Genève : Les projets de budgets du canton et des communes sont connus
Routines parlementaires et rhétoriques
Refuser l'entrée en matière sur un projet de budget,
c'est ne plus pouvoir le modifier.
En hors d'oeuvre du Conseil municipal, lundi,
avant le débat d'entrée en matière sur le projet de budget 2022
de la Ville, on en a un sur les comptes 2020. Un débat suivi
d'un vote. Un vote pour beurre : à moins que les comptes soient
mensonger, ils seront adoptés par le bailli cantonal -le Conseil
municipal ne vote que sur ses propres états d'âmes. En 2018, la
droite, alors majoritaire, avaient refusé les comptes 2016, tout
en admettant qu'ils
étaient sincères et exacts, autrement dit qu'ils reflétaient
fidèlement les dépenses et les recettes de la Ville en 2016.
Un Conseil municipal qui refuse les comptes, c'est grave, docteur ? Non, c'est
pas grave, puisque le Conseil d'Etat, décisionnaire en la
matière, les a, lui validés le 10 novembre, en même temps
que les dépenses budgétaires supplémentaires, par une
décision qui relève, suavement, que les comptes sont justes
et que leur refus par le Conseil municipal "est motivé par
des raisons purement politiques et non de droit". En clair,
parce que la majorité du Conseil municipal est de droite et
d'extrême-droite et que la majorité du Conseil administratif
est de gauche. Et que la première majorité a voulu montrer à
le seconde qu'elle existait. Pour montrer qu'elle sert à
quelque chose, évidemment, faudrait pouvoir faire mieux.
Mais à l'impossible on ne la tenait pas.
Quant à ce qui devrait être le plat de résistance
de nos festivités parlementaires, le budget, ou plutôt le projet
de budget présenté par le Conseil administratif, la première
chose à en dire c'est qu'il est contraint par un cadre cantonal
que le canton n'impose qu'aux communes. La Ville n'a droit qu'à
un déficit budgétaire de 49,3 millions de francs par année
jusqu'au budget 2027 (le Conseil d'Etat, lui, propose un déficit
presque dix fois supérieur au budget cantonal), et doit "revenir
à l'équilibre" budgétaire pour 2028. Pour l'année prochaine, le
projet de budget comporte un excédent de charges (un déficit, en
bon français) de 40,8 millions. Et n'arrive à tenir dans le
cadre posé par le canton qu'en usant des charges de personnel de
la fonction publique municipale comme variable d'ajustement :
pour économiser 8,2 millions de francs, soit moins de deux pour
cent des charges de personnel, moins d'un pourcent des dépenses
budgétaires totales, ou moins que le seule subvention au Grand
Théâtre, le Conseil administratif propose de suspendre une
partie des mécanismes salariaux négociés avec les représentants
de a fonction publique municipale. Un raisonnement de comptables
apolitiques aboutissant à une économie de bout de chandelle.
On reviendra plus en détail dans les semaines à
venir sur le budget de la Ville quand le Conseil municipal aura
accepté d'entrer en matière sur le projet présenté par
l'Exécutif. On reviendra aussi sur les seules "variables
d'ajustement" dont l'utilisation ait un véritable sens, un
véritable contenu politique : l'impôt direct et le temps de
travail de la fonction publique. L'impôt direct que la gauche
cantonale et fédérale propose de renforcer quand la gauche
municipale semble se tétaniser à la seule évocation de la seule
hypothèse d'en faire autant de l'impôt municipal (la droite
cantonale et municipale,en revanche, propose de supprimer
purement et simplement le seul impôt dont la commune ait la
maîtrise, la taxe professionnelle, et ainsi de faire perde à la
Ville 106 millions de recettes, soit plus que la totalité des
subventions municipales à la culture et au sport, et près des
deux tiers du financement de la politique sociale de la
commune). Quant au temps de travail, le réduire d'une heure par
semaine chaque année jusqu'à le faire atteindre les 32 heures
(objectif exprimé par une initiative syndicale "1000 emplois")
permettrait d'économiser des millions, sans même toucher au
salaire mensuel des plus basses classes de traitement...
Brisons là : pour l'heure, disons simplement que refuser d'entrer en matière sur un projet de budget du Conseil administratif, c'est-à-dire refuser de l'étudier, n'a aucun sens, sinon celui qu'on peut accorder à une posture politique sans contenu politique. Autre chose serait de refuser le projet de budget sorti de la Commission des finances (mais qui n'en peut sortir que s'il y est entré, et il ne peut y entrer que si on accepte de l'y renvoyer et de le renvoyer dans les "commissions spécialisées") s'il ne nous convenait pas. la Ville se retrouverait alors dans le régime des "douzièmes provisionnels", c'est-à-dire l'octroi mois après mois d'un douzième des allocations prévues au précédent budget adopté. C'est-à-dire, si on refuse le budget 2022, le budget 2021. Le dernier budget de la nouvelle majorité de gauche. Un budget qu'on avait accepté. Un bon budget, quoi. Mais un budget d'avant la pandémie, et qui ne répond à aucune des urgences qu'elle a imposées.
On va voter l'entrée en matière sur le projet de
budget du Conseil administratif de la Ville. D'abord, parce que
c'est notre boulot, qu'on a été élus et qu'on est payés pour le
faire. Ensuite, parce que c'est nécessaire pour pouvoir le
modifier. On n'approuvera pas le projet qui nous est soumis, on
se dotera d'un brouillon de celui qu'on pourra approuver, on se
donnera les moyens d'accoucher d'un budget qu'on pourra voter.
Un budget qui réponde aux urgences sociale et climatique. Un
budget qui, en respectant les accords passés avec le personnel,
maintient, et améliore, les prestations à la population. Et un
budget qui, s'il le faut, prévoie un centime additionnel d'impôt
de plus, pour financer ces prestations.
Un budget de gauche, quoi...
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