses circonstances et en minimisant les dégâts. Faut pas mentir à la police, même quand on est policier : leur histoire est démontée, ils sont arrêtés, coffrés pendant quelques heures et renvoyés vers le Tribunal de police, qui se contentera de ratifier la sentence fixée par le procureur général Jornot (il manquait à l'appel, celui-là) et qu'ils avaient acceptée par avance : une peine privative de liberté, assortie du sursis. Ouala. On reste en famille, on morigène les énergumènes (l'un des deux a quitté la police), et on reprend les routines. A fond la caisse avec sirène et feu bleu ? Bah, faut bien décompresser, hein...
Y'a d'ailleurs pas que les flics qui ont besoin de décompresser : les matons aussi. Après deux bizutages  à Champ-Dollon en septembre 2017 et avril 2018 (deux nouveaux collègues ont été intronisés à coups de peinture, de seaux d'eau, de produits alimentaires liquides et solides, le tout ayant été filmés par les bizuteurs), quatorze gardiens ont été mis sous enquête administrative et la plupart d'entre eux ont été sanctionnés, écopant de blâmes, d'avertissements formels, de services supplémentaires non payés. L'un d'entre eux a en outre été sanctionné pour avoir frappé un détenu. Ce qui nous rappelle utilement qu'il n'y a pas que les prisonniers qui subissent la prison : ceux qui les gardent aussi.

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